Décadence spirituelle et crise multidimensionnelle au Mali : Les conséquences logiques d’une faillite collective ?

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La grave crise sociopolitique et sécuritaire qui met à mal notre nation depuis plus d’un an n’est pas encore définitivement jugulée. Cependant, les origines, les causes profondes et la violence de cette crise incitent déjà à une analyse objective des tenants et aboutissants. Des voix et non des moindres, s’élèvent de plus en plus pour appeler le peuple à un retour à… Dieu, à qui nous avons tourné le dos à un moment donné, d’une manière ou d’autre. De là à y voir la manifestation de la colère de Dieu, il n’y a qu’un pas que d’aucuns ont vite franchi.

 

Quelque part, on peut raisonnablement attribuer la présente “descente en enfer” du Mali à la mal gouvernance, à la perte de certaines de nos valeurs sociétales, notamment le respect du bien public, de l’aîné, d’autrui, l’humilité, la modestie, le sens de la mesure, entre autres.

Sur un tout autre plan, l’analyse nous permet d’établir un lien entre ce qui nous est arrivé ces dernières décennies et les relations individuelles et collectives que notre peuple s’était engagé à entretenir avec Dieu, le Créateur des cieux, de la terre, des océans, du paradis et de l’enfer. Oui ! Une saine analyse spirituelle de la crise permet de comprendre véritablement que la faillite spirituelle de l’homme malien y est pour beaucoup.

A ce sujet, faut-il rappeler combien de fois les familles fondatrices de Bamako, les différentes confessions religieuses du pays, notamment l’Amupi d’abord, le Haut conseil islamique ensuite et le clergé malien, ont à maintes reprises attirer l’attention des “décideurs de la République” sur les dérives multiples et profondes qui conduiront inéluctablement le pays au gouffre si des mesures salvatrices ne sont pas prises sans délai.

Toutes les cérémonies et autres manifestations réunissant le sommet de l’Etat et les Forces vives de la Nation étaient régulièrement mises à profit pour sonner l’alerte. En vain. La situation est allée de mal en pis au fil des ans et des régimes successifs au pouvoir jusqu’à ce que le clash se produise enfin à partir de janvier 2012.

Un an après, jour pour jour, il a fallu le retour triomphal de l’armée française sur le sol malien pour soulager tout un peuple d’une affreuse humiliation en réponse à l’appel à la rescousse lancé par le premier citoyen du pays, 52 ans après en avoir été “chassé” un 20 janvier 1961, date à laquelle le dernier soldat de la France colonisatrice avait été invité à quitter le territoire national sur instruction du premier citoyen malien de l’époque. Revanche de l’Histoire ? Que non ! Les époques ont changé, les hommes et l’environnement international également.

En effet, il ne peut y avoir de comparaison possible entre le Mali de 1961 et celui de 2013. Il en est de même pour le citoyen malien de 1960 et celui d’aujourd’hui. Si l’on peut se permettre une schématisation, c’est à peu près comme le ciel et la terre, car, ce pour lequel le Malien des années 1960 était capable de se donner la mort constitue pour celui de notre époque une source de fierté, un motif d’extravagance vaniteuse. Non, il ne peut y avoir de comparaison possible ni entre les deux époques et encore moins entre les hommes et femmes de ces deux temps.

La solution ? Il ne s’agit ni plus ni moins que de revenir à nos valeurs morales et spirituelles. A ce sujet voilà ce que disent deux éminentes personnalités du Mali d’aujourd’hui et qui ont, chacun en ce qui le concerne, joué un rôle déterminant dans la crise actuelle, l’imam Mahmoud Dicko du HCI et Ousmane Chérif Madani Haïdara, chef spirituel de l’Association Ançardine et président du Groupement des leaders spirituels du Mali (GLSM).

En effet, à l’occasion d’une sortie récente, l’imam Mahmoud Dicko rappelait qu’il fallait “d’abord et avant tout que les Maliens se réconcilient avec Dieu”. Car, selon lui, “la principale réconciliation avec laquelle nous devons commencer, c’est celle que nous devons d’avec Dieu. Ce peuple a besoin de se réconcilier avec Dieu”.

