Comme en 2007 notamment, cette année encore le scrutin législatif a enregistré un taux de participation indésirable. En clair, les populations de Bamako, en droit de voter, n’ont pas accepté de se déplacer aux urnes. Pour certains observateurs, cette preuve de manque de civisme serait due au fait que les Maliens s’intéressent de peu en peu à la question électorale, au vote.
En effet, dans la journée du dimanche 24 novembre, au grand marché de Bamako, nombreux étaient de citoyens venus s’installer sur leurs étals ou ouvrir leurs boutiques comme si l’on n’était pas à une journée de vote. A la question de savoir s’il n’ira pas déposer son bulletin aux urnes pour accomplir son devoir civique, Madou Kamissoko, un étalagiste de son état, rétorque qu’il ne serait plus question pour lui d’abandonner sa marchandise au profit des hommes politiques. Partant de ces derniers, il dit avoir été déçu à plus d’un titre. Surtout à la suite du scrutin présidentiel passé. Car: «Ma famille et moi avons tous été voter lors des présidentielles passées. Mais, j’ai peur d’avoir été trompé par le candidat pour lequel j’ai voté», a-t-il martelé sans d’autres explications.
De son côté, Mme Coulibaly Fatou Nantoumé, vendeuse de produits pharmaceutiques par terre à Dabani, si les choses ne changent pas comme nous l’avions espéré lors des présidentielles dernières, je risque de ne plus participer dans le reste de ma vie à un vote. D’après elle, le taux de participation aux présentes élections sera obligatoirement faible. Un constat fait par une citoyenne qui était pourtant très engagée sur le terrain politique.
Dans le même ordre d’idées, un autre citoyen dira qu’il n’ira pas au vote parce qu’il pensait que la crise socio politique dans laquelle le pays est plongé depuis mars 2012 trouverait un début de solution dès après l’élection d’un nouveau président de la République. Mais,«pour le moment, le motif d’espoir qui pointe à l’horizon ne semble pas prometteur», conclura-t-il.
En tout cas, dira un autre observateur de la scène politique de notre pays, il y a un grand fossé qui se dessine entre électeurs et acteurs politiques sur le terrain. Notamment, autour des questions sensibles avec au premier chef la crise du nord (le refus du gouvernement malien de prendre ses responsabilités face à l’entêtement du Mnla et ses alliés dans la libération de Kidal) et la cherté de la vie.
En outre, l’électorat malien se dit avoir été choqué du comportement érigé en système par une race d’élites politiques de la place. A ce propos, Lamine Traoré, enseignant de profession, pointe le doigt accusateur vers les élus qui se sont livrés au cours de ces 20 dernières années de notre processus démocratique à des actes frisants le nomadisme politique avec sur fond de trahison. Il explique que nombreux ont été de nos Députés à l’assemblée nationale, Maires et Conseillers communaux élus sous la bannière des partis politiques qui n’ont pas hésité à trahir leurs militants au profit des intérêts personnels. Ils sont allés jusqu’à vendre leur dignité en changeant d’appartenance politique moyennant des enveloppes en espèces sonnantes et trébuchantes.
Autant de raisons qui expliquent à suffisance le peu d’engouement des maliens dans leur écrasante majorité suscité par l’élection législative du dimanche dernier. Durant presque toute la journée, en tout cas celui du premier tour, c’est un taux d’abstention quasiment total qui prévalait dans presque tous les bureaux de vote de Bamako voire de l’intérieur. La situation fut préoccupante en telle enseigne que certains responsables ont été contraints de monter au créneau pour demander les partis politiques de bien vouloir accepter d’inviter leurs militants à se rendre aux urnes.
En conclusion, force est de reconnaître que cette année encore le défi du taux de participation n’a pas pu être relevé.
Alpha M Cissé