Consensus Politique au MALI : Chronique d’une fin de règne imposée

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Le problème de la candidature d’ATT est en réalité plus caillou que coton. S’il ne respecte pas son engagement, il rendra compte aux négociateurs de 2002. D’où le mutisme actuel de Koulouba, les voyages et les déplacements multiples à l’intérieur et à l’étranger, d’où aussi souvent la mauvaise humeur du président quand ses affidés se font plus royalistes que le roi. ATT a tout à perdre avec un second mandat.rn

Dans beaucoup de sociétés humaines le verbe, c’est-à-dire la parole donnée, joue un grand rôle dans les relations entre les hommes singulièrement chez nous où l’oralité s’est implantée au détriment de l’écriture, ce que dit un individu est un déterminant pour lui et, pour parler simplement, la parole sert de baromètre pour apprécier sa qualité. En termes clairs, plus un homme sera soucieux de respecter sa parole qui équivaut à un engagement de sa part, plus il sera jugé homme de parole et d’honneur et plus il la déconsidère, moins il sera pris pour quelqu’un de valable et de respectable.

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Nous ne sommes pas dans les secrets des dieux politiques mais la manière dont l’élection présidentielle de 2002 s’est déroulée fait penser que quelque part à Libreville (Gabon) où Ibrahim Boubacar Kéita s’est rendu avant le premier tour, et à Paris, qui fut en liaison téléphonique permanente avec Alpha Oumar Konaré, un accord a été trouvé au sein de la classe politique malienne pour dire à IBK de mettre provisoirement en berne ses ambitions présidentielles, de façon à permettre à ATT de gouverner le pays pendant 5 ans, de 2002 à 2007.

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Le consensus tant décrié maintenant n’a de sens que dans ce contexte dans la mesure où c’est toute la chasse politique qui a décidé de s’effacer provisoirement au profit d’ATT, l’homme de mars 1991, parce que la situation politique  intérieure exigeait son retour pour 5 ans, pas plus. L’on craignait alors que remonté à Koulouba suite aux élections après avoir été démarqué en 2000, Ibrahim Boubacar Kéita, élu président de la République du Mali, ne fasse nettoyer sévèrement et durement les écuries d’Augias de la maison Adéma.

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On gardait présent à l’esprit comme une formule incantatoire le passage en dents-de-scie de ce parti aux affaires avec les dégâts que chacun sait. Durant ces dix ans, tout n’avait pas été propre dans les rangs de l’Adéma et, en prenant en compte les récentes déclarations de son président disant que si le parti n’avait pas soutenu ATT (politiquement et électoralement) il aurait eu dans le dos la Sécurité d’Etat, l’administration et la justice, on peut dire que dans ce laps de temps il y eut plus de gaspillages et de détournements de fonds que d’éclaircies pour le pays. Venu dans ces conditions d’apaisement, le consensus pouvait se comprendre, mais comme formule de gouvernement comme l’a tenté de le faire le Mouvement citoyen à partir de 2002, il apparaît plutôt comme du vaudeville auquel ne croient même pas ses propres promoteurs, cette doctrine n’étant enseignée nulle part en sciences politiques.

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On n’a pas de preuve mais tout laisse penser qu’ATT a été désigné pour faire passer au pays cinq ans de désordre, voire de guerre civile après les gloutonneries de l’Adéma. Mais l’appétit venant en mangeant, les pressions de l’entourage se faisant fortes et lui-même cédant à l’attrait et aux privilèges liés au pouvoir, ATT a décidé unilatéralement de revenir sur sa parole donnée et de se porter candidat en 2007.

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Du Capitole à la roche Tarpéienne ?

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Mais il sait que les acteurs et les témoins de 2002, qui sont tous vivants, ne l’entendront pas de cette oreille, ne manqueront pas de lui rappeler les termes de l’accord de 2002 et c’est pourquoi il se trouve aujourd’hui au centre d’un embarras terrible, presqu’un dilemme cornélien qui le fait tourner en rond. Ne comprenant rien à ce méli-mélo politique, les sieurs du Mouvement citoyen et tous ceux qui veulent profiter de sa présidence durant les 5 ans à venir, grenouillent autour de lui effarouchés qu’il prenne du retard à faire acte de candidature.

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Cependant, dès le départ, entre 2004 et 2005, lorsque les loups se sont levés pour annoncer qu’il lui fallait un second mandat en 2007 pour parachever une œuvre qui n’était même pas encore commencée, c’était à lui de mettre fin courageusement à la zizanie en leur disant qu’il n’est pas partant pour un second sacre. Il ne l’a pas fait et a laissé la pagaille économique, sociale et politique s’implanter. Le résultat est qu’il est lui-même pris aujourd’hui à son propre piège.

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Les femmes de beaucoup d’horizons mais toutes intéressés par sa victoire, croyant qu’il est pauvre au point de manquer de 10 millions de F CFA pour payer la caution constitutionnelle ont décidé récemment de cotiser et de la payer à sa place. Elles ignorent qu’ATT est plus riche qu’elles toutes mises ensemble avec leurs tribus et que si ce n’était qu’un petit problème de dix millions, même le planton de Koulouba peut acquitter cela en une nuit sans souci pour le lendemain.

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Le problème de la candidature d’ATT est en réalité plus caillou que coton. S’il ne respecte pas son engagement, il rendra compte aux négociateurs de 2002. D’où le mutisme actuel de Koulouba, les voyages et les déplacements multiples à l’intérieur et à l’étranger, d’où aussi souvent la mauvaise humeur du président quand ses affidés se font plus royalistes que le roi.

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Tiébilé Dramé a dit lors de la dernière conférence nationale du Parena (courant février 2007) que son salut est de ne pas demander un deuxième mandat. Il sait de quoi il parle et ATT ne doit pas écouter ses courtisans et ses laudateurs qui ne comprennent rien à rien, ne voyant que leurs seuls intérêts matériels et financiers immédiats. Il a déjà trop fait pour le Mali et ce peuple lui sera éternellement reconnaissant.

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Une première fois en mars 1991 il a mis fin aux boucheries organisées par Moussa Traoré et ses sbires, mieux il a réussi à organiser la conférence nationale et a dirigé la transition démocratique jusqu’aux élections présidentielles de 1992. Une seconde fois en 2002, quand le pays était au bord de l’incendie par le fait de ses propres fils, appelé par la conjecture, il a répondu présent et s’est montré à la hauteur.

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Un homme qui a été deux fois sapeur-pompier pour son peuple mérite de compter parmi les dignes fils du pays. Pour toutes ces raisons ATT ne doit pas se représenter en 2007 pour éviter de sortir par la petite porte. Pour toutes ces raisons, il doit courageusement suggérer à ses souteneurs de se présenter eux-mêmes au lieu de s’agripper à lui comme le font au bon nageur les gens sur le point de se noyer dans le fleuve.

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Yiriba

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