Le Mali se dirige sans nul doute, vers l’organisation de l’élection la plus cruciale et la plus périlleuse de son histoire : la présidentielle du 28 juillet. Cette consultation est appelée à mettre un terme définitif à la crise née du coup d’Etat de mars 2012. Mais de grosses menaces planent déjà sur l’élection. Lesquelles ?
Du côté des candidats, là aussi, la fièvre monte. A Bamako, ceux-ci multiplient les manifestations et les contacts avec les populations. Les premières affiches de campagne sont visibles dans les artères de la capitale. Dans chaque camp, l’on est convaincu de remporter la future présidentielle.
Après un an de crise, tous les repères politiques du Mali sont bouleversés. Donc, il est difficile d’accorder le moindre crédit à tous ces pronostics émanant des états-majors des candidats, dont certains se voient déjà à Koulouba. Il peut exister bel et bien un fossé entre le rêve et la réalité. Surtout en politique.
Dans le contexte actuel, il y a néanmoins des candidats qui se dégagent du lot. Il s’agit notamment de : Soumaïla Cissé (Urd), Modibo Sidibé (Fare), Dramane Dembélé (Adema) et Ibrahim Boubacar Kéïta (Rpm).
Compte tenu du poids politique de leurs formations, ils sont, logiquement considérés comme favoris. Cependant, les jeux sont loin d’être faits. Et certains partis figurant dans ce peloton de tête ont lamentablement échoué dans leur fief électoral lors des deux dernières élections de proximité : les municipales (2009) et les législatives (2007). Or, ces formations politiques, ou du moins, leurs leaders, ferment aujourd’hui les yeux sur cette triste réalité : ils sont en rupture avec les Maliens et surtout avec leur base politique. En somme, ils ont peu de chance de remporter la présidentielle. Mais qu’est-ce qu’on constate ? Les mêmes candidats, alors qu’ils n’ont que des coquilles vides en guise de parti politique tentent de faire croire à l’opinion malienne, voire internationale que la voie de Koulouba est toute tracée pour eux. Ils n’ont d’autres destinées que d’exercer la magistrature suprême du Mali ! Selon eux, les sondages d’opinions et autres soutiens occultes suffisent pour être élu par les urnes.
Aux présidentielles de 2002 et 2007, ils étaient là. Ils ont à l’époque fait courir de gros risques sur la stabilité du pays. Fort heureusement, après moult manœuvres, ils ont finalement compris que les Maliens étaient loin de les suivre dans une aventure. Et juillet prochain ? Quelle sera leur réaction en cas de défaite ? Voilà la première menace qui guette la future présidentielle.
Errements politiques
Structure politique désarçonnée à cause du nomadisme de militants, discours en déphasage avec les réalités de l’heure, comportement dictatorial, soutien affiché aux putschistes après un accompagnement à ATT jusqu’au coup d’Etat: ce sont des errements politiques à mettre au compte de certains hommes politiques, alors que d’autres se battaient pour restaurer l’ordre constitutionnel. Et ces mêmes hommes politiques, aujourd’hui candidats (ceux-là qui ont posé des actes avec les putschistes) ne tarderont pas à payer cash leurs errements. C’est pourquoi, ils multiplient les manœuvres. Pour eux, le salut viendra, peut-être, de leurs soutiens….militaires et/ou civils. A ce niveau, il faut dire que l’ex junte se trouve dans une position inconfortable depuis l’intervention française et de la Misma, au Mali. Cependant, «la menace Kati » reste réelle. Elle plane sur la présidentielle. Il faut dire que des voix s’élèvent à Bamako pour réclamer une plus grande implication de la communauté internationale dans la stabilisation des institutions. Et surtout dans la supervision des opérations électorales, afin d’éviter des troubles pos-électoraux dans notre pays…Pour l’heure, il semble que des militaires ne sont guère loin de l’arène politique. Ils sont là, à l’affût. Et ils travailleraient déjà à faire élire le président de leur choix. Jusqu’où ces militaires peuvent-ils aller ? Ont-ils les moyens d’influer sur le cours de la présidentielle ?
Autre menace ? C’est l’interférence des religieux dans le jeu politique à Bamako. En effet, des leaders d’associations religieuses sont devenus de vrais politiques. La raison ? Ils sont courtisés par des hommes politiques, surtout en cette période électorale. Aujourd’hui, les mosquées et autres lieux de culte sont envahis par des émissaires au service de candidats qui sont prêts à tout pour se hisser au pouvoir y compris le terrain de la religion.
Seulement, voilà. Ils ne sont pas nombreux ces leaders religieux qui peuvent changer les résultats d’une élection, dans un pays comme le Mali, où les citoyens n’ont pas l’habitude d’exécuter des consignes de vote.
C.H. Sylla