Elections dans le nord du Mali : Les populations disent NIET

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La délégation gouvernementale dépêchée dans le septentrion par le chef de l’Etat pour essayer de convaincre les populations d’adhérer aux élections est rentrée avec des résultats mitigés. A Tombouctou, Gao et Kidal, on pense à tout sauf à ça.

 

L’abandon par les forces armées et de sécurité de l’importante et stratégique garnison militaire d’Amashash et l’occupation, à16 kmde là, de la ville de Tessalit par plusieurs groupes armés dont le Mnla, ont créé un état de psychose généralisé dans le nord du pays. Notamment dans la ville-garnison de Kidal dont Tessalit est le dernier verrou sécuritaire. Les populations ne se sentant plus en sécurité, plusieurs notabilités, leaders communautaires, cadres et responsables ont tenu à le signifier à la délégation gouvernementale qui vient de quitter les trois régions du nord. Les ministres en charge de l’administration territoriale, Kafougouna Koné, de la réforme de l’Etat, Daba Diawara, du développement social, Harouna Cissé, et de la communication, Sidiki Konaté qui est également porte-parole du gouvernement, étaient à Kidal, Gao et Tombouctou pour informer les populations sur l’état d’avancement des opérations référendaires et électorales de 2012. Cette initiative s’inscrit dans l’entêtement du gouvernement et d’une certaine partie de la classe politique à organiser ces scrutins dans les délais annoncés, et nécessite donc d’avoir l’aval des populations septentrionales.

A Kidal, Gao et Tombouctou, les populations ont patiemment écouté les représentants du gouvernement avant de leur signifier que leurs préoccupations de l’heure sont aux antipodes de celles du président de la Républiqueet des acteurs politiques. Pour les Kidalois, l’urgence est de trouver des solutions rapides et durables aux problèmes sécuritaires et humanitaires. «Avec qui veulent-ils organiser des élections ? Les populations ont fui les combats et se sont éparpillées dans la nature, beaucoup de gens se sont réfugiés dans les pays voisins. Nous n’avons vraiment pas le cœur à ça». Cette exaspération d’un cadre de Kidal peut être généralisée à toute la population. En plus de l’insécurité (depuis l’occupation de Tessalit et l’apparition de bandits armés à Diré et Goundam, les populations redoutent des assauts criminels, malgré les camps militaires censés défendre les villes), Kidal et Tombouctou sont confrontées à la pénurie de divers produits dont les denrées alimentaires. Notamment depuis que l’Algérie, où se ravitaillent en grande partie les commerçants du Nord, a renforcé le contrôle à ses frontières, suite à l’attentat-suicide, le 3 mars, contre la gendarmerie de Tamanrasset.

Même Gao n’échappe pas à la psychose d’une attaque et subit également des pénuries.

Mais si à Kidal et Tombouctou, les ministres ont pratiquement été congédiés, priés de s’occuper des vraies préoccupations des populations, à Gao on leur a fait comprendre qu’il n’est pas question d’y tenir des élections. Samedi dernier, avant même l’arrivée de la délégation ministérielle à Tombouctou, les rues de Gao ont été envahies pour une marche sur le Gouvernorat par les membres des associations Ganda Koy et Ganda Izo, qui, depuis quelques temps ont décidé de réunir leurs forces pour faire face à des ennemis communs.

Des ennemis qui se diversifient depuis un certain temps. En effet, au Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla) et à Al-Qaeda pour le Maghreb islamique (Aqmi), il faut désormais ajouter le Mouvement unicité et djihad en Afrique de l’ouest (Mujao) et Ansar Eddine. Ces différentes entités se partagent le nord avec, très souvent maintenant, des actions conjointes.

C’est la controversée gestion des menaces que représentent ces différentes entités qui vaut à ATT d’être décrié par certains pays, principalementla France, l’Espagne, l’Algérie etla Mauritanie. Despays dont les autorités ne souhaitent plus voir le général se maintenir au pouvoir après le 08 juin 2012. C’est pourquoi tout est mis en œuvre, y compris par le président Touré lui-même, pour la tenue du référendum et des élections à termes échus. Quitte à consacrer une partition de fait du pays puisque les populations du nord sont claires et formelles : aucune élection n’est possible et ne sera tenue dans les trois régions de Tombouctou, Gao et Kidal. Par conséquent, elles ne se sentent pas du tout concernées par une quelconque organisation d’un quelconque scrutin, elles n’y participeront pas. Leurs seules préoccupations étant le retour des populations dans la paix et la sécurité.

Cheick Tandina

 

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