Le mardi 31 décembre 2013, en proclamant les résultats définitifs du second tour de l’élection des députés à l’Assemblée nationale à la faveur d’une cérémonie solennelle, la Cour constitutionnelle a mis fin à un suspens qui avait duré environ des semaines. Sur au total 129 requêtes qu’ils ont été amenés à examiner, Amadi Tamba Camara, président de la Cour, et ses huit autres collègues, statuant sur leur recevabilité tant dans la forme que dans le fond, en ont classé 79 irrecevables, rejetant plusieurs dizaines autres qu’ils ont jugées, pour l’essentiel, inopérantes ou mal fondées. Par ailleurs, dans certaines circonscriptions où il a jugé les irrégularités particulièrement importantes, le juge constitutionnel a procédé à l’annulation des voix dans certains bureaux de vote. Toute chose qui a donné lieu à des retournements de situation ahurissants, favorables au parti du Président de la République.
Coups de théâtre à Gao, Niono et Nara
Dans la cité des Askias, c’est finalement le Rassemblement pour le Mali (RPM) qui l’emporte face à l’alliance Adema/Asma-CFP qui avait été déclarée vainqueur avec près de 56% des voix, selon les résultats provisoires publié par le ministère de l’Administration territoriale. Toute chose qui est synonyme de naufrage pour un certain Assarid Ag Imbarcaouane dont plusieurs observateurs politiques qualifiaient jusque là d’inamovible au regard de sa longévité à l’Hémicycle. En effet, depuis des décennies, ce cadre du Pasj se faisait réélire dès le premier tour dans la circonscription électorale de Gao jusqu’en 2013 où la maison du peuple ne lui a pas souri.
Dans la zone Office du Niger, à Niono notamment, le léger fossé qui s’était creusé entre les Alliances Rpdm/ADP-Maliba et RPM/UM-RDA/Sadi s’est vu remblayer par les neufs sages. Ainsi, nantie de 50,11% des voix selon les résultats provisoires, les alliés du Rpdm et de l’ADP ont chuté au détriment de la seconde liste.
A Nara, le renversement de situation est aussi favorable au RPM. Arrivé second, selon les résultats provisoires avec 47,69%, le parti du tisserand s’est finalement adjugé les trois sièges de cette circonscription électorale avec 53,48% des voix face à la liste du groupement de partis Adema/ADP-Maliba. L’ancien directeur général de la police, Niamey Keita, peut ainsi compter sur un fauteuil à l’Assemblée nationale.
La mouvance présidentielle et la part du lion
S’il est vrai que les décisions de la Cour constitutionnelle sont insusceptibles de recours, il va donc sans dire que le chef de l’Etat, Ibrahim Boubacar Keita, est désormais sûr d’avoir une large marge de manœuvre pour mener à bien son projet pour le Mali. En effet, la mouvance présidentielle s’est taillée la part du lion au sortir de ces élections avec au moins 114 députés, dont 66 pour le seul Rassemblement pour le Mali et 16 pour l’Adema. Les partis qui se réclament de l’opposition se trouvent coincés autour d’une trentaine d’élus, alors que les indépendants s’en tirent avec 4 sièges. L’autre fait qu’il importe de souligner, c’est que le Pasj a dégringolé du statut de première force à l’Assemblée nationale à la troisième place sur 20 classés. L’URD qui devrait jouer les premiers rôles à l’opposition occupe toujours la deuxième place avec 17 sièges. Aussi, la montée en force des jeunes formations politiques, qui étaient d’ailleurs à leur première participation à des élections législatives, est remarquable. Il s’agit notamment des Fare de Modibo Sidibé qui devient la sixième force à l’Hémicycle avec 6 députés et de l’Asma de Soumeylou Boubèye Maïga, neuvième avec 3 élus. Aussi, faut-il déplorer le fait que la gent féminine n’a pu faire mieux que sous la dernière législature. De 15 représentantes, elle ne peut désormais compter que sur une dizaine de sièges en dépit des larmes que le gouvernement Oumar Tatam Ly, avait, à la veille des législatives, versées sur la situation politique des femmes.
A présent, la bataille pour le perchoir, qui s’annonce rude entre mastodontes de la mouvance présidentielle, reste le point essentiel qui attire l’attention des observateurs politiques. En attendant, il convient de rappeler que, entrés en fonction depuis le 1er janvier 2014, les honorables députés doivent être accueillis à l’Assemblée nationale à partir de ce matin.
Bakary SOGODOGO