L’Organisation Administrative du Mali nouvellement indépendant a été fortement marqué par la centralisation, mais aussi par une volonté constante de rapprochement de l’autorité des populations pour un développement de proximité.
Le Mali a connu un découpage territorial qui s’étend sur trois périodes.
Période 1960-1977 : La loi n°60-3/AL-RS du 7 Juin 1960 a consacré la rupture avec le découpage administratif de la période coloniale. Cette reforme a abouti à la création des arrondissements, des cercles et des régions en lieu et place des cantons et des subdivisions. Le Mali sera divisé en six régions : Kayes, Bamako, Sikasso, Ségou, Mopti et Gao. Il y’aura 42 cercles et 279 arrondissements.
Période 1977-1991 : L’Ordonnance n°77-44/CMLN du 12 juillet 1977, après avoir fixé la composition du territoire national en régions, cercles, arrondissements, communes, villages, fractions nomades et le district de Bamako, a pris en compte deux autres aspects de l’organisation administrative à savoir la déconcentration et la décentralisation selon l’ordonnance n°77-45/CMLN du 12 juillet 1977. Avec cette ordonnance, le nombre de régions passe de six à sept avec la naissance de la région de Tombouctou. Il y’aura 42 cercles, le nombre des arrondissements passera de 279 à 281 et les communes de 13 à 19.
L’année 1991 : correspond à la période de transition conséquence de la révolution du 26 Mars 1991. A cause surtout de la rébellion le Comité de Transition pour le Salut du Peuple (CTSP) crée conformément à l’ordonnance n° 91-039/P-CTSP du 8 Août 1991 la région de Kidal, portant ainsi le nombre de régions à huit. Le nombre de cercles passe de 42 à 49 et le nombre d’arrondissements de 281 à 285.
Ces découpages successifs ont été conçus dans un souci d’encadrement politique, administratif et fiscal des populations.
Les critères pris en compte à l’époque étaient les besoins d’administration efficace des populations, l’assiette fiscale, le nombre d’habitants et la distance.
L’objectif principal visé était d’assurer le développement et la démocratisation du pays à la base en associant les populations à la gestion de leurs propres affaires, les comités locaux de développement et les conseils régionaux et locaux.
Il a permis avec plus ou moins d’efficacité le contrôle de la population et l’impulsion économique.
Période 1991-1999 : Les deux mandats d’Alpha Oumar KONARE ont permis de corriger les insuffisances constatées dans les découpages antérieurs ; par la création de 703 communes au Mali. Cette initiative avait pour but de permettre à la commune d’être gérée de façon démocratique avec l’élection des élus locaux et le transfert des ressources aux collectivités locales ce qui confère à chaque citoyen dans sa localité une part de responsabilité et de liberté dans la gestion des affaires publiques .
Les prestations dont les communes bénéficient sous forme de collecte d’impôts et taxes devaient leurs fournir des ressources conséquentes pour supporter les différentes charges. Mais le niveau de recouvrement a toujours été faible. Conséquence, les communes n’ont jamais pu faire face aux dépenses qui leurs incombent.
Certes des progrès ont été accomplis mais la décentralisation n’est pas parvenue à transformer les mauvais payeurs d’hier en bon contribuable d’aujourd’hui.
Période 2002-2012 : Le Président ATT a constaté la nécessité de corriger les insuffisances du découpage administratif de 1991, dont il était l’initiateur et celui de 1999 dont Alpha Oumar était l’artisan à savoir principalement la difficulté pour les représentants de l’Etat d’assurer correctement la tutelle sur des vastes étendues avec un nombre élevé de collectivités. l’accroissement et la complexité des questions économiques, politiques et sociales dans les circonscriptions administratives imposaient une nouvelle reforme.
En Janvier 2012, le Président ATT a initié une loi dans ce sens. Elle a été votée par l’Assemblée Nationale permettant la création de douze nouvelles Régions à savoir : Taoudenni, Ménaka, Nioro, Kita, Dioila, Nara Bougouni, Koutiala, San, Douentza, Bandiagara et Gourma-Rharouss. La création de cette dernière région a été faite suivant un amendement du projet de loi du 7 Décembre 2011.
