La chute du général Moussa Traoré a permis par la voie des urnes l’arrivée au pouvoir de l’ADEMA. Formé surtout d’intellectuels qui ont mené la lutte clandestine bien avant les années de braises, 1989 à 1991, le peuple malien était en droit d’attendre de ce conglomérat de cadres futés, la plus grande loyauté dans la gestion politique, économique et sociale de notre pays.
Mais que ne fut pas notre surprise en constatant les pratiques rétrogrades devenues le système de gestion de l’ADEMA, repris aujourd’hui par le PDES :
– l’exclusion pour les nominations aux postes administratifs, même dans les chefs lieux d’arrondissements, la carte ADEMA et PDES sont exigées.
– la course effrénée à l’enrichissement illicite par la distribution des marchés publics de gré à gré gonflés par le biais de la surfacturation et souvent même des livraisons non effectives.
Avec la libéralisation des prix imposée par Brettons Wood depuis 1980, les sangsues de l’Etat n’ont plus recours qu’à la soustraction directe de fonds publics. Il n’y a plus d’homologation de prix ; c’est le marché, la loi de l’offre et de la demande, chère aux économies libérales, qui fixe les prix. Mais en Europe, il existe des garde-fous pour limiter les dégâts.
Malheureusement chez nous, on en a cure. On donne le marché à un partenaire ou à un ami, etc. Les négociations sont faites, avec une ou deux voitures, une ou deux villas à la clé ou autres, et chacune des parties s’en sort les poches pleines. Et vive la surfacturation, la juteuse alternative qui a remplacé le détournement de deniers publics par simple soustraction de fonds des caisses publiques.
Alpha Oumar Konaré pour se dédouaner en son temps envers les partenaires au développement avait, à l’ouverture du Forum sur la justice énuméré les pratiques frauduleuses et honteuses qui caractérisent aujourd’hui le comportement des uns et des autres. Mais sans plus ! C’était déroutant. Alors, il invite une équipe de la Banque mondiale à venir éradiquer la corruption chez nous. Ont-ils réussi à le faire aux Etats-Unis ?
Au Mali, le constat est que la corruption, commencée depuis 1968 avec l’avènement du pouvoir militaire, a, de nos jours, pris des proportions de cancer généralisé. La solution pour vaincre ou tout au moins endiguer la corruption ne se trouve pas dans une augmentation des salaires mais dans un bon comportement des gouvernants dans la gestion des fonds publics. C’est sous Alpha Oumar Konaré et son parti, l’Adema, que le Mali a eu ses premiers milliardaires, des cadres démocrates.
A la réception du dernier rapport du Vérificateur général, ATT a dit ceci : «Je ne dirais pas que je suis déçu mais j’ai été touché par les polémiques autour du Bureau du Vérificateur général. Polémiques entre le Végal et ses collaborateurs, polémiques entre le vérificateur et les vérifiés, polémiques autour de certains termes. Le Vérificateur général n’est pas le procureur. Il n’est pas dit que tout ce que vous avez écrit est vrai. Quand on a l’honneur et la dignité de personnes vérifiées entre ses mains, on doit faire preuve de mesure et de responsabilité». Ces propos du président ATT font penser qu’il a regretté la création du Bureau du Vérificateur général. Même si c’était le cas, le président de la République n’a jamais épousé la conduite des travaux. On peut aisément déduire que cette institution lui aurait été imposée par les Canadiens. Sinon comment comprendre les agissements du président ATT ? Le cumul des dix (10) rapports produits par le Végal fait ressortir un manque à gagner de 423 milliards de francs CFA en sept ans.
– Malheureusement, on constate que de toutes les dérives, qui ont mis en mal le fonctionnement des institutions et des administrations, et qui continuent de plus belle, c’est-à-dire la corruption, la concussion, les détournements, certains opérateurs économiques et autres délinquants sous le sceau de l’Etat se sont accommodés avec une plus pernicieuse : «les prélèvements» de fonds publics.
Il s’agit à partir d’une complicité entre opérateurs économiques et responsables des services dépensiers de se donner les moyens de soumettre aux visas des services du contrôle financier et du trésor des mandats de paiement sous tendus par des pièces justificatives fictives alors qu’aucune fourniture n’a été livrée ou aucun service rendu.
Cette pratique, impensable sous d’autres cieux, est devenue de nos jours un fait divers compromettant notre développement et installant le pays dans la précarité où la règle d’or est de s’enrichir par tous les moyens et le plus vite possible.
Amy SANOGO