Lors de sa rencontre avec les diplomates résidents au Mali, le tout nouveau ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, Soumeylou Boubèye Maïga, n’a pas manqué de dire ce qu’il pensait des méthodes utilisées par certains pays concernant la sécurité au Mali… Dans un langage très diplomatique.
C’était une réunion peu protocolaire. Pas de discours solennel, pas de document ou encore de termes de référence. Chacun pouvait donc prendre la parole, dire ce qu’il pensait de la situation sécuritaire au Mali, des mesures à prendre en ce qui concerne les éventuels enlèvements et comment échanger les informations pour qu’elles ne prennent pas des tournures inattendues…
C’est dans ce cadre que Mme Mbaranga Gasarabwe, Représentante Résidente du PNUD et Coordinatrice du Système des Nations Unies au Mali a expliqué à l’assistance qu’un travail en amont a été mené avec ses collègues pour que le personnel sur le terrain travaille dans les conditions optimales. Leur principale tâche étant de venir en aide aux plus démunis. De plus, elle a reconnu que «le personnel des Nations Unies ne doit pas décider de quitter le terrain au moment où les populations souffrent». Toutefois, a conclu Mme Gasarabwe, les informations diffusés par le système des Nations Unies tiennent compte des réalités du pays d’accueil.
Son homologue d’Allemagne, Karl Flittner, quant à lui, s’est plaint de «lire dans certains journaux que les pays européens se livrent à des intoxications pour ternir l’image du Mali». Et l’ambassadeur Flittner de faire part de certaines informations faisant état d’un retour massif de jeunes en provenance de Libye. «Il faut réfléchir sur la réinsertion sociale de ces jeunes. Nous sommes dans un domaine très sensible et chaque fait doit être précis».
Haro sur la presse privée? Boubèye n’est pas pour…
L’ambassadeur du Burkina Faso, Sanné Mohamed Topan, n’y est pas allé par quatre chemins pour déclarer «ce que la presse privée dit ne peut pas être maîtrisé. On ne peut canaliser les médias privés, qui ont leur liberté d’expression. S’ils critiquent souvent les informations que nous donnons à nos compatriotes qui veulent venir au Mali, il faut savoir que nous le faisons pour leur sécurité». Il reconnaîtra, tout de même, que même le quotidien national, L’Essor, a fait état des informations assez disproportionnées diffusées par certaines ambassades et représentations diplomatiques. «Ceci doit nous interpeller» a-t-il, en substance, souligné.
Après ces différentes interventions, c’est le ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération internationale, Soumeylou Boubèye Maïga, qui a fait sa mise au point. Tout d’abord, il a invité les uns et les autres à «sortir du discours de victimisation et d’incriminisation. Cette question doit être traitée dans un cadre de concertation. Même si nous sommes conscients que certains étrangers peuvent être enlevés, il faut que le Mali soit associé à la diffusion de certaines alertes».
Expert en matière de sécurité, le ministre Maïga a expliqué qu’au Nord du Mali, par exemple, plusieurs facteurs entrent en jeu. «Le Nord du Mali n’est pas une entité homogène. Il y a plusieurs niveaux de sécurité. Quitter le terrain, c’est alors le transformer en terreau d’insécurité. Il faut donc évaluer le niveau des menaces avant d’entreprendre des actions, quelle que soit leur nature. Nous voulons que tous les acteurs sur le terrain se concertent avant de diffuser quoi que ce soit. Et nous ne verrons peut être plus d’articles qui critiquent les méthodes de certains diplomates».
Paul Mben