Le débat autour du fichier devant servir d’outil pour les élections générales de 2012 fait rage au sein de la classe politique. Si certains ont affiché leur position pour le fichier biométrique à base du Ravec, d’autres pour des raisons de calendrier ont opté pour la position des plus hautes autorités de la République, à savoir le Race.
Le Parti africain pour la solidarité et la justice (Adéma/PASJ) lors de la réunion du Comité exécutif le mardi 10 mai 2011 a clairement affiché sa position pour l’actuel fichier électoral, issu du Recensement administratif à caractère électoral (Race) en vue des élections générales de 2012. Il venait de rejoindre la position de l’UFDP (Union des forces démocratiques pour le progrès) de Youssouf Traoré, laquelle a rendu public un communiqué dans ce sens. Ces deux partis ne sont pas les seuls à partager cette position au sein de la classe politique. Une position qui rejoint celle des plus hautes autorités de la République en l’occurrence le chef de l’Etat, Amadou Toumani Touré et le général Kafougouna Koné, ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités locales. Pour les tenants de cette position, le fichier biométrique sur la base du Ravec (Recensement administratif à vocation d’Etat civil) n’est pas conçu pour les élections, sa mission première est l’état civil. Ils arguent aussi que le recensement du Ravec a été fait dans une atmosphère ambiante que les agents recenseurs ne maîtrisaient pas les outils. Aussi et surtout, ils avancent qu’il y a le fait que les gens ont été recensés dans la transhumance et au moment où on commence la période de pérennisation, les paysans sont dans les champs. Sans oublier que jusque-là les Maliens de la Côte d’Ivoire n’ont pas été encore recensés. La somme prévue pour réaliser toutes ces opérations s’élève à 10 milliards de F CFA alors qu’il n’est pas évident qu’on aille aux élections de 2012 si l’on doit suivre le chronogramme de la DGE (Délégation générale aux élections).
A l’opposé de ceux-ci, il y a des partis comme le MPR (Mouvement patriotique pour le renouveau) de Choguel Kokalla Maïga, le Parena de Tiébilé Dramé et l’URD de Younoussi Touré, qui estiment que les élections de 2012 pour être libres, transparentes, doivent être organisées à base d’un fichier biométrique, c’est-à-dire issu du Ravec (Recensement administratif à vocation d’état civil). Le MPR a révélé sa position lors d’une conférence de presse tenue à son siège à Quinzambougou. Ce jour-là, le président du MPR indiquait que le Ravec est un nouveau système qui procède à une identification des électeurs basée sur des technologies biométriques permettant de produire à la fois une nouvelle carte nationale d’identité et une nouvelle carte d’électeur numérisée avec photo incrustée. "C’est ce qui explique l’engouement et l’enthousiasme avec lesquels les Maliens ont unanimement accueilli l’initiative du gouvernement de réaliser le Ravec (Recensement administratif à vocation d’État civil)”, avait-il souligné. S’agissant du président du Parena, il lançait lors d’un atelier au Centre international de conférence de Bamako (CICB) un appel au gouvernement pour se consacrer à l’organisation des élections. Tout comme Choguel, le chef des béliers blancs indiquait que les choses étaient encore possibles à condition qu’on accepte de payer le prix en mettant les moyens matériels et financiers à la disposition de la DGE (Délégation générale aux élections) avant fin juin 2011. Le Parena tirait cette conclusion d’une communication qu’un membre de la DGE avait livrée lors dudit atelier.
Que reproche-t-on à l’actuel fichier ?
Pour les tenants du Ravec, l’actuel fichier électoral est issu d’un recensement, truffé d’irrégularités. Ils avancent que des politiciens de tout acabit, animés d’intentions politiciennes, ont eu à manipuler des agents recenseurs pour faire inscrire des noms fictifs sur le fichier. « Ces agents recenseurs qui ont préféré l’argent à la probité, se sont, toute honte bue, prêtés à ces manœuvres frauduleuses. La plupart des commanditaires de ces actes crapuleux ont des fiches jaunes issues du même recensement avec lesquelles ils parviennent à faire voter au compte de ces noms fictifs, naturellement moyennant des espèces sonnantes et trébuchantes pour leurs complices. Ces pratiques ont été monnaie courante lors des présidentielles et législatives de 2002 et de 2007 et des communales de 2004 et de 2009. Ce qui fait que le fichier électoral malien est cousus de noms fictifs difficiles à répertorier », nous a expliqué un militant du MPR.
Mais là ne semble pas être le seul problème, car les « anti-Race » indiquent que le fichier électoral actuel comporte aussi beaucoup de doublons. Des personnes sont doublement recensées. Elles ont été recensées dans leur famille d’origine (généralement au village) et celle où elles résident actuellement. A cela, il faudra ajouter les cas des décès non signalés. « Certes, chaque année il y a une révision de la liste électorale qui se fait dans toutes les communes du pays, mais une telle opération peut-elle avoir l’expertise de déceler un cas de décès non signalé ? Les commissions, à cet effet, sont chargées d’actualiser le fichier en inscrivant ces potentiels électeurs, c’est-à-dire ayant l’âge de 18 ans et en rayant les cas de décès, mais lorsqu’un décès n’est pas signalé comment peut-elle le savoir ? », s’interroge-t-on.
Abdoulaye Diakité