Du fait que tout semble aujourd’hui permis en démocratie, il n’est plus surprenant d’entendre toutes sortes de mots venant et des hommes politiques et des citoyens, car pour certains, lorsqu’on ne lance pas des injures à l’endroit de ses semblables, on ne fait pas un nom. Et Soumana Sacko de traiter les dirigeants du pays de brigands. Mais qui sont ces gens injurieux qui acceptent de suivre la personne qui les insulte ?
Le samedi 9 juillet, les trois jours des travaux de la conférence nationale de l’un des plus vieux partis du pays, l’US-RDA, ont été marqués par des écarts de langage et non des moindres de la part d’un homme d’Etat, un homme politique, bref un des futurs candidats à la présidentielle de l’année prochaine. En effet, au cours des travaux de ces assises de l’Union soudanaise RDA, Soumana Sako, puisqu’il s’agit de lui, a déclaré : « Le Mali est dirigé par des brigands ». Quant à savoir qui sont ces brigands, l’ancien Premier ministre du gouvernement de la Transition (CTSP du 26 mars 1991 au 8 juin 1992) s’en moque.
En soutenant de tels propos, « Zou » a certainement oublié qu’il a lui-même eu à prendre part à la gestion des affaires de l’Etat. Qualifier donc des gens avec qui on a eu à travailler en étroite collaboration pendant de longues périodes en les traitant de « brigands » n’est-il pas un écart de langage qui ne devait pas venir d’un homme comme Soumana Sako qui prétend briguer dans quelques mois la magistrature suprême du pays dont il a qualifié les dirigeants de « brigands » ? En tout cas, d’après un adage bien de chez nous, « tant qu’on n’a pas encore traversé l’autre côté du fleuve, on ne doit jamais se moquer de ceux qui sont en train de se noyer au beau milieu du dit fleuve ».
Après avoir pris part à la gestion du pouvoir, tout d’abord en tant que ministre sous le régime du Général Moussa Traoré et puis en tant que Premier ministre et Chef du Gouvernement de la Transition (CTSP) sous le Lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré, il est surprenant que ce soit ce même Soumana Sako qui qualifie ses collaborateurs (anciens comme nouveaux) de « brigands ». Par ce terme, « Sou » a également qualifié son ex-mentor et tous les autres qui l’entourent de « brigands ». Alors, si c’était lui, Soumana Sako, qui était traité de brigand, quelle allait être sa réaction ?…
« No comment » puisque nous sommes en démocratie, et les écarts de langage sont bien permis (pourvu qu’ils fassent les bonheurs de certains) Mais après cette phrase de Soumana Sako, la principale question que nombre de participants à ce forum de l’US-RDA se sont posés, c’est de savoir : « Pourquoi un tel comportement d’un homme qui ambitionne de briguer la magistrature suprême dans quelques mois ? ». Et d’autres, de se demander : qui est cet administrateur, cet homme politique, cet électeur, en un mot ce Malien qui accepterait de suivre quelqu’un qui le traite de brigand ? Cette question est bien difficile à répondre, pour le moment. Mais dans le Mali de nos jours, il est bon, de bien voire, d’être sage et aussi d’être surtout prévoyant. Surtout quand il s’agit d’un prétendant à la magistrature suprême, le contrôle du langage compte énormément, surtout lorsqu’il s’agit pour un homme politique d’intervenir sur une tribune publique.
Un homme politique qui ambitionne de devenir le Président de son pays doit plutôt prononcer des mots doux à l’endroit de ses concitoyens. Il doit savoir utiliser avec tact et finesse tous les mots qui sortent de sa bouche, car en réalité, si l’on veut être objectif avec les pensées des électeurs et des populations, il faut savoir employer les mots qui rassemblent et non ceux qui divisent. L’homme politique constitue une référence à part entière pour ses électeurs et pour les populations de son pays.
Mais avec un tel écart de langage, nul doute que « Zou » risque de perdre de précieux points : ce qui pourrait négativement peser sur ses chances d’obtenir des voix souhaitées lors de la future présidentielle. Et la suite pourrait aboutir (bien entendu pour lui, à la dérive totale) En plus, tout homme politique ou citoyen tout court qui nourrit des ambitions de devenir le Président de la République doit avoir un comportement correct à l’endroit de ses prochains, car lui aussi pourrait un jour être traité de… « Brigand ».
Par Zhao Ahmed A. Bamba