Au cours du point de presse que le président de la Codem a animé, dimanche dernier, à l’hôtel Teriya de San, il a été question du rôle joué par le président ATT, dans le cadre de la consolidation de la démocratie dans notre pays. Housseini Amion Guindo a notamment déclaré ‘’qu’ATT est une chance pour le Mali, parce qu’il a permis à chacun de faire prospérer son parti politique. ‘’
Cette déclaration renvoie effectivement à la situation politique créée par l’élection en 2002, à la présidence, du général Amadou Toumani Touré. L’on se rappelle que lors d’un entretien, après sa victoire électorale, le président ATT avait justifié son choix, en partie, par le fait que des personnalités lui avaient parlé du risque de majorité écrasante de l’Adéma-Pasj, pour ne pas dire de sa dictature politique. En s’alliant à la mouvance présidentielle, le colonel Youssouf Traoré, président de l’Ufdp, avait déclaré, lors d’une commémoration du 26 mars 1991 à la Pyramide du souvenir qu’il avait fait partie de l’opposition pendant 10 ans et qu’il n’en avait obtenu que des désagréments. De ce fait, il ne comptait plus faire partie de l’opposition, du moins, pendant le pouvoir ATT. D’autres hommes politiques avaient annoncé la mort de l’opposition malienne si l’Adéma-Pasj revenait au pouvoir en 2002. La crainte était donc sincère et ATT en avait justement parlé. Le contexte politique de l’époque était notamment caractérisé par une Ruche superpuissante et bourdonnante à cause des egos démesurés de certains de ses cadres. C’est pourquoi le candidat Amadou Toumani Touré qui avait compris la concurrence, avait annoncé qu’il ne serait pas candidat sans l’appui des partis politiques. Si l’Adéma-Pasj ne l’avait pas officiellement soutenu puisqu’il avait son propre candidat, en la personne de Soumaïla Cissé, il n’en demeure pas moins que les évènements ont contribué à déstabiliser les Abeilles, créant, du coup, trois candidatures issues des militants du Parti pour la solidarité et la justice. Il s’agit de Soumaïla Cissé, Mandé Sidibé et El Madani Diallo. De ce fait, des sources concordantes avaient rapporté qu’en 2002, plusieurs militants de l’Adéma-Pasj avaient voté pour ATT. C’est dire que l’élection du général ATT avait répondu à des soucis beaucoup plus sociologiques et aux craintes de la grande majorité des hommes politiques de se sentir exclue du partage du gâteau national. C’est dans ce cadre qu’il est compréhensible que le président de la Codem puisse dire que le président ATT a permis à chacun de faire prospérer son parti politique. En fait, c’était aussi l’ambiance de la profusion des Indépendants qui en ont déduit qu’ils pouvaient, désormais, occuper la sphère politique. Les groupes parlementaires indépendants avaient un nombre de membres non négligeable, à tel point que des députés tels qu’Oulématou Tamboura avaient réclamé l’aide publique, au titre des Indépendants. En somme, ce n’était pas seulement les Indépendants qui se positionnaient, mais, aussi, des intergroupes parlementaires tels qu’Espoir 2002 qui avait concurrencé la Ruche, en terme de majorité parlementaire. La démocratie avait donc pris des allures de défiance de la super majorité de l’Adéma-Pasj. Les partis politiques ne voulaient pas disparaître au profit de la grande Ruche. Même les Abeilles se sont laissés prendre à ce jeu politique national qui n’était pas censé leur apporter que des avantages, puisque tous leurs militants n’étaient pas du même avis pour le soutien à l’élection présidentielle de la candidature du président ATT en 2007. Dioncounda Traoré, se rappelant sûrement l’annonce des résultats des élections législatives par la Cour constitutionnelle en 2002, au cours de laquelle plusieurs de leurs listes avaient été annulées, avait clairement justifié leur décision par la crainte de l’administration, la sécurité d’Etat, la justice, etc. C’est à ce titre que la majorité de l’opinion politique s’était faite autour de la candidature d’ATT. Au détriment, bien sûr, de la puissance de l’Adéma-Pasj. Il fallait instaurer un certain équilibre des forces politiques et permettre à chacun de faire prospérer son parti politique. Malgré tout, les Abeilles ont repris du poil de la bête avec plusieurs adhésions et fusions susceptibles de renforcer leurs majorités au sein des institutions de la République. La tenue de leurs instances à l’intérieur du pays a prouvé qu’elles savaient se régénérer rapidement. Par contre, les Indépendants, combattus par des alliances de partis politiques, notamment aux dernières communales, ont commencé à perdre leur crédit politique. Situation qui pouvait redonner à l’Adéma-Pasj son ancienne puissance. Est-ce la raison pour laquelle le Pdes est créé, pour le rééquilibrage des forces politiques, avant les prochaines échéances électorales ? En tout cas, la démocratie multipartite souffrirait d’une trop grande hégémonie d’un seul parti politique et les forces sociales sont toujours prêtes à faire le contrepoids. Ne serait-ce qu’en commençant par l’abstention électorale.
Baba Dembélé