Rétrospection: Intégrisme dans l’intégrité

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Une quinzaine de chefs de la diplomatie de certains pays ouest-africains se sont réunis à Bamako pour se plancher sur la question du nord malien. Selon certaines informations, les solutions préconisées seraient de deux sortes : la négociation ou la fermeté. Dans les deux cas, tout le monde est d’accord sur l’inviolabilité de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale. Mais à cette réunion qu’on a voulue importante et restreinte à la sous-région, il manquait certains pays essentiels. En particulier la Mauritanie et l’Algérie, membres du CEMOC et directement visés par l’activisme des terroristes de l’Azawad, et la Libye sont venues les hordes de bandits armés, et qui continue d’abriter ou d’accueillir les terroristes. Sans l’implication franche et loyale de ces pays, aucune solution durable ne sera trouvée au problème du nord. Un septentrion qui est devenu le sanctuaire de groupes armés.

On a longtemps supputé sur des connections entre ces gens. Et si le gouvernement avait besoin d’une preuve, on vient de lui en donner. La première est une vidéo propagandiste sur laquelle on le voit, lui et ses hommes, paradant et priant dans le champ de ruines qu’est devenue la garnison militaire d’Aguel Hoc où des soldats ont été sauvagement torturés et assassinés. La deuxième est un communiqué dans lequel il revendique et prône un djihad armé donc sanglant et meurtrier.

Il, c’est Iyad ag Ghali, celui-là même qui, il y a quelques temps de cela, exigeait du gouvernement de nommer un cadi derrière chaque juge.

Aujourd’hui, après plusieurs mois dans l’expectative, il a tombé le masque pour annoncer son intention de fonder une république islamiste basée sur la charia. Les autorités le prennent au sérieux. N’est-il pas l’instigateur de la rébellion de juin 1990 ? Grâce aux revenants de Libye, ne pourrait-il pas bénéficier d’aide et de soutien auprès de réseaux intégristes libyens, soudanais, tchadiens, nigériens, tunisiens, mauritaniens qui se sont tissés dans la Jamahiriya ? N’a-t-il pas le soutien de son parent salafiste « le Targui » ?

Sur ce dernier point, ce n’est pas vers ce parent et sa puissante organisation, AQMI, qu’Iyad s’est tourné pour se tailler une place dans le septentrion mais plutôt vers le Mouvement national de libération de l’Azawad pour étayer les chefs d’accusation qui ne manqueront pas de peser sur eux, Iyad et ses complices viennent d’avouer détenir des « prisonniers » militaires et civils. Passe que les militaires détenus soient considérés comme des prisonniers de guerre pour qui veut considérer cette folie en tant que telle, mais les civils enlevés et séquestrés ne sont ni plus ni moins que des otages, un crime qu’explique très mal la religion musulmane.

D’ailleurs, aux dernières nouvelles, Iyad serait déjà en froid avec ses nouveaux amis sur ses prétentions à créer un Etat intégriste dans l’intégrité territoriale actuelle du Mali au lieu d’un Azawad libre et autonome. Le mariage n’aurait pas trop duré entre celui qui se veut intégriste, mais qui a été expulsé de l’Arabie Saoudite pour trafic d’alcool et de stupéfiants sur les lieux saints de l’islam, et des revenants de Libye qui se veulent combattant aguerris et endurcis, mais qui ont été défaits et contraints à la fuite par des rebelles civils et inexpérimentés du CNT libyen. Pourquoi donc ce mariage ?

Retors et rusé, Iyad a compris dès le début que les revendications indépendantistes du MNLA ne seront prises en compte faute de soutiens à quelque niveau que ce soit. Il sait aussi que AQMI compte désormais recentrer ses actions contre son ennemi traditionnel, l’Algérie, et accessoirement contre la Mauritanie, et que les salafistes répugnent à s’attaquer directement aux forces armées et de sécurité. Il monte de toutes pièces, en l’occurrence quelques désœuvrés du désert, un mouvement, Ansar Eddine, et cherche à se positionner dans les négociations que le Mali sera contraint de mener sous la pression et l’insistance de plusieurs pays. Se positionner ? En fait, Iyad est fin prêt maintenant à reprendre du sport, son sport favori : le chantage. Le petit ânier, depuis qu’il a pris les armes en juin 90 contre l’autorité de l’Etat, a tout eu du pouvoir central. Argent, on parle d’une grande fortune, titre de noblesse dans la nébuleuse communauté des Ifoghas, haut grade dans l’armée. Il a même eu droit à une accréditation dans une ambassade du Mali dans un pays arabe d’où il a été chassé pour activités mafieuses.

Demain, aura-t-il encore l’oreille d’ATT ? Ce sera dommage. Au moment où la Cour pénale internationale commence à condamner ses célèbres pensionnaires et comme le Niger procède à l’arrestation de ses célèbres rebelles pour association de malfaiteurs, le Mali doit traquer et ramener morts ou vifs des individus comme Iyad pour les livrer à la justice internationale.

Cheick Tandina

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