Suite à notre article intitulé " Les PTF exigent l’inculpation de l’ex-ministre Oumar Ibrahima Touré ", publié dans le n°2764 du jeudi 19 mai 2011, le Groupe COMES nous a adressé une pile de documents relatifs au dossier du marché des deux camions-radio qui devaient être livrés au ministère de la Santé pour le compte du Programme national de lutte contre la tuberculose (PNLT). Des documents qui montrent clairement que ledit groupe, dirigé par Abdoulaye Maïga, n’a rien à se reprocher dans cette affaire de détournement au Fonds mondial. Et pourtant, la CASCA, une structure rattachée à la présidence de la République, vient de remettre ledit dossier à la justice.
Rappelons que le Groupe COMES (Commerce Malien de l’Espoir) est l’une des multiples sociétés qui participent à l’exécution des chantiers de construction au ministère de la Santé, voire au-delà. En effet, c’est ce même groupe qui a obtenu et exécuté le marché de construction de la nouvelle Maison de la presse, financée par la présidence de la République et qui est, aujourd’hui, un véritable joyau architectural dressé au milieu de l’historique quartier de Médina-coura, à Bamako. Plusieurs chantiers de CESREF (Centre de santé de référence) ont été également exécutés avec succès par ladite société et cela à la grande satisfaction des autorités de la Santé et des populations bénéficiaires. Toutes choses qui ont fait que ledit Groupe a pu décrocher le gros marché de réalisation du CESREF de Oussoubijagna pour plus de 700 millions F CFA.
Dans ces conditions, comment comprendre qu’un tel groupe puisse voir son nom mêlé dans un scandale du genre de celui du Fonds mondial dont le montant des sommes détournées dépasse aujourd’hui les deux milliards F CFA ?
En effet, dans le Bulletin d’information 2010 de la CASCA, que " L’Indépendant " a décortiqué pour porter le contenu à la connaissance du contribuable malien, il est écrit noir sur blanc que " 104 913 840F CFA ont été réglés au Groupe COMES pour l’achat de deux (2) camions qui n’ont pas été livrés, objet du marché n°0323/DGMP du 18 juin 2009 ". Une grave accusation. Surtout que ledit marché est financé sur les ressources du Fonds mondial.
C’est le Contrôle Général des Services Publics (CGSP), un organe de contrôle de l’Administration, placé sous l’autorité du Premier ministre, qui a eu à relever ces faits lors d’une mission de vérification sur la gestion des ressources du Fonds mondial allouées au ministère de la Santé, dans le cadre de la lutte contre le paludisme et la tuberculose.
COMES n’a rien encaissé sur ledit marché, selon son P-DG
Rappelons que c’est par lettre n°4040 du 18 juin 2009 que le directeur administratif et financier (DAF) du ministère de la Santé, à l’époque, Ousmane Diarra, a notifié au directeur général du Groupe COMES le marché relatif à la fourniture de deux (2) camions-radio destinés au PNLT pour un montant total de 349 712 800F CFA et un délai d’exécution de 90 jours.
Le 29 juin 2009, dans une correspondance cosignée du Secrétaire général et du DAF, le ministère de la Santé a demandé à Ecobank Mali de procéder " au transfert de la somme de 104 913 840F CFA au profit du compte du Groupe COMES " domicilié à la BMS SA. Ce montant constituant " l’avance de démarrage (30%) sur le montant HT du marché n° 0323 DGMP 2009 relatif à la fourniture de deux (2) camions-radio ".
Avant même que le transfert de cette avance de démarrage ne soit effectif, par lettre n°6486/DAF du 9 octobre 2009, le DAF Ousmane Diarra, notifiait au directeur général du Groupe COMES la " suspension du délai de livraison des deux camions-radio " et cela suite " à des difficultés liées au décaissement du Fonds mondial ". Et au DAF d’ajouter également " vous serez informé par mes soins dès que les difficultés seront levées ".
Cité dans un rapport d’investigation du Contrôle Général des Services Publics (CGSP), le Groupe COMES adresse, dans le but de balayer les soupçons de détournement qui pèse sur lui, une demande d’attestation de non encaissement de fonds au Président-Directeur Général de la Banque Malienne de Solidarité (BMS SA). Dans sa correspondance adressée à la BMS, le P-DG du Groupe COMES rappelle que " le paiement de l’avance de démarrage par ordre de virement en date du 29 juin 2009 n’a pas été effectué et le délai de livraison a été suspendu pour cause de difficultés liées au décaissement du Fonds mondial. Afin de nous justifier par rapport à cette requête, nous venons par la présente solliciter une attestation émanant de votre banque et établissant l’encaissement ou le non encaissement du montant sus-mentionné à travers notre compte domicilié dans vos livres…Nous joignons à la présente les correspondances officielles établissant le niveau d’exécution dudit marché, ainsi que l’extrait du rapport d’investigation mentionnant notre société".
En réponse à cette sollicitation, le P-DG de la BMS SA, par lettre n°5907 /PDG/2010 du 19 octobre 2010, informait le Groupe COMES que sa banque n’a " enregistré aucun virement ou versement correspondant à ce montant soit 104 913 840F CFA…La présente lettre vaut Attestation de non encaissement de fonds, sauf erreur ou omission de notre part". Comme on le voit, il n’y a aucune trace de versement de la somme indiquée sur le compte du Groupe COMES. C’est, d’ailleurs, avec surprise que son P-DG a appris que le rapport concernant ce dossier a été transmis par la CASCA à la justice.
Pour Abdoulaye Maïga, la société qu’il dirige n’a rien encaissé sur ce marché. Ce qu’a attesté sa banque dans une correspondance on ne peut plus claire et dont copie nous a été fournie.
Il s’agit maintenant de savoir si ledit marché sera in fine résilié et le Groupe COMES dédommagé car, selon son PDG, il a engagé des frais de l’ordre de plus de 14 millions FCFA en vue de l’exécution dudit marché. Qui s’est, malheureusement pour lui, retrouvé englué suite à l’affaire de détournement au Fonds mondial.
En tout cas, le Groupe COMES dit avoir mis l’ensemble de tous les dossiers relatifs à ce marché de camions-radio à la disposition des services de contrôle. Ce que son PDG s’apprêterait de faire également au niveau du Pôle économique et financier de Bamako. Afin qu’il soit compris partout que le Groupe COMES n’est ni de près ni de loin mêlé à cette affaire. Il serait intéressant que la DFM du ministère de la Santé puisse donner sa version des faits, afin d’éclairer la lanterne des contribuables maliens de même que le Fonds mondial. Mais surtout le Groupe COMES qui a tout intérêt à ce que la vérité éclate au grand jour.
A suivre !