Les critères qui ont prévalu au nouveau découpage sont relatifs au maintien et à la dynamisation des solidarités sociales, l’homogénéité économique de chaque territoire en entité administrative déconcentrée, la logique géographique et spatiale (nécessité de tenir compte des distances et de la continuité géographique pour procéder à un découpage administratif) la prise en compte du découpage administratif déjà existant. Dès le vote de la loi, la mise en place de ces nouvelles régions, le processus devrait être progressif sur une période de 3 à 5 ans, c’est-à-dire de 2012 à 2016, pour tenir compte des contraintes financières, logistiques et de la rareté relative des ressources humaines.
Pour une question d’accompagnement de la mise en œuvre de l’Accord d’Alger 2015, dans lequel, il est dit qu’il faudra mettre en place les autorités administratives des régions de Ménaka et Taoudéni le plus tôt possible, toute chose qui a poussé le gouvernement, a nommé en conseil des Ministres les gouverneurs de ces deux régions avec ce principe qui veut que : « les peuples qui se révoltent soient amadoués, choyés et récompensés, tel est le cas des peuples du Nord alors que les peuples dociles soient maltraités et dépossédés, tel est le cas des peuples du Sud »
L’Etat doit être juste envers toutes ses composantes. La mise en œuvre de l’Accord ne doit pas se faire au détriment du Sud.
Alpha Oumar KONARE, le père de la décentralisation malienne et ATT, le visionnaire de l’avenir de la décentralisation malienne de 1999 à 2012 ont fait un grand bon en avant en matière de décentralisation. Ce grand bon en avant a été fait sans toucher à la constitution qui faisait le bonheur et l’honneur des maliens du Sud comme ceux du Nord.
Ces deux présidents ont été assez responsables et très soucieux de la bonne administration du territoire pour un futur immédiat.
Par contre cette vision et ce courage ont manqué au régime actuel, qui au nom d’un accord dit d’Alger 2015 pour la paix et la réconciliation nationale, a détruit non seulement la laïcité, l’égalité des citoyens, la même justice pour tous, mais a créé deux peuples, deux armées, deux territoires, en foulant au pied la constitution du 25 février 1992.
Toute chose qui a obligé le peuple malien à modifier la constitution pour les beaux yeux des rebelles Touaregs.
Le régime actuel, n’a même pas été capable tout simplement de matérialiser ne serait-ce que pour un début le processus en poursuivant le processus de nomination des Gouverneurs des huit autres nouvelles régions créées par la même loi qui a consacré l’existence des régions de Ménaka avec 15 000 habitants et celle de Taoudéni avec 8 000 habitants.
Qui l’aurait cru en écoutant les slogans de campagne en 2013 ?
Mais comme le disait le Président Feu Ahmed Sekou TOURE, « l’homme est un connu inconnu ».
La défense des Intérêts des peuples qui ont mis leur confiance en ses dirigeants, doit être une mission sacerdotale permanente, même au prix de sa vie.
Les Gouvernements successifs de Modibo I, II, et III ont échoué dans ce domaine clé du développement. Cependant, il faut espérer que l’actuel attelage fasse un pas important dans ce sens avant le mois de juin 2016.
C’est pourquoi nous soutenons le plaidoyer fait la semaine dernière par les Honorables Députés dont Zoumana N’Ji DOUMBIA et les Autorités Communales des Cercles de Bougouni, Kolondièba, Yanfolila. Son but était de pousser le gouvernement à ‘’accélérer et achever le processus de la régionalisation par la nomination rapide des Gouverneurs des dix autres nouvelles régions (Douentza, San, Koutiala, Niono, Nara, Kita, Bandiagara, Dioïla, Gourma-Rharouss et Bougouni). Les jeunes des trois cercles ont mobilisé les élus locaux, les chefs de villages, les ressortissants, les associations de femmes et plusieurs cadres de la zone.
Le plaidoyer des Députés et les populations de ces nouvelles régions pour la nomination des Gouverneurs est d’autant plus nécessaire parce qu’il permettra d’uniformiser les décisions sur l’ensemble du territoire national , s’ils veulent rempiler pour un second mandat.
Le gouvernement Modibo III, s’il veut un état de droit qui tienne compte de toutes les sensibilités doit s’atteler à cela rapidement pour ne pas tricher avec les populations du Sud du Mali.
Badou S. KOBA
Source : Le Carrefour