Le scandale de la CAMEC (Caisse Mutualiste d’Épargne et de Crédit de l’Éducation et de la Culture) dans la région de Bougouni, contrairement à ce que d’aucuns pensent, n’a pas fini de faire des dégâts au sein des populations spoliées et grugées dans cette nauséabonde affaire de placement d’argent. Des années après, les dizaines de milliers de victimes de cette affaire pris à bras le corps par le collectif des adhérents de la caisse d’épargne sont entre le désespoir, le suicide et la mort…
Décidément, les 53.000 sociétaires des 27 caisses de la CAMEC courent depuis 2014 derrière leurs sous qui se chiffrent à 1,4 milliard FCFA dont 200 millions pour la seule antenne de la région de Bougouni. Du coup, les sieurs Martin Pierre Dakono et Moussa Diarra, respectivement, le Président national de la CAMEC et le président locale de l’antenne de Bougouni, à l’époque des faits, se trouve au cœur de la controverse. Révoqués à la faveur d’une Assemblée Générale de la CAMEC en 2015, les deux personnalités se trouvent, actuellement, au devant la scène. Et cela, après une alerte des déposants à leur encontre au niveau d’un Pôle d’avocat.
Plus les jours passent, plus le calvaire des dizaines de milliers de victimes du scandale de la CAMEC (que ça soit dans la région de Bougouni ou d’autres parties du Mali) l’expression n’est pas trop forte, va en augmentation exponentielle, c’est-à-dire, de plus en plus grande ; ceci, de façon inquiétante dans la mesure où après les promesses de début de remboursement en 2017 de la nouvelle Direction nationale, aucune bonne nouvelle jusqu’ici pour ces pauvres victimes. À cet effet, il faut dire avec larmes, affliction et tristesse, que les victimes du scandale financier de la CAMEC sont depuis lors entre le désespoir, le suicide et la mort puisque aux morts déjà enregistrés ici et là sur toute l’étendue du territoire national, se sont ajoutés d’autres.
Endettés, appauvris, malades, et désespérés, certaines victimes ont vite rendu l’âme. Ceci, on n’a pas besoin d’être régisseur de morgue, médecin ou agent recenseur pour l’affirmer dans la mesure où d’une part ; les contacts avec le collectif des victimes, leurs amis, familles, collègues de travail ; d’autre part, des visites devant les caisses de la Direction générale de la CAMEC à Badalabougou et autres antennes, les hôpitaux durant les mouvements perlés de ces dernières années ainsi que certaines émissions radiophoniques permettent d’authentifier l’hécatombe, les dégâts funestes causés par le scandale des placements d’argent de la CAMEC, tant à Bougouni qu’au niveau des autres antennes du Mali. Toujours rien pour ces victimes mis à part la petite fumée d’espoir vue lors du paiement de ceux qui ont placé leur argent au niveau de la Direction générale de la CAMEC. Conséquence, aux morts déjà enregistrés dans la région de Bougouni et ailleurs, à cause de l’état de désespoir des pauvres populations, sont venus s’ajouter d’autres.
Les sociétaires roulés dans la farine
Comme il faut s’y attendre, les pertes en vie humaines, espèces de danses macabres, ne sont pas prêtes de s’arrêter. Car, signalons le tout de suite, il y en a qui sont encore sur le point de se suicider ou qui s’interrogent sur l’utilité de leur vie. Non seulement, ils n’ont pas leur argent, mais appauvris, désemparés, malades, ils en sont dépourvus et donc incapables d’assurer leurs besoins ou ceux de leurs familles. Quid de ces agents de la CAMEC de Bougouni ou cadre de la CAMEC nationale qui ont manipulé les fonds en les plaçant dans des conditions illégales de placement.
« Au début, c’est Martin Pierre Dakono, le président national de la CAMEC et Moussa Diarra, le président locale de l’antenne de Bougouni, en même temps, le président de la Commission crédit, qui ont scandalisé les activités de la CAMEC dans la région de Bougouni. Et c’est le président locale, Moussa Diarra, qui faisait le porte-en-porte pour récupérer les carnets des adhérents et réaliser en leur place, des versements. Avec cette confiance, il a réussi à inscrire à la CAMEC des ressortissants de sa localité de Sandaré à Kayes, et leur octroyer par la suite, des crédits au niveau de la caisse CAMEC de Bougouni. Mais avec son décès, aujourd’hui, tous ces carnets et montants sont sans trace », se lamente la voix mourante et cahoteuse, un déposant de la CAMEC de Bougouni et homme d’affaires qui en plus nous confie qu’il n’est plus facile pour lui de faire fasse au dépenses de sa famille.
Un ex membre de l’Assemblée Générale de la CAMEC de Bougouni déplore : « la faillite de l’antenne CAMEC de Bougouni est intervenue lorsque Martin Pierre Dakono et Moussa Diarra sont arrivés à octroyer un montant de 50 millions FCFA à un commerçant de Niono, sans que l’Assemblée générale de la CAMEC de Bougouni ne se prononce sur ce dossier. Du coup, des membres de l’Assemblée ont démissionné. C’est de là que les problèmes de la Caisse de Bougouni ont commencé ». Et notre interlocuteur de préciser : « Les indicateurs de la CAMEC nationale, jadis fleurissante, sont au rouge. Une perte financière estimée à 1,5 milliard FCFA. Aujourd’hui, cette situation est caractérisée par une crise de liquidité et de solvabilité dans les caisses du réseau. Comme c’est le cas à la CAMEC de Bougouni, où il n’y a pas de possibilité à ce jour de restituer aux épargnants leurs argents ».
Face à cette situation, le gouvernement de transition qui a moult fois dit qu’il travaille avec méthode et transparence, oubliant qu’il s’est mis une corde au cou, est vivement interpellé. Encore quelques mois, et ce sera vraisemblablement la fin de la transition et pourtant, les gens ne sont pas encore rentrés en possession de leurs argents. Parallèlement, les dégâts sont immenses et cruels…
Jean Pierre James