Des Concertations nationales pour quoi faire maintenant? “La Constitution prévoit déjà tous les organes de gestion d’une transition

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A propos des nouveaux organes de la transition (auxquels conduiront ces assises), si la nécessité d’imaginer des organes s’imposait avec acuité, il y a six mois, du fait de la confusion regrettable entre le régime de l’intérim et celui de la transition – gouvernance transitoire non prévue et réglementée par la Constitution de février 1992-, il semble, qu’à ce jour, les organes proposés par le président de la République par intérim ne seraient d’aucune utilité.

Aguibou Bouare

Nous portons notre analyse sur la dynamique du déroulement des événements du 22 mars 2012 à ce jour ; en répertoriant les différents points d’achoppement tout au long de la période de crise – du fait de la forte polarisation de la vie politique – ayant connu des dénouements heureux par la grâce de Dieu. Ces difficultés, au nombre desquelles figuraient la tenue d’une convention nationale, le choix du Président de la transition, le choix du Premier ministre de pleins pouvoirs, la constitution d’un gouvernement d’union nationale ne sont plus d’actualité.

S’agissant des objectifs généraux et spécifiques contenus dans les TDR, sur dix points, nous notons qu’une seule tâche demeure d’actualité, à savoir “les modalités d’organisation d’élections libres, transparentes et crédibles ” ; la reconquête des régions nord de notre pays est devenue un problème transnational dont la prise en charge se fait à la grande satisfaction de tous, grâce à l’appui ferme et la solidarité agissante de la communauté internationale.

Les concertations nationales apporteraient très peu sur ce volet sécuritaire, apanage des techniciens et autres spécialistes en la matière (les forces armées du Mali en rapport avec les forces de commandement international préconisées à cet effet) ; du reste un “concept harmonisé des opérations pour le déploiement de la force internationale conduite par l’Afrique” a été adopté.

A propos des nouveaux organes de la transition, si la nécessité d’imaginer des organes s’imposait avec acuité, il y a six mois, du fait de la confusion regrettable entre le régime de l’intérim et celui de la transition – gouvernance transitoire non prévue et réglementée par la Constitution de février 1992-, il semble, qu’à ce jour, les organes proposés par le président de la République par intérim ne seraient d’aucune utilité, sauf à en ajouter à la confusion et au cafouillage institutionnel dont notre pays se relève tant bien que mal, au prix de moult tergiversations.

En effet, les TDR proposent de compléter les organes de la Transition à travers : la définition d’organes complémentaires de la transition ; la définition des attributions de tous les organes de la transition et des relations fonctionnelles entre eux. Sur le premier point, au moment où il proposait la mise en place d’un “Haut Conseil d’Etat”, il est vrai que le Président était loin d’imaginer – une bonne partie de l’opinion publique nationale avec – qu’il serait adoubé par les forces vives de la nation, à commencer par le Capitaine Sanogo qui a fini par déclarer que “Dioncounda Traoré” est le président de tous les Maliens. Du coup, le deuxième point de cette rubrique devient sans objet, à partir du moment où le consensus semble être fait autour de la gouvernance intérimaire sous l’empire de la Constitution du 25 février 1992. Aussi, l’option de la gouvernance intérimaire suppose que seul l’article 36 de la Constitution ferait l’objet d’une modification, en ce sens que le délai, de 40 jours qu’il stipule, est prorogé à un 1 an; toutes les autres dispositions de l’acte fondamental demeureraient ainsi en vigueur.

Dans cette hypothèse, l’on ne pourrait valablement parler de gouvernance transitoire, surtout qu’il semble admis – par fiction juridique – que l’ex président de la République a démissionné ; mieux, l’objet exclusif de l’accord-cadre était la remise en selle de la Constitution de 1992 ; faut-il remettre en cause la fragile stabilité politique et institutionnelle obtenue au prix d’intenses efforts tous azimuts ? Dans l’intérêt supérieur du Mali, nous pensons que non!

