DEMOCRATIE : Pouvoir du peuple- Par le peuple- Pour le peuple. (A. Lincol) : La démocratie est-elle le pouvoir du peuple ? Que faut-il y penser ?

1

Si la démocratie est le pouvoir du peuple, nous nous demandons le pouvoir de quel peuple. La controverse autour de ce concept est toujours là et le débat est inépuisable. En démocratie la conquête du pouvoir se fait par les élections donc par le vote du peuple. Mais nous savons que ce n’est pas tout le peuple qui vote. Le droit de vote n’appartient qu’aux citoyens ; il faut alors parler de citoyenneté. Qui est citoyen et qui ne l’est pas ? Qui est électeur sans être éligible ?

 

 

La controverse est toujours là ! Elle ne date pas d’aujourd’hui. Nous ne présentons pas ici un panorama complet de l’idée d’antériorité de la lutte pour la démocratie. Dans ce rapport d’antériorité prenons comme point de départ le 18ème siècle français. Et pour l’étayer nous proposons cet extrait du rapport du Comité préparatif constitutionnel(CPC) en date du 29 septembre 1789 (lors de la Révolution française) : « Le comité chargé de préparer la constitution propose de donner le droit de voter à ceux qui paieraient un impôt direct égal à trois journées de travail : ils seront les « citoyens actifs », les autres, dits « citoyens passifs », ne voteraient pas. Seraient éligibles ceux qui verseraient un impôt de dix journées de travail, et exclus du droit de voter les Juifs, les valets, les banqueroutiers et les débiteurs insolvables.

 

 

Robespierre –c’est là une de ses premières interventions- s’insurge violemment contre ce projet et demande la création du suffrage universel, tandis que l’abbé Grégoire s’indigne que l’argent devienne la base de la puissance politique. Néanmoins, l’Assemblée vote le projet du comité. De plus, il est précisé que pour être élu à l’Assemblée nationale, il faudra posséder une quelconque propriété foncière et payer  cinquante journées de travail ou une demi-livre. Ce système censitaire déchaîne un concert de protestations. Camille Desmoulins s’exclame : « Pour faire sentir toute l’absurdité de ce décret, il suffit de dire que Jean Jacques Rousseau, Corneille et Gabriel de Mably(le philosophe) n’auraient pas été éligibles. »

 

 

Marat est encore menaçant : « Pères de la patrie,… tremblez qu’en nous refusant le droit de citoyen en raison de notre pauvreté, nous ne le recouvrions en vous enlevant le superflu. »

 

 

« Pour expliquer l’attitude de l’Assemblée, il faut préciser que celle-ci, dont la majorité est assez bourgeoise et formée de gens cultivés, répugnent à donner le droit de vote à des illettrés et craignent que cette masse ne soit embrigadée par les réactionnaires. »

 

 

Finalement, en son temps, à cette époque, le débat entre Girondins et Jacobins était tranché à l’échafaud. Dès lors on peut comprendre les péripéties de la création du suffrage universel. Mais qu’est-ce que le suffrage universel ?

 

 

Selon Lexique des termes juridiques : « Celui qui est reconnu à tous les citoyens, sous les seules conditions d’usage concernant l’attachement à la chose publique (âge, nationalité, capacité, mentale..).»

 

 

Selon le Dictionnaire du droit constitutionnel : « Organisation électorale dans laquelle voter est un droit reconnu à l’universalité. C’est ce qu’impliquait l’article 6 de la déclaration de 1789 : « La loi est l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation(…) ». Mais ce droit du citoyen est d’abord un droit de l’homme, ainsi que l’exposait Lamartine en 1848 : « La démocratie a dit à tout Français en âge de raison, en condition d’intelligence et de moralité appréciables : tu participeras au droit, à l’exercice du droit social, non parce que tu possède mais parce que tu es. Je ne te demande aucun cens matériel ; je te fais citoyen et électeur parce que Dieu t’a fait homme. Ton signe de souveraineté, c’est ton âme, ce n’est pas ton champ, ton mur ou ton centime ; et ce signe, il est inaliénable comme ton nom d’homme égal à moi » (in : Le passé, le présent, l’avenir de la République, Paris 1850). Lamartine donne ici raison aux montagnards de 1789.

