Démocratie malienne : L’alternance piégée ?

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L’alternance politique est-elle piégée au Mali ? Beaucoup le pense. Le fameux consensus sous ATT est craint de tous. Mais les mauvaises habitudes ont la vie dure. Conquérir le pouvoir pour satisfaire les besoins de la population ne semble pas être la préoccupation des partis politiques maliens, mais plutôt le chemin le plus rapide vers l’ascension sociale et le moyen d’acquérir des privilèges et de s’enrichir.

 

Koulouba, le palais présidentiel malien. AFP
Koulouba, le palais présidentiel malien.
AFP

Depuis la proclamation des résultats de l’élection  présidentielle de 2013, c’est la ruée vers l’or. Nos politiques font le pied de grue devant la résidence du futur locataire de Koulouba.
A l’image de l’ADEMA, les partis politiques maliens sont en lambeaux. L’opportunisme  politique est passé par là. La résidence du « fama » de Sebenikoro, est devenue le lieu de pèlerinage prisé de nos leaders politiques. Et cela bien avant la proclamation des résultats définitifs de la cour constitutionnelle. Nos élites politiques sont, apparemment, plus préoccupées par la conservation de leurs privilèges que par autres choses. Après les crises que le Mali a traversées, l’on pensait que rien ne serait plus comme avant. Que nenni! C’était vraiment mal connaitre nos politiques. Une fois de plus, la politique du « ventre plein » risque d’avoir raison sur une alternance crédible au Mali. Tout le monde veut participer au banquet final. C’est ce qui expliquerait le ballet incessant des politiques devant le domicile d’IBK et le siège du RPM.

Au Mali, la politique ne serait que l’affaire d’individualités qui, au gré de leurs querelles et retrouvailles, sur le lit de leurs intérêts personnels, sacrifieraient volontiers l’alternance politique tant souhaité par le peuple malien. La classe politique malienne semble avoir une phobie d’être dans l’opposition. En effet, l’opportunisme politique et la quête des  avantages ont toujours hypothéqué l’émergence d’une opposition digne de nom chez nous. Cette image de nos hommes politiques est perçue et analysée par la population comme une attitude négative qu’elle condamne avec vigueur.

L’on se souvient encore de la ruée des candidats, entre les deux tours de la présidentielle, vers le candidat qui était à même de remporter les élections. Et pourtant avec l’arrivée, récemment, des jeunes leaders politiques avec des idées neuves dans le paysage politique malien, l’on avait cru à une cure de jouvence du champ politique malien. Mais hélas, cette lueur d’espoir n’a été que de courte durée. Ces derniers, non plus, n’ont pas pu résister au chant de la sirène. La majorité de ces jeunes candidats, qui incarnaient une alternance politique crédible, ont déchanté. Sentant la bonne affaire, ils se sont tous, à quelques exceptions près, ralliés au candidat qui était arrivé en tête du premier tour.

A cet effet, sept d’entre eux (Moussa Mara, Racine Thiam, Sibiri Coumaré, Siaka Diarra, Alhousseyni Abba Maiga et Ousmane Ben Fana Traoré) ont créé une coalition pour apporter leurs soutiens indéfectibles, entre les deux tours, au futur locataire de Koulouba. Beaucoup croyaient que ces jeunes leaders politiques, avec des idées neuves,  allaient avoir le courage de constituer une opposition forte afin de raffermir notre démocratie. Cet espoir de les voir conquérir l’arène politique par leurs propres armes semble voler en mille éclats avec ce ralliement au tout nouveau pouvoir. À ce rythme, on se dirige irrémédiablement vers  la fameuse démocratie à la malienne sous ATT. Un système qui a pourtant montré ses limites.

Essoufflée, cette démocratie consensuelle est tombée en panne avec le résultat que l’on connait. Et, si l’on ne prend garde, les mêmes erreurs risquent de causer les mêmes blocages qui ramènent la machine en arrière. C’est au président nouvellement élu de ne pas tomber dans le piège de l’opportunisme politique. Parce qu’il faut que la démocratie malienne arrive à s’affranchir des pièges qui se dressent sur le chemin d’une véritable alternance politique. L’occasion ultime nous est offerte avec ces élections d’avoir une  alternance crédible, et, les chimères des tartufes opportunistes ne devraient point l’hypothéquer.