Il est vrai que l’accord-cadre, en prévoyant l’ouverture de la transition à l’échéance du délai d’intérim, et en prorogeant par acte subséquent ce même délai – au moyen d’une résolution de la CEDEAO – a contribué au cafouillage institutionnel, par ce mélange de genre inédit.

Tout de même, il est bon de relever que l’évolution réconfortante de la situation sociopolitique a tendu, par la force des choses, à la consécration d’un régime intérimaire que d’aucuns continuent de qualifier, de façon impropre, de transition ; le fondement juridique, des violations constitutionnelles constatées ça et là (délai d’intérim de 40 jours à 1 an, Premier ministre avec pleins pouvoirs etc.), pourrait être les traités et autres accords internationaux s’imposant, à notre pays, avec un caractère supranational.

En clair, un Haut Conseil d’Etat reviendrait à remettre en cause fortement l’autorité déjà précaire du président de la République par intérim, et ouvrir, par voie de conséquence, une nouvelle période d’incertitude, au moment où les Maliens et la Communauté internationale commencent à faire leur deuil du triumvirat très préjudiciable (pouvoir à trois têtes), avec les signes encourageants de reprise de l’aide et de la coopération internationale. Pas plus que le Haut Conseil d’Etat, une Commission Nationale de Médiation serait de très peu d’efficacité face aux irrédentistes – qui ont toujours sollicité et préféré, de loin, l’arbitrage de pays étrangers – ; d’où leur défiance récurrente vis-à-vis des organes nationaux de médiation.

Quant au Conseil National de Transition, il pourrait valablement remplacer l’ancienne Assemblée nationale – n’eût été les impératifs de la realpolitik exigeant de maintenir cette dernière, sans mandat du peuple souverain, jusqu’à la fin de la transition -, mais sa cohabitation avec le parlement serait source de lourdeur inutile dont une période transitoire, par essence brève, s’accommoderait difficilement.

Concernant les résultats attendus, les TDR indiquent une feuille de route pour la période de la transition et la définition des organes de la transition. A la lumière du déroulement des évènements – à la vitesse grand V- de mars 2012 à ce jour, nous estimons que seul le premier point de cette rubrique est d’actualité ; en adoptant le régime de la gouvernance intérimaire, il n’y a pas lieu de réinventer la roue en imaginant le remède pire que le mal, la Constitution prévoit déjà tous les organes nécessaires à la gestion d’une transition.

Par rapport à la dernière rubrique des TDR relative à l’organisation, nous suggérons de privilégier la qualité des participants à la quantité arithmétique de représentation par regroupement ; pour ne pas reproduire l’exemple de députés votant des lois dont ils ignorent tout.

En définitive, nous suggérons que les TDR soient recadrés exclusivement sur la feuille de route de la gouvernance intérimaire (durée de l’intérim dit transition déjà fixée à un an, reconquête des régions du nord, affaire de spécialistes et l’organisation des élections concomitamment avec la reconquête des régions septentrionales de notre pays). Le Conseil National de Transition pourrait être mis en place sous la dénomination de Conseil National de Reconstruction du Mali ; il serait une force nationale de propositions concrètes dans le cadre de la lutte contre les grands maux qui minent notre pays.

Il faut reconnaître qu’au-delà des débats juridiques théoriques, le réalisme, le pragmatisme, la realpolitik commandent d’inscrire chaque chose en son temps !… La baraka a fait que notre pays a bénéficié de l’attention unanime et de la solidarité de la communauté internationale dans la résolution de la crise gravissime qu’il connaît, arrêtons donc de nous faire harakiri par la remise en cause des acquis fondamentaux ! Arrêtons de tourner en rond et de tourner le peuple malien en bourrique ! Nous n’avons besoin ni de Haut Conseil d’Etat, ni de Commission Nationale aux Négociations !  Vivent les concertations nationales avec une feuille de route axée exclusivement sur le retour de l’intégrité territoriale de notre pays parallèlement à l’organisation d’élections libres, crédibles et transparentes…

