Après l’arrestation du PDG : Panique au PMU-Mali

Le Pôle économique de Bamako a accueilli vendredi  27 décembre 2013, un hôte particulier, à savoir, le Président-directeur général du Pari mutuel urbain (PMU-Mali), Idrissa Haïdara, en compagnie de son Directeur financier, Moussa Dembélé et de son agent comptable, Soungalo Doumbia, tous soupçonnés de mauvaise gestion et fraudes. Voilà un dossier qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive, surtout quand on sait que le montant total des irrégularités financières constatées au PMU, par le bureau du Vérificateur général, dans son dernier rapport, s’élève à 30 709 840 670 francs CFA, dont 3 392 531 682 francs CFA au titre de la fraude.

Apparemment, la tolérance zéro, loin d’être un simple slogan, commence à se matérialiser. C’est ce qui justifie l’interpellation des hauts responsables du PMU-Mali, depuis plus d’une semaine, au Pôle économique de Bamako, tous soupçonnés de mauvaise gestion et fraudes. Les inculpés ont pour conseil Maître Abdoul Wahab Berthé qui est en même temps avocat du PMU-Mali. Me Lamissa Coulibaly assure aussi la défense d’Idrissa Haïdara.

Le PMU-Mali est, faut-il le rappeler, une entreprise stratégique du dispositif économique du Mali, car il concourt d’une part à la mobilisation de l’épargne publique afin de générer des ressources pour le Trésor public, et d’autre part à la résorption du chômage, à la réalisation des travaux d’intérêt public constitutifs d’œuvres sociales. En effet, force est de constater que malgré la lutte anti-corruption menée par le ministère de la Justice et celui des structures étatiques de contrôle de gestion financière, d’aucuns estiment pouvoir passer entre les mailles du filet de la justice. En tout cas, c’est ce que pensaient certains responsables du PMU jusqu’à ce que la justice malienne décide de leur couper le sommeil.

Après la publication du dernier rapport du Vgal, certaines personnes pensaient que cette affaire serait passée sous silence et que les coupables s’en tireraient de manière à faire l’impunité prônée par les autorités un slogan.

Actuellement, en instruction pour mauvaise gestion et fraudes au sein du PMU-Mali, une nouvelle affaire de détournement de fonds devrait bientôt défrayer la chronique judiciaire dans la même boîte.

Cette affaire du PMU-Mali, qualifiée par le Vérificateur comme ‘’l’hippodrome de la fraude’’, remonte de la dénonciation faite par le Vérificateur général, qui, dans son rapport, a déploré la mauvaise gestion de cette entreprise, en soutenant qu’à la direction du PMU-Mali, un certain nombre de malversations  financières porte sur le montant colossal de 30 709 840 670 francs CFA.

Du coup, le Président-directeur général, Idrissa Haïdara, et d’autres responsables de ladite société sont dans la tourmente devant les limiers du Pôle économique de Bamako.

Ce que dénonce le rapport du Vgal

Le Vérificateur reproche à la direction du PMU-Mali un montant qui  s’élève à 30 709 840 670 francs CFA de mauvaise gestion, dont 3 392 531 682 francs CFA au titre de la fraude. Il s’agit entre autres de : frais financiers engendrés par les emprunts contractés par le PMU-Mali  dont les objets ne correspondent pas à un besoin de financement réel de la société ; marché conclu avec un imprimeur sans passation de marché ni d’appel à concurrence ; fractionnement de dépenses ; de paiement indu au titre d’avances et acomptes sur frais de location ; achats de carburant pour le personnel et les partenaires de PMU-Mali non soutenus par des décisions ; décaissement au profit d’un service public non remboursable ou encore de mauvaise imputation comptable. C’est l’ensemble de ces opérations dont la direction du PMU-Mali détient toutes les pièces justificatives, qui correspond au montant de plus de trente milliards.

Les constatations de Amadou Ousmane Touré démontrent à suffisance que la gestion de la Société est «entachée d’actes frauduleux qui compromettent la régularité et la sincérité de ses opérations de recettes et de dépenses».

En outre, le rapport 2011-2012 précise, que «le PMU Mali a réalisé des opérations frauduleuses d’un montant de 1,10 milliard de francs CFA sous forme de sorties d’argent non justifiées ou sur la base de fausses pièces justificatives. Pour dissimuler cette fraude, des écritures comptables ont été passées, répartissant le montant entre le compte «pertes et profits» et «autres comptes», donnant ainsi l’apparence de pertes d’argent subies par la Société.

