Débat de la radio Klédu sur la transition au Mali : «C’est l’incompétence du gouvernement Cheick Modibo qui nous impose le diktat de la CEDEAO»

La gestion de la transition continue de faire couler beaucoup d’encre et de salive. La deuxième partie du débat du jeudi soir 26 juillet dernier de la radio Klédu sur comment réussir cette transition a mis le doigt dans la plaie de la gouvernance au Mali. A l’issue de ce débat de deux heures d’horloge, il apparait que c’est l’incompétence du gouvernement Cheick Modibo Diarra qui nous impose le diktat de la CEDEAO et que ce sont des partis politiques qui sont responsables de la situation de crise que vit aujourd’hui le Mali.

Pour cette deuxième partie du débat de la radio Klédu sur la transition au Mali, notre confrère Mahamadou Kané, l’animateur de l’émission, avait devant lui des intellectuels de haut niveau dont Pr Abdoulaye Niang, Pr Hamidou Magassa, Pr Issa N’Diaye, Pr Cheibane Coulibaly et Me Mohamed Ali Bathily. D’entrée de jeu, ils ont tous reconnu que “le Mali est  tombé bas dans les abîmes“. A la question de savoir comment en est-on arrivé là ? Les avis ne sont pas également très divergents. Pour l’excellent avocat Mohamed Ali Bathily, “notre démocratie a assez cultivé deux sortes de corruption qui sont à la base de l’état piteux dans lequel se trouve le Mali. Il s’agit de la corruption arrogante sous le président Alpha Oumar Konaré et celle décadente sous ATT“. De l’avis du Pr Hamidou Magassa “nous sommes tous responsables de cet état de fait, soit par notre complicité, soit par notre passivité“. Pour le Pr Issa N’Diaye, “il y a eu une faillite généralisée des institutions de la République d’où le coup d’Etat du 22 mars 2012”

Pourquoi une transition  tendue ?

Aujourd’hui, les acteurs du jeu politique ne parlent pas le même langage à propos de la gestion de la transition au Mali. Trois mois après sa formation, le gouvernement Cheick Modibo Diarra est vivement contesté au motif qu’il n’est pas consensuel et qu’il peine à trouver une solution à la grave crise identitaire qui secoue le Mali. Pour le Pr Issa N’Diaye “l’actuel gouvernement a mis la charrue avant les beaufs. Au lieu de reconstruire l’Etat (effondrer à la suite du coup d’Etat du 22 mars 2012, ndlr) il s’est précipité dans des nominations (sans de larges consultation s souvent partisanes, ndlr)“.

De son côté, le Pr Hamidou Magassa dira que “nous avons un gouvernement sans orientation politique face à la crise“. Ce dernier a soutenu en substance que “le Premier ministre Cheick Modibo doit engager un véritable dialogue avec toutes les compétences nationales au lieu d’aller se pavaner à l’extérieur“. Quant à Me Mohamed Ali Bathily, il a déclaré que “le gouvernement Cheick Modibo a échoué depuis sa composition, (par le choix des hommes et des femmes  du régime fasciste du dictateur Moussa Traoré, ndlr)“. Et l’avocat d’ajouter que “la gestion de routine de l’Etat que pratique l’actuel gouvernement  tranche avec les objectifs de l’heure que sont la reconquête de l’intégrité territoriale du pays et l’organisation des élections crédibles”.

Pour tout dire, Me Mohamed Ali a soutenu que “le gouvernement Cheick Modibo manque de capacité de proposition d’où l’intervention de la CEDEAO qui n’a pas intérêt à ce que la crise malienne s’enlise. C’est l’incompétence du gouvernement actuel qui fait que la CEDEAO nous impose son diktat. De grâce que le gouvernement nous permette de l’aider “. Pour l’avocat émérite “les Maliens ne doivent pas continuer à aller chercher ailleurs ce qu’ils peuvent trouver ici. Nous avons des compétences au même titre, sinon plus que ceux qui veulent nous dicter la voie à suivre“.

La classe politique sur le banc des accusés

En plus du gouvernement Cheik Modibo Diarra, la classe politique a également pris son coup lors de cette deuxième partie du débat de la radio Klédu sur la transition au Mali. Pour le Pr Issa N’Diaye : “la classe politique est une catastrophe pour le Mali. Elle est à la base du bourbier dans lequel se trouve aujourd’hui le Mali“. Il a déploré le fait que “la politique soit devenue une affaire de sous”, avant de pointer du doigt l’ancien président   ATT (un indépendant élu deux fois président de la République, ndlr) comme étant le symbole de la faillite de la classe politique.

Pour Me Mohamed Ali Bathily : “la classe politique malienne a montré ses limites. Les hommes politiques ont mis le pays en lambeau. Ils fabriquent des décisions pour leurs intérêts personnels  sordides“. Il a aussi vivement critiqué la prolongation du mandat des députés par eux-mêmes. Pour l’avocat, “l’assemblée nationale est responsable de ce qui est arrivé au peuple malien par son manque de courage politique à jouer son rôle de contrôle de l’exécutif et son manque d’initiative pour prévenir“.

Quelle solution pour la transition ?

A cette question, Pr Issa N’Diaye a indiqué qu’ “un gouvernement d’union nationale n’est pas la solution pour une transition apaisée tant qu’il n’est pas l’émanation du peuple“. Le philosophe voit “une nouvelle espérance avec la nouvelle génération” Même son de cloche pour Pr Abdoulaye Niang qui préconise également “un véritable dialogue pour l’émergence d’une nouvelle génération de leaders hormis ceux qui sont là depuis vingt à trente ans“.

                                              Alassane DIARRA

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