La justice malienne semble désormais décidé à couper définitivement le sommeil aux prédateurs épinglés dans les différents rapports de contrôle dont le dernier est celui de la CASCA. Après l’interpellation la semaine dernière de l’ancien DAF du Ministère de la Justice, Hammadoun Kolado Cissé, c’est au tour des responsables de l’INITIATIVE RIZ, épinglés dans le même document de passer à tour de rôle devant le Pôle économique. Ce, à partir de ce lundi, 04 juillet 2011, selon nos sources. Cap donc sur un dossier qui fera sans aucun doute des vagues.
Le dossier relatif à l’INITIATIVE RIZ fera sans aucun doute des vagues et pour plusieurs raisons. D’abord, il s’agit d’un projet relevant directement de la Primature, c’est-à-dire sous la gestion de Modibo Sidibé. Ensuite, il implique un actuel membre du Gouvernement, Tiémogo Sangaré. Enfin, les faits de malversations financières sont reprochés à des présumés proches du Palais présidentiel. Il s’agit de Diadié Ba, opérateur économique à Niono, de Seydou Nantoumé, PDG de TOGUNA Industries, et de plusieurs directeurs nationaux et régionaux de l’agriculture.
D’ailleurs, selon nos sources, le Directeur national de l’agriculture et Diadié Ba, opérateur économique spécialisé dans la vente des engrais auraient été aperçus dans les locaux du Pôle économique et financier de Bamako sur convocation du patron des lieux, le Procureur Sombé Théra. Au moment où nous mettons sous presse, rien n’avait filtré de la teneur des échanges.
Les faits
En effet, dans son tout dernier rapport remis au chef de l’Etat, la Cellule d’Appui aux Structures de Contrôle de l’Administration (CASCA) avait recommandé la transmission du dossier de gestion de l’Initiative riz des deux dernières campagnes à la justice. Et pour cause.
Après contrôle, elle a constaté de grotesques irrégularités dans la gestion des fonds alloués à la souveraineté alimentaire de notre pays. Les enquêteurs se sont rendus compte que les fonds ont été sauvagement dilapidés, où simplement détournés à d’autres fins. Ce sulfureux dossier, rappelons-le, est relatif aux campagnes agricoles 2008-2009 et 2009-2010 que le président de la République, Amadou Toumani Touré lui-même a remis, les yeux rouges de colère, en main propre au juge anti-corruption avec instruction qu’il faudra faire toute la lumière sur la trace du moindre franc affecté à cette Initiative.
Au nombre des pratiques dignes d’une vulgaire pègre, les limiers de la CASCA ont découvert que le gré à gré était devenu la méthode savante d’enrichissement des prédateurs du Gouvernement. Ainsi, ils se rendent compte, tous ahuris, que le Gouvernement dirigé par Modibo Sidibé a conclu trois contrats par entente directe avec une société dont le rapport ne révèle malheureusement pas le nom, pour un montant de 12,6 milliards de F CFA dans le cadre de l’approvisionnement des producteurs en engrais. Ce n’est que le début du pillage. Le non-règlement des marchés des intrants pour des raisons difficiles à comprendre, occasionnait un manque à gagner de 1,14 milliards de F CFA.
D’autres irrégularités rapportées par la CASCA portent sur la mise à l’écart d’offres moins disantes dans la fourniture des décortiqueuses pour une incidence financière de plus de 59 millions de F CFA, la non-déclaration de la TVA par deux fournisseurs pour un montant de plus de 97 millions de F CFA, des impayés sur les crédits de motoculteurs pour 78,4 millions de F CFA. S’arrête là la valse des gros prédateurs et commence la fête pour les structures régionales en charge du projet. Ainsi, la Direction régionale de l’agriculture de Koulikoro est particulièrement visée sur le versement des ressources issues de la vente d’urée dans le compte Initiative riz Koulikoro au lieu du compte BNDA Initiative riz 2008-2009 pour un montant de plus de 148 millions de F CFA. A la Direction régionale de l’agriculture de Kayes, il est reproché la non-justification des sommes issues de la vente d’engrais.
Après la fête, la défaite
A l’analyse, on se rend aisément compte de la légèreté avec laquelle, les cadres de notre administration publique gèrent les biens publics. Comment peut-on comprendre qu’un projet rattaché à la Primature soit victime d’un tel vandalisme ? Rien ne justifie la «myopie» de l’ancien Premier Ministre Modibo Sidibé et ses amis. En attendant d’être convoqué chez le juge, Modibo doit à tout prix convaincre ses sympathisants de sa bonne moralité sur la gestion de l’argent public. Dans le cas échéant, il lui sera difficile de prétendre briguer un quelconque mandat. La fête est donc terminée, il faut assumer la défaite.
