Ce sont presque toutes les Directions Administratives et Financières de nos différents départements ministériels qui sont impliquées dans des histoires de détournement d’importants fonds publics. Même balayés, les ex patrons de ces structures doivent rendre compte.
DAF du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale
A ce niveau on signale une perte financière de 0, 18 milliard de F CFA. Elle a été engendrée par des irrégularités comme : les passations frauduleuses de marché (le montant concerné s’élève à 316, 46 millions de F CFA), l’achat de carburant dont l’utilisation demeure inconnue.
En effet, le dernier rapport du bureau du vérificateur général révèle que la DAF a acheté pour 807,44 millions de FCFA du carburant dont l’utilisation n’a pu être retracée. La DAF du MAECI a pour les besoins des services, acheté du carburant, en 2007, pour 202,8 millions de FCFA, en 2008, pour 311,3 millions de FCFA et, en 2009, pour 293,4 millions de FCFA.
Aussi, cette DAF ne tient ni des états d’émargement, ni des carnets de bord de véhicule pouvant attester l’utilisation du carburant acheté.
Toujours au niveau de cette DAF, on signale que la régie a effectué des opérations dépassant les montants autorisés (10 millions de FCFA le plafond des avances individuelles faites au régisseur). Or, la DAF a souvent accordé à la régie des avances portant sur des montants compris entre 21 millions de FCFA et 94 millions de FCFA.
Le montant total des avances supérieures au plafond s’élève à 479,31 millions de FCFA pour 9 approvisionnements sur la période 2007-2009.
A noter que la loi fixe à 25 000 FCFA le montant maximum des dépenses de la régie.
Autre fait constaté au niveau de cette DAF, la non disposition par la régie de documents justificatifs de certaines dépenses dont le montant s’élève à 274, 41 millions de FCFA.
Aussi, ladite régie a payé des "perdiem" pour un montant de 8,1 millions de FCFA non conformes à la réglementation.
Plus grave, la structure a utilisé pour certaines activités, des taux de perdiem qui ne sont fixés par aucun texte pour un montant total de 8,09 millions de FCFA. Les taux journaliers appliqués pour ces activités varient entre 10 000 FCFA et 50 000 FCFA.
Une autre irrégularité qui donne du tournis, c’est la réalisation par la régie de dépenses totalisant 85,8 millions de FCFA sur la base de photocopies de documents.
La régie a payé également des perdiem sur la base de photocopie des états d’émargement établis par les services d’origine des agents bénéficiaires pour un montant de 7 millions de FCFA. En tout, cette régie a réglé des dépenses d’un montant total de 78,82 millions de FCFA, sur la base de photocopies de factures fournisseurs. En plus, pour les mêmes dépenses, la régie n’a pas fourni les autres pièces justificatives (bon de commande, bon d’achat et bordereau de livraison).
Par ailleurs, cette même régie a effectué des dépenses injustifiées d’un montant de 20,51 millions de FCFA. A titre d’exemple, elle a fourni, en justification de l’utilisation d’un reliquat de fonds d’origine extérieure de 19,67 millions de FCFA, des pièces n’ayant aucun rapport avec l’activité concernée. Cette activité ayant été antérieurement pré financée sur le budget national, ce reliquat de fonds devait être reversé au Trésor.
Ensuite elle a payé deux fois une facture de location de véhicules pour un montant de 0,84 million FCFA.
S’agissant du plafond fixé par la loi pour le règlement des salaires en espèces, il n’est pas toujours respecté. Ainsi, la régie des Affaires étrangères a payé en espèces des salaires dépassant le plafond règlementaire de 50 000 FCFA. Par Exemple, en janvier 2008, le billeteur a payé en espèces 17 salaires totalisant 4,47 millions FCFA.
Quant à la gestion des allocations octroyées aux épouses des agents diplomatiques et consulaires, elle présente aussi des faiblesses. A ce propos, le dernier rapport du bureau du vérificateur général stipule que le billeteur a continué à payer des allocations aux conjoints d’agents diplomatiques et consulaires après leur retour au Mali, en violation des dispositions. Le montant concerné s’élève à 29,31 millions de FCFA.
Pire, des états de paiement d’allocations aux conjoints n’ont pas été émargés par les bénéficiaires et les montants correspondants de 11,65 millions de FCFA n’ont pas été reversés au Trésor.