Madiassa Kaba Diakité

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14 COMMENTAIRES

  1. La politique est un gagne paix tres rentable au MALI.Il fallait s’attendre a ces ralliements massifs.Ce que nous voyons n’est pas une democratie consensuelle,mais plutot clienteliste.Dans un pays ou l’activite principale est centree sur l’agriculture de subsistence et sur le commerce des produits industriels et vivriers importes,la politique devient un métier au lieu d’etre une vocation.Souhaitons une chose;la defence et la preservation de l’integrite territoriale par le Nouveau President.Cette exigence ne doit etre l’objet d’aucun marchandage meme si les 3.5 milliards d’Euros ne sont pas debloques.Nous restons perplexes a cause des alliances pre-electorales faites par le Vainqueur avec Dicko et Sanogo pour arracher la victoire.Le seul scenario qui portera son fruit consistera pour le nouveau President de faire appel a Soumana Sacko comme PREMIER MINISTRE.Lui seul peut enclencher le changement non seulement sur le plan politique mais aussi economique.Il a sauve ATT il peut sauver IBK!

  2. “””Après les crises que le Mali a traversées, l’on pensait que rien ne serait plus comme avant. Que nenni! C’était vraiment mal connaitre nos politiques.”””” NON, NON ET NON! IL FAUT SE DIRE QUE CE N’EST PAS LE CONSENSUS D’ATT QUI EST A LA BASE DE LA CRISE “DE LA DEMOCRATIE’ MALIENNE.Tant qu’on aurait pas compris ca, on repeterait toujours le memes erreurs. LE CONSENSUS EN SON TEMPS ETAIT UNE IDEE GENIALE QUAND IL A ETE INTRODUIT DANS LA POLITIQUE MALIENNE. il faut que les maliens, au lieu d’en avoir honte ou le rejeter, en fassent siens, y mettent le label malien comme contribution a une valeur universelle qu’est la democratie.

    • Le changement, ce n’est pas de changer les idees et concepts que nous avons cree, mais c’est le changement de l’etre malien, l’individu malien, sa manioere de vivre, sa maniere d’absorber tout ce qui est “importe”. Comme je l’ai toujours dit, apres 1991, il nous fallait faire une revolution culturelle., qui apparemment n’arriverait jamais. Il y peu d’homme cultive au Mali. Intellectuel ne veut pas dire cultive. On peut etre un astro-physicien comme cmd et ne pas etre cultive.

  3. Mr le journaliste, ne vous faites pas de mauvais sang: les opportunistes déchanteront pour la simple raison qu’IBK ne pourra simplement pas tous les satisfaire. Alors, beaucoup rejoindront l’opposition ou cesseront simplement de rêver…
    Mais IBK n’est-il pas le premier opportuniste? Un fils de féticheur, probablement lui-même féticheur qui se pose en néo-djihadiste, un ancien démocrate qui se mue en néo-putschiste, un acteur majeur de tous les accords de paix antérieurs qui renie toute responsabilité dans l’affaire (Ministre, Premier Ministre, Président de l’Assemblée Nationale, Député). Malgré tout cela, les maliens ont élu une certaine autorité qu’il semble incarner. Alors que si la MINUSMA part aujourd’hui, IBK sera sûrement dévoré par Sanogo et famille et les djihadistes. Mais les masques commencent à tomber déjà: sa femme a déjà abandonné le voile de la campagne présidentielle. Lui-même ne répond plus au téléphone…

    • tu dis vrai dans l”ensemble de tes critiques.Mais rappel-toi que IBK a coalisé en fourberie avec les puschistes les jihadistes et les marabouts afin d’être élu président du mali. c’est irréfutable qu’il y a le peuple maliens mais pas la nation malienne,ce peuple malien aime fables de griots plutôt que la réalité.pendant que les fous de Dieu coupé les pieds et les mains des maliens dans le nord du mali, partout à Bamako comme ailleurs le reste de maliens sont à afrikable et ortm dansé le summu. Un peuple est la somme de lui-même.sinon comment ce peuple malien assise tranquillement regardé les puschistes ( sanogo et sa bande d’assassins promu généraux)? LE Mali payera ses erreurs jusqu’à a ce qu’il intègre le monde réel. un pays sans une vraie armée mais,chanté mille et une fois par ses griots étant comme la plus vaillante de l’Afrique…Je suis sidéré par…

  4. Merci M. Kaba pour cet article riche et édifiant tout en espérant qu’il soit tombé sous les yeux du Nouveau président de la république . désormais, je serais l’un de vos lecteurs.