Le peuple du Nord, qui a connu l’islam depuis le 1er siècle de l’Hégire auquel aujourd’hui, on vient rappeler qu’il doit pratiquer l’islam. Ce n’est pas un hasard, il y a eu beaucoup de signes annonciateurs, mais ce n’est pas tout le monde qui sait lire les signes de Dieu. Nous avons essayé de rappeler nos frères, depuis des années, ça nous a valu beaucoup de qualificatifs et souvent des incompréhensions entre nous et certains de nos frères.

Surtout à Tombouctou, je me rappelle, j’avais envoyé une cassette, il y a, à peu près 5 à 6 ans, avant les événements, pour leur dire de faire beaucoup attention. Car ils sont sur une terre bénie ; les Saints qui sont couchés là-bas, méritent notre respect. De ces respects-là, c’est d’abord notre pratique et notre dévouement pour la cause de Dieu”.

Son coreligionnaire Chérif Madani Haïdara invite plutôt à une meilleure gouvernance de la part des pouvoirs publics. C’est pourquoi, il assène ses vérités en ces termes : “On ne peut plus laisser la gestion de ce pays continuer  de cette manière. Car chaque jour, la misère s’amplifie, la chute continue pour notre pays à cause de la mauvaise gouvernance. Si on se considère comme des patriotes et qu’on a notre mot à dire sur les élections, il est temps pour nous, aujourd’hui, de voter pour qu’un qui peut bâtir ce pays. On ne peut plus continuer à laisser n’importe qui diriger ce pays. Nous ne l’avons pas encore fait, mais nous allons faire obligatoirement un choix pour la prochaine présidentielle. Au moment opportun, nous aviserons au profit de celui des candidats dont le profil répond au mieux à nos attentes qui sont celles du peuple dans sa grande majorité”.

Comme on le voit, après l’échec cuisant des dirigeants et de la classe politique dans son ensemble, “les hommes de Dieu” ont décidé d’essayer à leur tour “leurs remèdes” en vue de soulager définitivement notre société des maux qui la minent et la rongent depuis des décennies. Cependant, cette immixtion du religieux dans la politique et dans la gestion des affaires publiques de l’Etat, ne rassure pas tout le monde.

Eu égard à ce qui se passe sous d’autres cieux, les risques de dérapage sont évidents et élevés. Le prochain président de la République, qui qu’il soit, est de toute façon averti. Il a intérêt à bien faire. Sinon, il aura en face une coalition de forces dont nulle n’ignore la capacité de mobilisation au sein d’une population déçue, meurtrie et angoissée devant un avenir incertain et assombri par les maux qu’elles dénoncent.

En tout état de cause, il sied à présent que l’on s’en remette à Dieu, car, c’est Lui qui sait ce qui est bon ou mauvais pour nous. Qu’Il continue donc d’assister ce pays comme Il vient de le magnifier à travers l’extraordinaire mobilisation de la communauté internationale dans cette épreuve difficile et qu’il en soit ainsi pour toujours !

Bréhima Sidibé

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3 COMMENTAIRES

  1. Article vide de bon sens. Le plus grand danger pour le Mali c’est d’accepter que le religieux se mêle de la politique. D’où va la laïcité? Que veut dire “appeler le peuple à un retour à… Dieu”. Est-ce le Dieu du musulman ou du chrétien ou du judaïsme ou du féticheur? Voilà qu’on veut nous drainer dangereusement encore vers l’obscurantisme. Qui a déclenché la guerre du Mali? C’est pas des gens se disant religieux? Entre temps que n’ont-ils pas fait les musulmans de Bamako pour influer sur l’exercice du pouvoir (rejet du code de la famille, insulte des gouvernants et j’en passe). Ceux qui nous ont agressé ne sont pas plus tournés vers Dieu que nous les maliens. Ceux qui sont venus nous libérer ne le sont pas non plus. Quand un Etat est géré sans vision sécuritaire on abouti à de tel Knock-out (K.O). L’Irak, l’Egypte, l’Afghanistan, le Pakistan, l’Indonésie etc sont -ils sortis de l’ornière du Malheur? Le spirituel tue la capacité de réflexion. Le Mali musulman n’en a pas besoin.

    • Sankingba, pour tous les adeptes et croyants des religions dites monothéistes, il n’y a qu’un Dieu et un seul. C’est peut-être dans les croyances et pratiques religieuses qu’il peut avoir une certaine différence.

  2. Dieu aime ce pays, non pas pour ce qu’il est devenu aujourd’hui mais pour ce qu’il a été hier. Sinon la rupture est consommée depuis longtemps entre nous et LUI.

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