 

 

Michel de Villiers ; 5ème édition Armand COLIN

Dans cet exposé ci-dessous Victor Hugo nous donne toute l’importance du suffrage universel « Le merveilleux côté du suffrage universel, le côté efficace, le côté politique, le côté profond, ce ne fut pas de lever le bizarre interdit électoral qui pesait, sans qu’on pût deviner pourquoi, mais c’était la sagesse des grands hommes d’état de ce temps – ci ; ce ne fut pas, dis-je, de lever le bizarre interdit électoral qui pesait sur une partie de ce qu’on nommait la classe moyenne, et même de ce qu’on nommait la classe élevée ; ce ne fut pas de restituer son droit à l’homme qui était avocat, médecin, lettré, administrateur, officier, professeur, prêtre, magistrat ; et qui n’était pas électeur ; à l’homme qui était juré, et qui n’était pas électeur ; à l’homme qui était membre de l’institut, et qui n’était pas électeur ; à l’homme qui était pair de France, et qui n’était pas électeur : non, le côté merveilleux, je le répète, le côté profond, efficace, politique, du suffrage universel, ce fut d’aller chercher dans les régions douloureuses de la société, dans les bas-fonds, comme vous dites, l’être courbé sous le poids des négations sociales, l’être froissé qui, jusqu’alors, n’avait eu d’autre espoir que la révolte, et de lui apporter l’espérance sous une autre forme, et de lui dire : Vote ! Ne te bats plus. Ce fut de rendre sa part de souveraineté à celui qui jusque-là n’avait eu que sa part de souffrance ! Ce fut d’aborder dans ses ténèbres matérielles et morales l’infortuné qui, dans les extrémités de sa détresse, n’avait d’autre arme, d’autre défense, d’autre ressource que la violence, et de lui retirer la violence, et de lui remettre dans les mains, à la place de la violence, le droit !

 

 

Oui, la grande sagesse de cette révolution de Février qui, prenant pour base de la politique l’évangile, instituer le suffrage universel, sa grande sagesse, et en même temps sa grande justice, ce ne fut pas seulement de confondre et de dignifier dans l’exercice du même pouvoir souverain le bourgeois et le prolétaire ; ce fut d’aller chercher dans l’accablement, dans le délaissement, dans l’abandon, dans cet abaissement qui conseille si mal, l’homme de désespoir, et de lui dire : Espère ! L’homme de colère, et de lui dire : Raisonne ! Le mendiant, comme on l’appelle, le vagabond, comme on l’appelle, le pauvre, l’indigent, le déshérité, le malheureux, le misérable, comme on l’appelle, et de le sacrer citoyen !

 

 

Voyez, messieurs, comme ce qui est profondément juste est toujours en même temps profondément politique : le suffrage universel, en donnant un bulletin à ceux qui souffrent, leur ôte le fusil. En leur donnant la puissance, il leur donne le calme. Tout ce qui grandit l’homme l’apaise.

 

 

Le suffrage universel dit à tous, et je ne connais pas de plus admirable formule de la paix publique : Soyez tranquilles, vous êtes souverains. »  Lire Victor HUGO ; le suffrage universel, 21 Mai 1850.

 

 

La méconnaissance d’une part de la signification profonde du suffrage universel d’autre part de la loi n°00-047 du 13 juillet 2000 portant statut des partis politiques de l’opposition en République du Mali amena le leader de l’opposition, l’honorable Soumaïla CISSE à se porter avocat du diable lors de la rentrée parlementaire le 23/09/2013 face aux députés RPM de Kidal.

 

 

Fermons cette parenthèse par ces propos de l’autre : « Nelson MANDELA, devant lui, nous sommes tout petits. Il nous a donné une leçon d’humilité. Il nous a dit qu’il était important de savoir pardonner pour faire route ensemble. Quand Dieu vous a faits frères ou fils d’une terre, il faut trouver les chemins de l’entente… ».

 

 

Somita KEITA

Dravéla Rue 364 Porte 150

 E – mail : somikeit2@yahoo.fr

Lire aussi sur  www.lechallenger.com / en partenariat avec Maliweb.net

 

Commentaires via Facebook :

Comments are closed.