La situation qui prévaut aujourd’hui au Centre Hospitalier Universitaire du Point G est sans appel : l’hosto se trouve en rupture de stocks sans précédent de sérums, conséquence d’une gestion très controversée. A titre illustratif : Les frais de réparation du véhicule du Directeur Adjoint ont été pris en charge pour un montant de 12,74 millions de F CFA. Et ceci n’est que la partie visible de l’iceberg. Ce sont les patients qui payent la note.
Notre confrère « les Echos », en dénonçant dans sa livraison du mardi une rupture de stocks de sérum à l’Hôpital du Point G, ne croyait pas si bien dire. C’est la résultante d’un trou de caisse de 282 millions de francs CFA… Au point de provoquer un manque criard de sérums glucosé et salé.
A l’origine de cette rupture de stocks au Centre Universitaire Hospitalier du Point G, en effet se trouvent la mauvaise gestion, la surfacturation à la pelle, le détournement de fonds par les responsables. Auxquels s’ajoutent des dépenses injustifiées et le changement des règles de comptabilisation, d’année en année.
A en croire nos sources, les gestionnaires de l’hôpital ont poussé la complicité jusqu’à se beurrer sur les caisses de l’Etat. Le gouffre financier ainsi creusé au niveau de ce centre hospitalier dépasse l’entendement. D’où un début de paralysie de la structure.
Du coup, le service des dialyses fait face à une rupture de stocks de sérums. Au point que les malades, eux-mêmes délient les cordons de la bourse pour être pris en charge.
En clair, l’Hôpital du Point G dans son histoire n’a jamais connu une telle hémorragie financière. Pendant 3 ans, les caisses ont coulé. Résultat : les détournements n’ont pas été comptabilisés en dizaines de millions. Mais en centaines de millions de nos francs.
Les dialysés pour soit, le personnel soignant pour le diable
L’Hôpital du Point G n’a pas seulement perdu de sa superbe. Il a été vidé de son âme, vendu au diable. Et pour cause : jamais, les gaffes au sein de l’hosto n’ont atteint un tel degré.
Jugé, pourtant, comme le seul centre stratégique par les autorités sanitaires de notre pays dans le traitement de la maladie des reins et la purification du sang, la néphrologie du Point G n’a pas échappé à l’appétit vorace des responsables de l’administration de l’Hôpital.
Par petite touche, indiquent nos sources (sur la base d’un document dont nous avons copie), ils ont « sucé » les caisses, érigé le népotisme en mode de gestion. L’espoir tant suscité auprès des dialysés, a viré au cauchemar. Un flop magistral.
Réputé comme l’unique centre hospitalier le mieux doté en dialyseur au Mali, l’Hôpital du Point G a vite fait de taire ses ambitions. Raison invoquée par nos sources : l’utilisation des fonds et des recettes de la structure à d’autres fins. Estimées à 282 millions de francs CFA, celles-ci auraient fondues comme du beurre au soleil. Ce n’est pas tout.
Même, le non-reversement des recettes de pharmacie, signalent nos sources, pour un montant de 67,853 millions de francs CFA et la falsification des souches de reçus ne sont pas de nature à tempérer les curiosités.
Autres gaffes relevées dans la gestion des responsables du Point G : le dépassement d’un montant de 7,937 millions dans l’exécution du marché de fourniture de consommables spécifiques à l’unité de dialyse et la non-livraison de l’appareil d’Echographie vasculaire avec sondes. Aussi, un montant de 4,5 millions versé par un fournisseur, pour la prise en charge des frais de déplacement de trois personnes à une foire-exposition, n’a pas été justifié. Autant de flous artistiques qui ont permis aux responsables de l’Administration du Point G de déguster les fonds de l’Hôpital à la petite cuillère.
Aussi, le marché relatif à l’installation d’équipements au Bloc Opératoire et à la formation de quatre techniciens n’a pas été exécuté alors que le montant de 104,37 millions de francs CFA a été, intégralement, payé à cet effet.
S’y ajoutent des commandes par anticipation des matériels pour un montant de 60,86 millions de francs CFA. Pire, la boite de fistule a été louée avec le Cabinet médical « Promenade des Angevins » à 1 million de francs CFA, en l’absence d’un contrat de prestation. Est-ce à dire que les bénéficiaires de ces prestations sont des proches des seigneurs de l’Hôpital du Point G ?