DAF du ministère de la justice
Comme les autres, cette DAF n’applique pas non plus les principes édictés par le code des marchés publics et le manuel d’exécution des dépenses publiques. Ce qui explique l’inexistence de fichier pour des fournisseurs. Elle consulte systématiquement un petit nombre de fournisseurs quel que soit le domaine d’approvisionnement.
S’agissant des marchés publics, ladite DAF règle systématiquement aux fournisseurs la totalité du montant des marchés dès la réception provisoire.
Les vices de fabrication ne sont pas couverts par une retenue de garantie. Cette situation est bien illustrée par le cas de la construction, à hauteur de 287,3 millions de FCFA, de certains Palais de Justice qui présentent des défauts apparents, alors que tous les paiements sont effectués.
En plus, la DAF a réglé les factures d’un fournisseur sans s’assurer que le marché est exécuté conformément au contrat. En effet, ce fournisseur devait livrer des céréales et des condiments à toutes les maisons d’arrêt du Mali. Mais, au lieu de procéder aux livraisons lui-même, il convie à Bamako tous les régisseurs de prison et leur remet des numéraires à charge pour eux d’acheter les condiments et les céréales.
Et, aucun mécanisme n’est mis en place pour s’assurer que les régisseurs utilisent intégralement les fonds pour l’achat des produits.
Pour de l’argent certainement, la commission de dépouillement et de jugement des offres a éliminé des soumissionnaires qui remplissaient les conditions du DAO et qui étaient largement moins- disant. Il en est résulté un manque à gagner de 452 millions de FCFA.
Le rapport 2010 du vérificateur général signale également que la DAF du ministère de la justice a fractionné des dépenses de même nature qui, cumulées sur un exercice, rendaient nécessaire la passation d’un marché. Le total de ces dépenses fractionnées s’élève à 517,6 millions de FCFA.
Quant à la gestion de la régie, elle est catastrophique. Voilà la raison pour laquelle, la DAF du ministère effectue des dépenses de régie dépassant le plafond de 25 000 FCFA.
Les avances sont faites aux services rattachés du Ministère à charge pour eux d’apporter les pièces justificatives. Les pièces apportées pour justifier ces avances sont libellées au nom du Ministère de la Justice alors qu’elles devraient l’être au nom des services.
En plus, ces pièces ne comportent ni date ni numéro. La DAF les réintroduit dans le circuit avec des numéros manuscrits, comme dans le cas de la restauration d’une session de Cour d’Assises à Kayes qui a coûté 9,3 millions de FCFA en 2007.
La DAF a engagé et payé des factures pour 36,1 millions de FCFA alors que les bordereaux de livraison correspondants datent d’exercices antérieurs.
Dans certains cas, la DAF achète les biens et services à des prix dépassant le maximum préconisé par la mercuriale. Il en est résulte une surfacturation de 11,8 millions de FCFA.
Par ailleurs, les ordres de mission fournis pour justifier les avances sur frais de mission ont comme objet "raison de service". Un tel libellé ne permet pas de vérifier la réalité ou le bien-fondé de la mission.
Des dépenses de l’exercice 2008 sont justifiées par des factures de 2009 pour 1 million de FCFA au niveau de la Cellule de lutte contre le SIDA du Ministère.
Des fonds mandatés au nom de certaines structures (Institut de Formation Judiciaire. Conseil Supérieur de la Magistrature) au litre de leur régie ont été détournés de leur objet au profit du Cabinet pour 8,4 millions de FCFA.
A noter enfin que la DAF du ministère de la Justice ne dispose pas de documents des marchés même les plus récents. Les sous concernés par ce phénomène s’élève à 24,55 millions de FCFA. En plus, d’autres dépenses effectuées par régie ne sont pas justifiées pour 14,61 millions de FCFA.
Pour la période de janvier 2007 à juillet 2008 par exemple, ladite DAF n’a pas pu produire les pièces justificatives des montants mis en régie.
Les dépenses effectuées pour cette période s’élèvent à 1,51 milliard de FCFA. Il s’agit de malversations effectuées par le régisseur et l’affaire est pendante devant les tribunaux.
Les pièces justificatives n’ont pas fait l’objet de passation avec le nouveau régisseur.
(A suivre)
A. Sanogo