Les chiffres avancés, 250 milliards de FCA de détournés par an, sont en dessous de la réalité. Alors que justice soit faite même si le ciel doit tomber ! Accommodés à l’incompétence de la grande majorité du personnel de l’administration, voilà que nous semblions résolus à baisser les bras face à la délinquance financière, la métastase d’un cancer économique. Le petit fonctionnaire, dans le grand bureau qu’il ne pouvait pas mériter parce qu’incompétent et corrompu, avait honteusement pris la fâcheuse tendance à confondre la caisse de l’Etat avec la tirelire de sa grand-mère. Et cette habitude cancérigène s’est généralisée au su et le plus souvent avec la complicité de l’administré, un malade qui s’ignore.
Alors avant d’exposer avec fierté sur votre bureau une attestation de participation à des formations de lutte contre la corruption, demandez-vous ceci : qui est assez naïf pour croire en votre subterfuge ? Il faut toute une vie pour entretenir l’honnêteté, la probité et la vertu. Cela ne s’acquiert pas en une séance de formation. Peu importe le trophée qu’on vous décerne, vous êtes le pire ennemi de la nation car en plus des avantages pécuniaires que vous tirez de la corruption, félon que vous êtes, parvenez à vous faire acclamer par une multitude inculte et toute aussi corrompue.
L’ampleur de la petite corruption quotidienne !
Lorsque l’automobiliste choisit de ne pas respecter les consignes de sécurité, le Code de la route, c’est parce qu’il sait que l’agent chargé de constater l’infraction et d’initier la répression a son prix (de 1000 à 5000 F.CFA).
Lorsque le porteur d’uniforme (douanier, policier, garde national) choisit de circuler dans un véhicule non immatriculé, non assuré et sans contrôle technique, c’est parce qu’il sait pouvoir compter sur la complicité des forces de l’ordre ou du désordre si l’on veut donner la qualification exacte aux choses.
Lorsque l’administré tente de tirer profil d’une situation alors même qu’il n’en remplit pas les critères légaux, c’est parce qu’il sait que le fonctionnaire a cultivé le concept de l’entreprise personnelle dans l’administration. Cette entreprise vit grâce aux subventions collectées auprès des administrés et à qui on octroie des avantages indus.
La corruption est une monnaie courante et la plupart du temps, les coupables n’en ont pas conscience. C’est cela le plus grave ! L’importance de ce fléau fait naître un désespoir profond car, nul ne sait comment y mettre fin. Un crime de masse commis en masse en toute impunité.
Alors, puisque la corruption est quasi-culturelle dans ce pays et ne peut être combattue qu’avec un nouveau modèle de malien, il nous faut concentrer nos efforts sur la lutte contre le détournement. C’est une lutte qui a toute ses chances d’aboutir en attendant que la gestation du malien nouveau ne soit terminée.
La lutte contre la délinquance financière doit être menée ouvertement parce qu’ils (les délinquants financiers) ont saigné à blanc ce pays qu’ils prétendaient tant aimer ! Ils pensaient être au-dessus des lois de la république ! Il était donc temps qu’une institution, fut-elle imparfaite, rappelle aux criminels à cols blancs ou en « Bazin Getzner » qu’ils ne sont pas intouchables.
Les citoyens honnêtes et soucieux de ce pays remercient donc le pôle économique et le ministère de la Justice pour ce réveil, certes tardif, mais salutaire. Oui le malien vous sait gré de cette initiative ! La prolifération des textes n’a de sens que si on en fait une application conforme. Il est donc heureux que le pôle économique et le ministère de la Justice aient compris la nécessité d’assumer les rôles naturels qui leurs sont dévolus. Loin de nous l’idée de cautionner une chasse aux sorcières dont nous pourrions tous en souffrir. Mais il faut, et c’est le devoir de tout patriote, encourager les investigations et actions qui permettent de débusquer les traitres, leurs soutiens et complices et tous les ennemis de l’intérieur.
Il est heureux également que le président de la république ait compris que la corruption, le détournement et l’impunité ternissaient l’image de l’institution qu’il incarne. Encourager le pôle économique dans ses investigations est la meilleure décision qu’il n’ait jamais prise.
Alors Merci de rendre justice au peuple malien même si le ciel doit tomber !
Dr DOUGOUNE Moussa
Source : Le Pélican