A l’issue d’une réunion tenue à leur siège le samedi dernier, les responsables du Comité Exécutif (CE) de l’Adema-PASJ ont approuvé la proposition de la Commission de bons offices d’investir Dioncounda Traoré comme candidat du parti à l’élection présidentielle de 2012. Hâtivement, les naïfs se sont mis à applaudir follement ; or, les antagonismes sont béants. Analyse.
Après de longues semaines de tractations et conciliabules, la Commission de bons offices de l’Adema-PASJ croit avoir trouvé un consensus autour de la candidature de Dioncounda Traoré. Pourtant, elle n’avait aucun moyen de camoufler les lézards sur les parois de la ruche.
Le samedi dernier, 23 juillet 2011, nous nous sommes retrouvés tous étonnés au siège de l’Adema-PASJ. Les cadres, hauts, très hauts et les tous petits militants contemplaient le visage rayonnant du Pr Dioncounda Traoré. Il lâche à tout vent un sourire contagieux. Petit bain de foule, accolades par-ci et par-là. Le tintamarre des laudateurs ne dérange personne. Dioncounda savait qu’il était là pour entendre dire qu’il est retenu comme candidat de consensus du parti. Et c’est vite fait. En salle, le président Oumarou Ag Ibrahim et ses collègues ne perdent pas de temps. Le vote se déroule sans enjeu. Le résultat est proclamé : les membres du Comité Exécutif ont approuvé à l’unanimité la proposition de la Commission de bons offices.
S’enchaîne la cohue des félicitations entre abeilles et frelons. Les sourires démagogues se mélangent aux accolades sincères. Marimantia Diarra, Secrétaire général du parti fait rapidement le protocole, histoire d’échapper aux indiscrets journalistes d’ailleurs laissés en rade. Chacun se précipite à s’engouffrer dans son véhicule faisant semblant de ne pas rater le congrès du RPM qui se tenait au CICB. Mais en réalité, chacun est parti pour ruminer en cachette son amertume, disons, certains.
On pense tout de suite à Zoumana Mory Coulibaly lancé à corps perdu dans la campagne pour Modibo Sidibé et qui brillait de sa présence sur les lieux. Motus bouche cousue ! Que pourrait-on lire sur les visages ?
Du mépris ? De l’ironie ? Du chagrin ou tout simplement du dégoût ?
Un peu de tout. Sa présence en elle seule voulait tout dire. Pour participer à la mascarade, il a tenu à jouer sur la même scène que ses ennemis sympathiques, pardon ses adversaires.
Nous avons approché Boubacar Ba dit Bill en chaude conversation avec Sora, un épieur venu de Koulouba. «Vous avez été témoins de ce qui s’est passé. Aidez-nous à faire comprendre au monde entier que l’ADEMA sait gérer ses contradictions internes, vous qui aviez crié au déluge». Quand il tenait ces propos, Bill était très sincère de croire que la messe à l’unisson a été dite. Son compagnon Sora nous fuit du regard et s’engouffre dans une 4X4. Son rapport est attendu à Koulouba.
Tous les autres candidats, Sékou Diakité, Iba N’Diaye, Marimantia Diarra étaient bien là, mais très discrets. La raison est toute simple. Le mot d’ordre était clair : ne laisser percevoir aucun signe de divergence.
Il a été respecté et à la lettre. Pourtant, ils avaient tous mal. Pourquoi ?
L’insulte de la Commission de bons offices
De tous les débats menés dans le cadre du consensus à trouver, c’est celui autour des critères de choix qui a le plus été houleux et à juste raison.
En effet, les critères proposés par la Commission constituaient une insulte pour certains candidats qui se sont vus exclus d’office.
Au niveau du sens des responsabilités, la Commission exigeait que les candidats soient moralement irréprochables dans la gestion administrative et financière. Ensuite, elle exigeait que les candidats ne soient pas concernés publiquement par un acte qui déshonore.
Or, au moins deux des candidats ont été au centre des affaires de mœurs pendant qu’ils occupaient des fonctions de responsabilité au sein du parti et même de l’Etat. «Il s’agit là de la vie privée des gens que par maladresse certains journaux ont cru normal de publier. En réalité chacun à son jardin secret. La Commission veut un saint. Il n’y a en pas à l’ADEMA», nous révèle un cadre mécontent.
Par rapport au second critère de bonne moralité dans la gestion des biens de l’Etat, plus de trois candidats sont épinglés dans différents rapports de contrôle. Les rapports sont bien disponibles et accessibles au public.
«Il n’y a pas de cadres ADEMA irréprochables sur ce plan. Ceux qui ont été Ministres, DG, PDG ou simple DAF sont incapables de montrer patte blanche», s’insurge un partisan d’un des candidats qui a requis l’anonymat. Mais, où donc allait la Commission, chercher un candidat blanc comme neige ?
En clair, il faut comprendre que la Commission a dû utiliser cette redoutable arme pour museler les autres candidats au profit de Dioncounda Traoré.
Pourtant, Dioncounda n’est pas dupe. Il sait bien que cette mise en scène ne vise rien d’autre qu’à le confiner et le contraindre à s’épuiser lentement avant le moment décisif. L’éclat de la mascarade emportera sans aucun doute de naïfs militants. Mais à la vérité, Dioncounda ne sera pas le candidat unanime. Ou du moins, il sera candidat pour quelques rares militants.
Abdoulaye NIANGALY