Abdoulaye NIANGALY
Interpellé par le Pôle Economique de Bamako
Hammadoun Kolado Cissé cherche à embarquer le procureur Sombé Théra
Après son interpellation le 17 juin dernier par le Pôle économique et financier de Bamako pour délinquance financière, l’ex-DAF du Ministère de la Justice, actuellement président de la Fédération malienne de football, Hammadoun Kolado Cissé aurait décidé de régler ses comptes avec ses anciens collaborateurs du Département et plus particulièrement avec le Procureur Sombé Théra, son principal accusateur d’aujourd’hui.
Il nous revient de source sûre qu’il aurait cherché à embarquer certaines autorités judiciaires dans cette affaire. D’abord, le Garde des Sceaux, Maharafa Traoré et tout son Cabinet qu’il dénonce d’avoir bénéficié de ses largesses en son temps sur certains chapitres de ses dépenses. Ensuite, le Procureur anti-corruption et non moins président du Pôle économique et financier de Bamako. A ce dernier, Hammadoun Kolado Cissé révéla qu’il a lui aussi bénéficié de certains crédits de fonctionnement pour le compte de sa structure, à savoir le
Pôle économique et financier de Bamako.
Cette stratégie de défense adoptée par l’ex-DAF du Ministère de la Justice est le signe d’une panique qui ne dit pas son nom. En effet, sa conduite manu-militari au Pôle économique de Bamako n’est-elle pas le signe annonciateur d’une brouille avec son puissant protecteur, ATT ?
Tout porte d’ailleurs à le croire si on sait que c’est le président de la République lui-même qui aurait demandé d’ouvrir tous les dossiers relatifs à la corruption et à la délinquance financière.
Et c’est dans le cadre de l’exécution d’une telle instruction présidentielle que le Garde des Sceaux, premier parquetier du Mali, Maharafa Traoré a ordonné de commencer cette bataille judiciaire chez lui-même, c’est-à-dire au Ministère de la Justice, Garde des Sceaux.
Est-il besoin de rappeler que le Bureau du Vérificateur Général dirigé en son temps par Sidi Sossoh Diarra avait découvert un certain nombre d’irrégularités au niveau de la Direction Administrative et Financière dont le responsable n’était autre que Hammadoun Kolado Cissé.
Des fausses signatures sur les heures supplémentaires
Selon nos sources, l’un des dossiers qui accable l’ex-Directeur Administratif et Financier du Ministère de la Justice est celui portant sur les heures supplémentaires destinées à l’Institut National de Formation Judiciaire. Il est aujourd’hui établi avec certitude que Hammadoun Kolado Cissé aurait bouffé des deux mains lesdites heures supplémentaires tout en prenant soin de les justifier par des fausses signatures. Ces mêmes sources nous indiquent que Kola Cissé aurait reconnu ce forfait et payé la bagatelle de 18 millions FCFA représentant le montant total des heures supplémentaires détournées.
Un tel acte de banditisme financier pouvait-il se faire à l’insu des responsables du département de la justice ?
De graves irrégularités sur la gestion des crédits
L’autre grief reproché à Hammadoun Kolado Cissé est relatif aux irrégularités qui ont été décelées dans certaines dépenses non justifiées. Nos sources nous indiquent en effet qu’il aurait fait certaines dépenses qu’il n’a pas pu justifier dans un domaine où c’est lui seul qui agit. En effet, nous rapporte-t-on, chaque fois qu’il y avait ouverture de crédit, tous les opérateurs économiques courraient derrière Hammadoun Kolado Cissé. Qui ne se souvient pas en effet, des largesses de l’ex-DAF en son temps ? Hamadoun Kolado Cissé qui était en pleine campagne pour la présidence de la Fédération malienne de football s’adonnait sans calcul à certaines extravagances dans sa gestion. En quoi est-ce que le Département de la justice est-t-il impliqué dans les défaillances personnelles de Kolado Cissé ?
Et jusqu’au jour d’aujourd’hui, Hamadoun Kolado Cissé n’a jamais pu apporter les justificatifs. Tel est d’ailleurs l’équation juridique que le Pôle économique lui pose, à savoir «qu’il justifie ce qu’on lui reproche. Il n’a pas besoin de mandatement pour cela» nous explique-t-on.
Birama FALL