En somme, la caisse de l’Hôpital du Point G est gérée en dehors des circuits de la comptabilité. Les frais de réparation du véhicule du Directeur Adjoint ont été pris en charge pour un montant de 12,74 millions, suite à un accident mortel commis par un chauffeur non employé par l’hôpital. De même que ceux d’un particulier pour une enveloppe de 1,75 millions.
Au même moment, il n’y a aucun suivi de la réalité des versements. Un seul exemple cité par nos sources : la non justification de la somme de 637.276 francs CFA représentant l’écart entre le mandat admis au Trésor et la prime d’assurance relative à trois véhicules.
Par ailleurs, le Dirlo du Point G a payé, sans base juridique, la somme de 1,72 million à des personnes étrangères de l’Hôpital. Aussi, il a payé (encore !) sans base légale le montant de 12 millions à la commission de suivi et de contrôle des recettes.
La « mangecratie » à ciel ouvert
Quant au logiciel de comptabilité-matières destinés aux ordinateurs de l’Hôpital et au serveur, il s’est envolé. Comme par magie. Et sans explication. D’où la falsification abusive des souches de reçus, la non justification des dépenses, le double paiement des factures et des frais d’hébergement d’un montant de 415.000F CFA et l’inexistence de numéros sur les factures et les reçus de paiement.
Bien plus, des matériels informatiques pour un montant de 1,70 million et des lunettes corrigées pour 165.000F CFA ont été achetés, mais n’ont jamais été identifiés.
Mais, les responsables du Point G s’en défendent sans convaincre. Pour eux, la livraison de ces matériels est en retard. Une hypothèse rejetée par les enquêteurs qui ont séjourné à la direction du Point G. Avec la preuve par l’épreuve. A les en croire, toutes ces prestations ont été détournées.
Mais pour les satrapes du Point G, les lots de matériels ont été livrés par la suite.
S’agissant des ressources humaines, c’est le branle-bas. Les tâches et responsabilités entre les caissiers du Bureau des entrées et la comptabilité ne sont pas définies.
En outre, les enquêteurs ont précisé que les besoins pour les dépenses de matériels ne sont pas exprimés. De même, les marchés et les contrats sont attribués à des personnes ne remplissant pas les conditions. Avec comme mot d’ordre : « bouffe et tais-toi, s’il en reste la nation pourra en bénéficier ».
Du côté des dépenses, les irrégularités relevées frisent le dol. Elles sont plus criardes les unes que les autres. L’échec est cuisant et le revers cinglant.
La direction du Point G a exécuté une dépense de 2,4 millions de francs CFA par an relative à l’installation, l’assistance et la formation du personnel au logiciel PREED. Alors que ce logiciel est pris en charge par la Direction Nationale du Budget. S’y ajoute, la non-justification de la formation de deux manipulateurs d’équipement spécifique de toxicologie.
A tout cela, s’ajoutent les dépenses injustifiées ou sans justificatifs que le Boss de l’Hôpital du point G brandit comme un éventail. Histoire de combler les trous de caisse.
Depuis des lustres, l’Hôpital du Point G est au bord du précipice.
Et pire, quand il y a décaissement, c’est sans rapport avec les besoins réels de la structure. En clair, l’argent coule de source. Et dans d’autres sources.
De telles pratiques, indiquent nos sources, ont causé une perte sèche de 282 millions de francs CFA à l’Hôpital du Point G. Avec à l’appui, une rupture de stocks de sérums au niveau de la néphrologie. D’où le calvaire des dialysés qui sont obligés de mettre à terre pour se procurer du sérum et bénéficier de soins.
Face à cette situation, des travailleurs que nous avons joints au bigophone témoignent : « depuis très longtemps nous avons expliqué la situation aux responsables de l’hôpital. A commencer par le chef de la néphrologie, le Pr Mahamane Khalil Maïga et le DG, le médecin- Colonel Charle Fau. Mais que faire, lorsque les premiers responsables tardent à intervenir ? ».
Bref, l’Hôpital du Point G a été sacrifié sur l’autel d’intérêts personnels. En somme, la caisse de l’hôpital a subi une saignée financière de plusieurs dizaines de millions. D’où, une pénurie de produits à la néphrologie. Avec à l’appui, la paralysie de l’hôpital à certains niveaux.
En attendant, les dialysés sont abandonnés à leur triste sort.
Affaire à suivre et à poursuivre donc !
Jean pierre James