  5. Eh oui, les législatives doivent se tenir avant de faire ttes ces supputations! Car si le peuple ne donne pas une majorité parlementaire à IBK, il sera obligé de collaborer avec l’opposition et le PM sera issu de ses rangs.

  6. Monsieur le journaliste nous sommes revenus sur terre depuis l’entre 2 tours avec l’alignement des 0,..% et d’un des espoirs de la jeunesse Pouloh. Tous veulent quelque chose et tous auront quelques choses car IBK n’a rien prevu comme alternatif. Sonc experience c’est dans les 20 de democratie du Mali donc depuis le 1er tour nous avons tous refuse le changement en votant pour deux candidats “deja-vus”.
    Pauvre Mali, il a encore 10 ans devant lui pardon 20ans avec l’arrivee prochaine du Capitaine Generalise Sanogo: N’est ce pas le deal qui a plasse IBK en tete de l’etat?

  7. Petite analyse politique:

    Il faut vite aller aux élections législatives. Les dates arrêtées sont bonnes pour la principale raison qu’il faut doter aussitôt le pays d’une assemblée légitime permettant au nouveau président de gouverner démocratiquement. Sinon le président serait obligé de gouverner par ordonnances faute de majorité collée aux suffrages exprimés.

    Ainsi, IBK n’a nullement intérêt à repousser ces dates car la dynamique actuelle lui permet en toute probabilité d’avoir une majorité absolue ou relative à l’assemblée, conditions préalables pour appliquer son programme et avant d’aborder les dossiers qui fâchent.

    De plus, le fait que les dates soient fixées dores et déjà par les autorités de la transition garantit la neutralité du processus engagé. Et les contraintes temporelles seront respectées par le nouveau pouvoir.

  8. Vous oubliez que att n’avait pas de parti quand il fut elu landslide….
    au mali parti ne veut rien dire. le seul parti qui vaille c’est le ventre…. ibk etait battu par mara a peine sorti de ses langes…

    ibk aussi n’avait pratiquement pas de parti a son election…

    Je suis desole mais bien que malien force est de reconnaitre, on est foncierement opportuniste dans ce pays. on suit la direction du vent et les exemples sont nombreux…. Moi je crois que c’est notre societe et notre faible niveau d’education dans son sens large qui explique cela… chacun se croit issu de la cuisse de Jupiter; pas d’humilite…

    Mande Mansa….???? Epoux Maiga…. petit fils Le Mouton…

    Tout le monde doit y mettre du sien kanfila Keita seulement n’y peut rien… Dieu Sauve la Mali des narco, mnla, copam, mp22, fdr ,sabati.. de kidal, de Nioro, koutiala et de Kangaba…Bourem… Amine…

    • Dis moi quel peuple tu as et je te dirai quel destin l’attend.
      Le malien est foncierement mechant, opportuniste et rancunier et cela donne ce que nous vivons depuis les independences.
      Ils nous faut un lavage de cerveau et d’esprit pour s’en sortir et ce ne sera pas FACILE malheureusement.
      Triste et pauvre Mali.

    • lol. Les maux du Mali que vous venez de citer ne representent qu’un minime partie, et la dernière tranche revient au FDR.

  9. Merci M.Kaba pour cette analyse de la situation.C’est à IBK de juger qui est opportuniste et qui ne l’est pas avant de le “coopter”.Cependant, ce raliement de voix du 2ieme tour existe dans toutes les démocraties (même en France)sans que cela soit forcement nuisible pour l’alternance.Espérons qu’avec le restant des partis politiques, nous aurions une opposition forte et constructive, pour animer le débat politique.D’ailleurs qui est majorité, qui est opposition cela se saura seulement après les législatives.

    • D’accord que ces ralliements politiques existent même en France, mais là-bas au moins il y a une lisibilité, car cela se fait en fonction des courants idéologiques : Droite/Gauche/Cente/Écologie, et non par calcul et opportunisme politique. Mais, comme chez nous les partis n’appartiennent à aucun courant idéologique car les dirigeants n’ont aucune conviction alors bonjours la prostitution politique. C’est pourquoi, aujourd’hui, il faut aller vers une rééducation et une refondation de la classe politique condition sine quanon pour une démocratie vivace. Que Dieu bénisse le Mali.

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