Plus que pour la visite aux soldats africains et maliens et pour remonter le moral de la population de Gao, le Premier ministre, Diango Cissoko est venu, le jeudi 11 avril 2013, avec un message clair: la présidentielle de juillet 2013 aura lieu, coûte que coûte.
Dans la salle chaude de la villa où le gouvernorat a pris ses quartiers, Diango Cissoko a été on ne peut plus clair: «concernant l’élection présidentielle de juillet 2013, nous sommes dans une phase irréversible. Toutes les structures sont engagées à cela depuis des semaines. Les législatives se feront un peu plus tard. Nous avons déjà un schéma à suivre. Il ne faut pas du tout douter de la tenue de la présidentielle au mois de juillet».
Dans un langage plus politique, le Premier ministre avait rendu hommage à toute la population de Gao pour «son courage pendant l’occupation. Gao est une ville symbole du Nord. Nous y attachons une importance particulière. La campagne agricole, j’en parle tout les jours avec le ministre de l’Agriculture, est préparée dans la région de Gao et sur toute l’étendue du territoire. Je voudrai ici rendre hommage aux femmes, aux jeunes et aux hommes de Gao, qui ont bravé les canons des djihadistes pour rester dans leur pays».
Auparavant, le Gouverneur, le Général Mamadou Adama Diallo, avait exposé les différents problèmes auxquels la région est confrontée. Ils vont de la destruction totale des infrastructures à la démolition des bâtiments publics, en passant par la rareté et la cherté des denrées de première nécessité et l’aide d’urgence aux populations de retour. Sur ce dernier point, le gouverneur a fait remarquer que «depuis le 23 mars 2013, date de la dernière livraison d’une aide de 430 tonnes en matériel divers, Gao n’a rien reçu». Or, selon lui, ce sont environ 600 ménages qui sont de retour dans la Cité des Askias.
Le Cadre de Concertation des notables de Gao et les jeunes, ont eux aussi présenté au Chef du gouvernement leurs préoccupations. Elles ont pour nom réinsertion, inquiétude par rapport au départ de France du terrain des opérations et, surtout, présence du MNLA dans la ville de Kidal. Diango Cissoko n’y est pas allé par quatre chemins: «la France n’a pas du tout dit qu’elle quittait le Mali. Elle a dit qu’elle resterait autant que nécessaire. Il faut comprendre qu’elle ne peut garder les mêmes effectifs qu’il y a un mois et demi. Nous lui avons demandé de rester tant que la situation n’est pas claire et je crois bien que la proposition a été acceptée».
Quant au sort du MNLA, Diango Cissoko a tenté de rassurer les uns et les autres: «nous allons traiter individuellement chacun pour ce qu’il a fait dans ce pays. Mais il faut se garder de suggérer des traitements globaux à toutes les exactions. Je comprends les soucis des uns et des autres par rapport au MNLA. Tout ce que je voudrais dire est que ceux qui ont commis des exactions seront punis. Nous ne seront laxistes avec aucun criminel. Ne faisons cependant pas ce que nous reprochons aux autres, c’est-à-dire nous livrer à des jugements sans fondements. Nous devons faire la part des choses dans la sérénité».
C’est dans cette logique que le Premier ministre a annoncé la nomination des 30 autres membres de la Commission Dialogue et Réconciliation. A le croire, «tout se passera sur le terrain. Le travail sera animé par des hommes et des femmes qui sont restés sur place pendant toute la crise». On apprendra plus tard que la Commission s’est donné deux ans pour accomplir la tâche qui lui est dévolue. Le PM d’ajouter «si le travail n’est pas accompli à la fin des deux ans, une autre échéance sera donnée à la Commission».
Trois mois après le début de l’opération Serval, le Premier ministre, Diango Cissoko, a donc voulu se rendre sur le terrain pour faire passer un message hautement politique. A-t-il a été compris par la poignée de responsables présents à la rencontre? Dans un peu plus de deux mois, nous en reparlerons.
Paul Mben, Envoyé spécial à Gao