Chancellerie malienne en Côte d’Ivoire : haute tension entre diplomates

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Pour une histoire de partage de fonds détournés lors de l’élection présidentielle, la chancellerie malienne en Côte d’Ivoire est au bord de l’implosion. Les fonctionnaires divisés en deux camps se livrent à “une guerre des tranchées”  sur fond de coups bas, calomnies et malversations financières. Enquête de notre correspondant à Abidjan.

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L’impunité peut être facteur de rupture et faire  la place à un climat délétère dans les relations humaines et même dans un service où les fonctionnaires les plus dociles peuvent se transformer en de véritables monstres, si l’on n’y prend garde. Notre Chancellerie de Cote d’Ivoire, secouée par une crise sans précédent de toute son histoire, n’échappe pas à la règle.

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En effet, la Chancellerie malienne d’Abidjan qui abrite en son sein les bureaux du Consulat Général et de ceux de l’Ambassade, contrairement à beaucoup d’autres, serait aujourd’hui le théâtre d’une pièce tragi-comique dans laquelle les plus forts dicteraient leurs lois aux plus faibles, avec la complicité tacite du ministère de tutelle et même de Koulouba.

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De quoi s’agit-il ? Tout serait  parti de la démission de l’ex- Chef de mission, le Colonel Sada Samaké de son poste d’Ambassadeur du Mali en Cote d’Ivoire. Le diplomate, dans sa  lettre de démission  adressée à son Ministre de tutelle, a fait de graves révélations sur le motif de cette ultime décision en désignant certains de ses proches collaborateurs qui ont tout fait pour le pousser vers la sortie.

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Nous étions dans les mois qui ont précédé les élections générales d’Avril  -Mai 2007 (Présidentielle 1er tour).

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Ceux qui ont ourdi ce complot contre le colonel et qui se croyaient à l’abri des regards avaient tout simplement à coeur d’écarter le principal ordonnateur du budget pour se servir royalement dans le budget des deux tours de la campagne présidentielle évalué ici à plus de 100 millions de francs CFA. Ils auraient réussi leur coup. Car,  six mois après les élections, les langues se délient et on parle de plusieurs millions de nos francs détournés par ces fossoyeurs de notre économie au détriment d’honnêtes citoyens qui ont abandonné leurs activités pour que les élections puissent être une réussite en Côte d’Ivoire.

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Ces superviseurs et assesseurs désabusés par la Chancellerie font toujours planer la menace de perturber les services s’ils ne percevaient pas leurs dus qui s’élèvent à plusieurs millions de FCFA.

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Malgré des contrôles diligentés par les différents services de contrôle d’Etat, personne n’est inquiété parmi ces seigneurs du vol. Ces diplomates seraient devenus si puissants de par leurs attaches à Bamako qu’ils règneraient  en maîtres absolus sur les affaires. Il n’en faut pas plus pour voir deux clans se former dans cet imbroglio. D’un côté, il y aurait le Chargé d’affaire, le Consul Général, le comptable et à un degré moindre le Vice- consul qui vient d’arriver. De l’autre, les autres diplomates (les conseillers de l’Ambassade et du consulat) qui auraient même du mal à se faire entendre des premiers cités.

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On ne s’adresseplus la parole

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Depuis bien longtemps, selon nos investigations sur place, les diplomates des deux camps se regardent en chiens de faïence et ne s’adressent presque plus la parole. Nos sources nous apprennent que les réunions de la chancellerie qui permettent aux uns et autres d’échanger seraient suspendues depuis belle lurette.

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Cette autre évolution de la situation serait consécutive aux agissements des « patrons » qui s’enfermeraient dans leur tour d’ivoire pour gérer les affaires, avant que le Ministère ne délivre tout le monde,  en nommant un nouvel Ambassadeur et un Consul Général à Abidjan. Car la mission du premier conseiller est arrivée à terme et le consul général rappelé depuis trois mois. Pourtant ils sont encore aux affaires et feraient la pluie et le beau temps au grand désespoir de ceux qui devraient les suppléer après leur départ.

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Que leur reproche t-on ?

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En plus de la gestion scabreuse des élections en Côte d’Ivoire, il est reproché au patron du Consulat d’avoir géré de façon peu orthodoxe les fonds qui seraient à sa disposition pour le renouvellement du parc auto du consulat. Fonds estimés, selon nos sources, à environ 80 millions qui lui auraient été remis à Bamako et déposés dans un compte autre que celui de son service. A ces accusations à l’encontre du Consul Général du Mali à Abidjan, s’ajoute le fait qu’il tenterait de faire de sa 4X4 de service un véhicule privé en apposant l’immatriculation CD (corps Diplomatique) au lieu de MD (Mission Diplomatique). Son objectif, selon plusieurs témoignages, serait de partir avec ce véhicule à Bamako. Ce qui provoquerait aujourd’hui un tollé général dans son propre service où des chauffeurs que nous avons approchés, auraient juré que la 4X4 montera sur leur corps pour aller à Bamako.

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Quant au chargé d’Affaires, qui est en principe le chef de service de la chancellerie, les frondeurs lui reprocheraient de faire de la rétention des 45 millions qui seraient décaissés par la tutelle pour rembourser les frais occasionnés par le départ et le retour des familles de diplomates à Bamako, courant 2005-2006, au moment de la crise et tout ce que cela avait occasionné comme frais. Les diplomates eux-mêmes auraient couvert ces dépenses avec la promesse d’être remboursé plus tard. Selon nos sources, le décaissement aurait été fait  par Bamako dans la mouvance des élections. Jusqu’à nos jours, personne parmi ceux qu’on a rencontrés n’aurait reçu un centime. Ceci ajouté à beaucoup d’autres faits que l’on reprocherait aux deux diplomates cités contribuerait à désaffecter une situation déjà délétère à l’Ambassade et au consulat à Abidjan où les travailleurs ont même peur de leur ombre, aujourd’hui. La moindre parole est tout de suite rapportée aux chefs, selon le camp dans lequel on se trouve.

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Voilà où l’impunité  peut nous mener. Il est temps que les pouvoirs publics réagissent. Car une explosion de la situation peut survenir à tout moment. Sur cinq diplomates rappelés par le Ministère en Côte d’Ivoire depuis le mois de Juillet 2007, aucun d’entre eux n’a encore regagné Bamako. Attendent-ils  de régler leurs comptes avec les « empêcheurs » de tourner en rond, avant de céder la place aux nouveaux venus ?

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D. Gildas

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Correspondant à   Abidjan

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