Aguibou BOUARE

 Conseiller juridique

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2 COMMENTAIRES

  1. LES MALIENS DOIVENT DÉPASSER LEURS ÉGOS ET PRENDRE DE LA HAUTEUR POUR SE CONCERTER, DÉFINIR LE FUTUR SOUHAITÉ, NÉGOCIER ET S’ENTENDRE LIBREMENT SUR CE QU’ILS VEULENT DEVENIR

    Bonjour,
    Merci pour les nombreux internautes et Maliens qui échangent sur le devenir du Mali. Certains pensent que le fédéralisme sera imposé aux Maliens par des organisations et des pays étrangers.

    La bonne gouvernance passe par l’unité du commandement mais aussi par la fixation de règles claires entre commandements pouvant être hétérogènes, à condition que les parties prenantes s’y conforment.

    Ce dernier cas est semblable à celui qui est nécessaire pour l’élan harmonisé entre les différents contingents qui composeront la force de la CEDEAO/UA/ONU qui sera utilisée pour la restauration de l’intégrité territoriale du Mali.

    Donc, une parfaite harmonisation entre les différentes parties prenantes est nécessaire pour atteindre, sans surprise, un objectif.

    C’est le cas de la négociation qui exige qu’on sache qu’est ce qu’on doit négocier, avec qui et pourquoi en ayant défini au préalable des principes, conditions et des règles à respecter, d’où la proposition que j’ai faites d’un guide et d’une plateforme de concertations nationales, de négociation pour une sortie durable de la crise.

    Les propositions que font les Maliens ont pour but de retrouver leur souveraineté en s’entendant sur une solution consensuelle pour une sortie durable de la crise. Si les miennes coïncident avec celles de beaucoup de Maliens (politiciens ou membres de la société civile), tant mieux, c’est cela qu’on cherche.

    Mais s’étonner, comme certains le sont, qu’il y ait identité de vues avec des pays ou des organismes étrangers est surprenant.

    Chacun a sa façon de voir, ce qui n’empêche pas des points de vue identiques.

    Au contraire, nous devons apprécier le fait que plusieurs pays s’accordent, aujourd’hui, sur l’intérêt de la négociation pour éviter les méfaits et les effets collatéraux d’une guerre.

    Contrairement à ce que disent certains, je ne pense pas que tout soit déjà ficelé par l’ONU ou par certains pays.

    C’EST AUX MALIENS DE DÉFINIR LE FUTUR QU’ILS SOUHAITENT ET DE TRAVAILLER ENSEMBLE EN FIXANT DES PRINCIPES ET DES CONDITIONS A RESPECTER POUR Y PARVENIR.

    Le MNLA et Ansar Dine seront soumis à des principes (non impunité, respect des droits de l’homme, refus du terrorisme, coexistence pacifique) et des conditions (dépôt des armes, indivisibilité du Mali et laïcité) fixés par les Maliens d’un commun accord et non par des étrangers, comme certains le pensent.

    La condition d’indivisibilité est contraire au concept de fédéralisme. De ce fait, si ailleurs certains veulent imposer ce dernier, c’est aux Maliens de s’y opposer.

    C’est aux Maliens de s’entendre pour bâtir un Mali nouveau répondant à leurs souhaits et aux conditions et principes qu’ils définiront.

    C’est pourquoi, les Maliens doivent s’entendre sur un guide et une plate-forme de concertations nationales et de négociation pour une sortie durable de la crise.

    D’où l’intérêt de ma proposition en ligne sous forme de lettre ouverte au Président du Mali, au gouvernement, à la commission nationale d’organisation des concertations nationales et à tous les Maliens, mais aussi au médiateur.

    Souhaitons que tous les Maliens dépassent leurs différences pour s’accorder sur ce qu’ils veulent devenir sans qu’on le leur impose d’ailleurs.

    Bien cordialement
    Dr ANASSER AG RHISSA
    EXPERT TIC ET GOUVERNANCE
    E-mail : Webanassane@yahoo.com

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