Décidément, les limiers du Pôle économique et financier ont du pain sur la planche avec cette affaire de détournement au Fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme. En effet, selon des sources généralement bien informées, les personnes actuellement en prison sont celles présumées avoir trempé dans l’attribution de marchés fictifs dans le cadre de l’approvisionnement du ministère de la Santé en médicaments antituberculeux.
L’affaire de détournement de ressources au niveau du Fonds mondial comporterait, en tout, trois volets : le volet tuberculose, qui est actuellement en train d’être épluché par les limiers du Pôle économique et financier, le volet paludisme et le volet sida. Ce dernier volet concerne principalement la Cellule sectorielle de lutte contre le sida (CSLC) du ministère de la Santé qui reçoit d’importantes subventions du Haut conseil national de lutte contre le sida (HCNLS), lui aussi financé par le Fonds mondial mais rattaché à la présidence de la République.
En effet, les arrestations opérées récemment dans des structures de santé, notamment à la Direction administrative et financière, à la Direction nationale de la santé, à la Direction régionale de la Santé du District de Bamako, au Programme national de lutte contre la tuberculose et dans les régions de Gao et Kidal, seraient toutes liées aux marchés fictifs passés avec des opérateurs économiques de la place, plus ou moins spécialisés dans la livraison de médicaments antituberculeux.
Des cadres et agents actuellement en prison seraient impliqués dans le processus d’acquisition de ces médicaments qui sont, d’ailleurs, d’une nécessité absolue pour la survie des malades. Mais au lieu de passer lesdits marchés avec des firmes spécialisées, les personnes chargées de passer ces marchés auraient tout simplement fait signer lesdits dossiers de passation, par qui de droit, sans pour autant procéder à leur achat effectif, a fortiori à leur mise à la disposition des malades. C’est cette supercherie qui serait à la base de l’arrestation des personnes actuellement en prison à Bamako-coura ou à Bollé. Le hic est donc que les médicaments n’ont jamais été livrés. Alors où est donc passé l’argent du Fonds mondial destiné à l’achat de ces médicaments ? C’est la réponse à cette question que tentent de trouver Sombé Théra, le Procureur anticorruption, et ses hommes.
Rappelons que la tuberculose est une maladie infectieuse et contagieuse. Elle évolue sous différentes formes mais c’est la tuberculose pulmonaire qui est la plus répandue. Dans notre pays, il y a quelque 50 000 cas toutes formes confondues. Chaque année, des milliers de décès sont causés par cette maladie qui touche principalement les pays les plus démunis.
L’examen des dossiers paludisme et sida très avancé
En procédant à la confrontation des bordereaux de livraison et d’autres pièces liées auxdits marchés, les enquêteurs du Fonds mondial auraient ainsi décelé des cas de malversations, des marchés fictifs portant sur plusieurs centaines de millions FCFA. En plus, certains matériels acquis comme étant d’origine japonaise, par exemple, donc de qualité supérieure, se sont révélés être de piètre qualité. Des engins de locomotion acquis sur le Fonds mondial, pour servir sur le terrain, auraient tout simplement disparu dans la nature.
En laissant, naturellement, des traces dans les dossiers. C’est ce genre de constat qui aurait provoqué l’ire des bailleurs de fonds qui, parfois, se demandaient s’ils se trouvaient réellement au Mali réputé pour la bonne gestion de ses finances. N’en croyant pas leurs yeux, les experts du Fonds mondial se seraient, alors, transportés à Koulouba pour informer qui de droit. Mais avant de repartir pour Genève, ils ont pris la lourde décision, qui sonne, désormais, comme un désaveu, de transférer leurs sous de la DAF du ministère de la Santé pour en confier la gestion à la Société d’Expertise Comptable DIARRA. C’est donc désormais devant le guichet de ce Cabinet privé que passent les cadres de la Santé et autres bénéficiaires principaux et secondaires pour soumettre leurs requêtes en vue d’un éventuel décaissement.
Compte tenu du caractère mesquin des enquêtes, il semblerait que les juges ont décidé de passer au peigne fin l’ensemble des trois volets mais l’un après l’autre. Ce qui augure d’une longue procédure qui ne fait d’ailleurs que commencer. Peut-être que certaines personnes, actuellement en détention, pourront bénéficier de la liberté provisoire. Mais, pour le moment, le flux vers la maison d’arrêt de Bamako ne s’est pas encore arrêté.
En effet, c’est la tuberculose, à travers le Programme national de lutte contre cette maladie, qui a constitué le premier volet de l’enquête. L’examen des dossiers sida (CSLS du ministère de la Santé) et paludisme (PNLP) serait en cours au niveau approprié. Affaire donc à suivre.
Mamadou FOFANA
Chroniqueur politique