Tandis que les organisateurs de la marche de protestation contre Israël disputaient orageusement les locaux du monument de la Palestine aux forces de l’ordre, une conversation à priori vide de sens entre deux garçons a détourné un instant mon attention. Cherchant à donner un sens à ce qu’ils avaient considéré comme un spectacle dramatique, les deux garçons, probablement des écoliers à leurs heures perdues, avaient donné libre cours à leur imagination. "Je te l’ai dit, c’est le Mali qui est en guerre contre un autre pays", a commenté l’un des deux garçons. "C’est vrai, c’est le drapeau malien qu’ils sont en train de brandir", s’était trompé l’autre au sujet du drapeau libanais. Ces gamins qui se trompaient évidemment sur toute la ligne avaient pourtant raison dans une certaine mesure. Le Mali en matière de diplomatie a fait un choix équivoque, même si son efficacité est loin d’être démentie pour l’heure. En effet
Bamako met un point d’honneur à vouloir éviter la moindre friction avec autrui. Et cette option le met occasionnellement dans l’embarras. Ainsi, les escarmouches entre Israël et ses voisins arabes a mis à l’épreuve la diplomatie malienne toujours partagée entre des camps qui jurent de ne jamais se pardonner. Comme à l’accoutumée, le peuple malien à travers ses leaders d’opinion a opposé une levée de boucliers contre l’Etat hébreu.
Déclarations médiatiques et marches pacifiques ont été les principaux instruments de la campagne de soutien aux populations du Liban et de la Palestine. Mais cette position tranche avec la gêne qu’elle provoque au sommet de l’Etat. Non pas qu’à ce niveau on se soucie peu du sort des martyrs du Proche Orient, mais la diplomatie, lorsqu’elle épouse la nature de la Politique malienne en la matière, doit avoir ses secrets lourds à porter.
En tout cas, le chef de la diplomatie malienne et dans une certaine
Mesure celui des Maliens de l’extérieur pêchent parfois. C’est pourquoi certaines trouvailles de nos diplomates se révèlent encombrantes. Fondamentalement, cela ne met pas en cause la diplomatie malienne. En effet, il arrive que les hôtes du Mali soient jaloux de l’hospitalité qui leur est due à Bamako. C’est la raison pour laquelle l’éphémère consulat libyen à Kidal était très mal perçu par Alger. Et certains commentaires laissent entendre que l’Algérie aurait oeuvré en amont pour que le dit consulat ne pût voir le jour. Les contradictions internationales sont une chose, les une autre. Le Mali ne peut pas alors se permettre de se payer le lux de couper le sourire à ses amis. Par contre il peut baliser de nouveaux chemins au risque un tantinet l’ordre ancien. La récente visite de Hugo Chavez, le Président du "lointain" Venezuela en témoigne. Faisant fi de la moue américaine, Chavez a défriché son champ coopératif africain au pays sur lequel il entend s’appuyer pour répandre son modèle économique. Il est vrai que la diplomatie malienne peut encore faire mieux pour son apparence. Et nonobstant ses défauts qui nous échappent, il y a une constance qui est à son honneur : la tentation de jouer à quitte ou double pour préserver les intérêts nationaux.
Soumaïla T. Diarra
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