Le dialogue social engagé, la semaine dernière, par le premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga, a du plomb dans l’aile. En effet, l’un des acteurs clés de la scène politique, Soumaïla Cissé, chef de file de l’opposition a décliné, le vendredi dernier, l’offre de dialogue du Premier ministre. La raison ? « Tout dialogue politique doit être focalisé sur la question de la légitimité des institutions… », indique-t-il.
En effet, le premier ministre a adressé une lettre au chef de file de l’opposition pour l’inviter à une rencontre. Dans cette correspondance, Soumeylou B Maïga écrit ceci : « Dans le cadre du dialogue politique. Je souhaite vous rencontrer le vendredi 9 novembre à 15 heures en vos bureaux pour échanger sur les activités du gouvernement en cours, les réformes politiques et institutionnelles envisagées, le processus électoral et le découpage administratif. Le gouvernement et moi-même espérons établir un dialogue fécond avec l’opposition politique dont le rôle est essentiel dans la bonne marche de la démocratie. Il vous plaira d’inviter à la rencontre tous les responsables de l’opposition politique dont vous juger la présence pertinente… »
En réponse, Soumaïla Cissé a décliné l’invitation. En effet, le chef de file de l’opposition, dans une lettre adressée au chef du gouvernement a écrit : « La situation de notre pays est caractérisée en ce mois de novembre 2018 par : la contestation des résultats de l’élection présidentielle tels que proclamés par la cour constitutionnelle et le refus de la fraude électorale comme mode d’accession ou de conservation du pouvoir ; la dégradation continue de la situation sécuritaire ; la montée sans précèdent du mécontentement social par la multiplication, depuis deux mois, des grèves et préavis de grèves dans de nombreux secteurs de la vie économique et sociale de notre pays ; les tensions de trésorerie qui sont aujourd’hui de notoriété publique ; l’ébullition politique provoquée par votre projet de ré découpage administratif ; les retards dans l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation qui ont suscité l’impatience et l’exaspération de la communauté internationale à travers la résolution 2423 du Conseil de Sécurité et la signature d’un « pacte pour la paix » ; la volteface de la cour constitutionnelle au sujet de la prorogation du mandat des députés, volte-face qui a entamé définitivement le crédit de cette institution telle qu’elle est composée ; C’est dire si la situation générale du pays se détériore de semaine en semaine. Seul un Etat dirigé par un président légitime et reconnu par tous les Maliens peut prendre en charge les questions brulantes auxquelles la Nation est confrontée et les gérer conformément à l’intéret général. L’ampleur de la fraude électorale, lors de la dernière présidentielle, a conduit des centaines de milers de Maliens à défendre la souveraineté nationale de notre peuple au cours de nombreuses manifestations à Bamako, dans les régions et dans la diaspora. Ce sursaut national malien est un des faits marquants de la période actuelle.
Il y ‘a un mois, prenant la mesure de la crise post –électorale au Mali, le président en exercice de la CEDEAO, SE Muhammadu Buhari a dépêché une mission à Bamako. l’émissaire de la CEDEAO a, lui aussi, souligné les graves insuffisances qui ont marqué la dernière élection présidentielle. Par ailleurs, les concertations régionales sur votre projet de redécoupage administratif sont une fuite en avant. Elles sont improvisées et sèment les germes de la division, des tensions et des conflits entre les communautés. Nous n’y participerons pas. Dans les circonstances particulièrement graves que traverse le Mali tout dialogue politique doit être, d’abord, focalisé sur la question de la légitimité des institutions, notamment de la première institution qu’est le Président de la République, et comme l’a souligné la mission de la CEDEAO « sur l’impératif de rétablir au préalable un climat de confiance réciproque pour faire face efficacement aux multiples et importants défis à venir ».
Par conséquent, mes amis et moi ne saurions donner une suite à votre demande de rencontre dont l’agenda nous parait pour le moins étriqué. » affirme M Cissé.
Au-delà, dans le camp de l’opposition et du Front pour la sauvegarde de la démocratie (une Coalition autour de Soumaïla Cissé, beaucoup de militants ont apprécié cette réponse de leur leader. Ainsi, dans la confusion politique née de la de la présidentielle contestée de juillet, le chef de file de l’opposition a flairé et même évité un grotesque piège rendu à la classe politique et aux organisations de la société civile par le pouvoir IBK et orchestré par le Premier ministre. Incapable d’apporter la moindre solution à la crise sécuritaire avec son lot de victimes, le régime IBK est voué aux gémonies depuis la calamiteuse mascarade électorale qui a permis à IBK et son clan de rester à la tête du pays. Ce qui a provoqué et continue d’entretenir la plus grave crise post-électorale jamais connue au Mali. Pendant ce temps les syndicats donnent de la voix et décrètent des grèves afin de contraindre le gouvernement à respecter ses engagements vis à vis des travailleurs maliens. Dans ce contexte de revendications, le trésor public asséché à cause des dépenses (souvent de prestige), est désespérément vide .Crise sécuritaire, crise politique, grogne sociale. Il faut alors desserrer vite l’étau à défaut d’y apporter des solutions idoines. D’où l’idée de Soumeylou de faire le tour des ” partenaires”. Mais la recette est connue. IBK aux lendemains de la première grande marche de l’opposition en 2016- 2017 avait paniqué. Il trouva alors l’idée astucieuse de rencontrer à Koulouba certains responsables politiques, des religieux et quelques organisations. Après ? Plus rien. Et si cette stratégie de diversion a marché ultérieurement, pourquoi ne pas remettre ça face aux mêmes acteurs ?
Mémé Sanogo