De plus, le Vgal rajoute que le PMU-Mali a irrégulièrement reçu et décaissé la somme de  4,36 milliards de francs CFA pour le compte de la Dntcp et 100 millions de francs CFA au profit de la Présidence de la République.

Il ressort également de cette vérification  que le PDG de PMU-Mali  a accordé, sans justification ni autorisation, la somme de 771, 72 millions de FCFA à titre de dons.

Bataille d’accusations

Depuis son interpellation au Pôle économique de Bamako, le Président- directeur général, Idrissa Haïdara, n’a pas voulu laisser prospérer l’information selon laquelle il serait co-auteur de détournement d’une forte somme d’argent à la suite de la publication du dernier rapport du Vérificateur. Des affirmations qui n’ont visiblement pas convaincu certains de ces proches, soutenant que le tableau des irrégularités financières au compte du PMU-Mali, présenté par le vérificateur général, mérite une révision complète.

Si pour l’heure, on ignore le sort du PDG du PMU et ses deux collaborateurs, d’autres personnes proches soutiennent que c’est un dossier monté de toutes pièces par les laboratoires d’un pouvoir qui a fait de la justice une serpillère. Très remonté par cette information, les proches du PDG iront jusqu’à dire que le traitement du dossier laisse croire à une cabale judiciaire et que «Idrissa Haïdara est devenu le bouc émissaire idéal pour un régime qui se sert d’histoires à dormir debout». Les mêmes sources ont tenu à donner d’importantes précisions sur cette affaire.

Parlant de 47 105 252 FCFA qualifiés de dépenses sans justificatifs, ce montant, selon les proches du PDG, fait partie des fonds reçus du Trésor malien et dépensés par la Société, mais ne concerne pas ses recettes. Selon eux, il s’agit d’une partie des fonds reçus du Trésor public pour faire face à des investissements au nom de l’Etat, au même titre que les 100 000 000 de FCFA reçus de la Présidence. «Ainsi, ce total de 147 105 252 de FCFA a servi à aménager les aires de jeux pour la jeunesse à l’époque. Nous détenons les factures des prestataires, et nous sommes surpris que ça n’a pas été pris en compte», regrette notre interlocuteur.

Pour le cas des 62 809 380 FCFA, les mêmes proches affirment qu’il s’agit de patentes payées à la Direction des impôts concernant les représentations, dans les régions, et le siège. Arguant qu’à ce jour le PMU-Mali ne doit pas de patente aux impôts.

S’agissant du cas des 57 661 333 FCFA, des sources proches de la société soutiennent également que ce montant doit être corrigé, car il s’agit de 27 661 333 FCFA comme détaillé dans l’annexe du rapport. Ces dépenses concernent les exercices 2006 – 2009.

Pour le montant de 295 500 000 FCFA qualifié de paiement indu à un agent de la  SE, ils expliquent qu’ils détiennent la lettre mandatant l’agent en question pour opérer au nom de la Sécurité d’Etat.

Le justificatif des 916 909 500 de FCFA serait, selon eux,  des malversations de l’ex-caissier principal dont une partie a été transmise au contentieux de l’Etat et à la Sécurité d’Etat.

Notons que les avocats d’Idrissa Haïdara ont donc du boulot. Car, les limiers de la justice malienne ont pris l’option pour un Etat de droit et n’entendent pas faire demi-tour surtout pas pour caresser certaines opinions dans le sens des poils.

On n’a aucun droit d’en douter. Une nouvelle page s’est réellement ouverte au Mali, fermant ainsi celle de l’impunité. Quiconque qui se trouve trempé dans cette affaire doit savoir que la récréation est terminée. Il n’est pas question de faire ses valises et de se sauver, mais plutôt d’être disposer à collaborer avec la justice. Par contre, il n’y aura pas de repos pour les fraudeurs, les trafiquants d’influences,… bref, à la maffia qui a eu tort de croire que le Mali serait une sorte d’Iles vertes.

La trahison, dont se rendent coupables ces responsables, ont conduit le Mali dans une impasse. Résultat : cadres et hauts cadres ont du mal à convaincre l’opinion publique de leur efficacité et de leur intégrité morale, surtout dans la gestion des affaires publiques. Mais, pour cette fois-ci, les nouvelles autorités sont plus que jamais déterminées à traquer dans notre pays les «détourneurs» en rond, jusque dans leur dernier retranchement. Afin qu’ils rendent à «César» ce qui ne leur appartient pas.

Dès lors, c’est le sauve-qui-peut au sein des structures de l’Administration. Autrement dit, c’est la fin du sursis pour les délinquants financiers.

Ibrahim M.GUEYE

Commentaires via Facebook :