La rébellion au Mali a commencé du 16 au 17 janvier 2012. Elle a provoqué la chute des trois régions du nord en passant par le massacre d’Aguelhok le 24 janvier 2012. Le 30 mars 2012 est la prise de la région de Kidal, le 31 mars 2012 est la prise de la région de Gao, le 1er avril 2012 est la prise de la région de Tombouctou et le 6 avril 2012 est la prise de la ville de Douentza (région de Mopti). L’attaque de Kona le 10 janvier 2013 a beaucoup traumatisé le peuple du Mali.
Dans cet ordre d’idées, s’ajoute la crise politique avec le renversement de régime. La mutinerie du 21 mars 2012 se termine par le départ du Président élu démocratiquement. Grace à l’intervention de la communauté internationale, un gouvernement transitoire et un Président intérimaire sont installés. Le 21 mai 2012, une date historique pour le monde entier, pour la première fois dans l’histoire un Président est sauvagement lynché dans son bureau présidentiel.
Le Mali a basculé entre deux à trois camps. Il s’agit des pro-juntes, des partisans du Premier ministre et des partisans du Président. A ce niveau les forces de l’ordre et les partis politiques n’ont pas hésité à se diviser entre les trois camps.
Le Mali a également plongé dans la cherté de la vie c’est-à-dire la crise économique. L’argent se fait de plus en plus rare pour le citoyen lambda.
En 1992, le Mali est entré dans le concert des nations démocratique. Le père fondateur de la démocratie au Mali est le Président Amadou Toumani TOURE avec l’avènement de la démocratie dans la plupart des Etats africains. Cette démocratie entretenue pendant des années fut confrontée à des crises sécuritaire et politique.
Le multipartisme et la liberté d’opinion ont beaucoup progressé de 1992 jusqu’à la mutinerie du 21 mars 2012.
Notre thème est « Dialogue politique entre les partis pour une élection démocratique apaisée ».
Il s’agit de faire en sorte, dans ce thème, que les partis politiques aillent aux élections sans crise, sans conflit et sans mésentente conformément aux règles du multipartisme et de la démocratie.
Ce thème propose un schéma qui conduira les partis politiques à la paix. Il ne traite pas les crises politique et sécuritaire au Mali.
Nous élaborons ce thème en quatre points : le projet de société des partis politiques (I), la sensibilisation partisane des enjeux démocratiques (II), le respect des urnes (III) et la réconciliation nationale du Président élu démocratiquement (IV)
I – Le projet de société des partis politiques :
Le parti est un groupement de citoyen ayant librement décidé de s’associer sur la base d’une vision fondamentalement homogène de la société et de la gestion de la vie nationale en vue de mener une action politique. Il a vocation de conquérir, d’exercer et de conserver le pouvoir. Il anime la vie politique nationale à travers son programme, ses prises de position, le recrutement et la formation des militants, la promotion des valeurs incarnées par son projet de société, l’information et mobilisation de l’opinion publique autour de ses visions.
Le parti se distingue par une orientation idéologique à partir de laquelle se forme sa vision de la société, son projet de société et de la gestion de la vie nationale. Il se distingue également par un programme général ou un programme de gouvernement. Le programme reflète le projet de société en ceci qu’il fixe ou présente les étapes et actes qui conduiraient vers un tel type de société. Le programme fixe les priorités du parti dans divers domaines de la vie nationale, présente les problèmes à résoudre, de même que le mécanisme et les moyens de leur résolution.
Le particularisme des élections de 2013 nécessite pour les partis politiques de prendre en charge dans les différents projets de société les questions telles que : la pacification du pays, l’union entre les maliens, la stabilisation et la reconstruction et surtout la réconciliation nationale. Le jeu démocratique doit être apaisé et exempt de tout conflit.
A – La pacification du pays :
Les partis politiques doivent éviter de tomber dans la prédation comme disait Dominique DARBON, dans le néopatrimonialisme comme disait Jean François MEDART, dans la politique du ventre comme disait Jean François BAYART et dans le clivage de l’ethnicité comme disait Maurice ENGUELEGUELE. Ils doivent jouer le rôle de pacificateur. Car toute formation politique doit aspirer à ce qu’il ait une paix nationale. La paix est le seul garant du multipartisme et de la démocratie.
Le projet de société des partis politiques doit contenir une très bonne stratégie de paix nationale capable de sortir le Mali de cette situation.
B – L’union entre les maliens :
Les partis politiques, dans leurs projets de société, doivent œuvrer à ce qu’il ait l’union entre les maliens. Ils doivent faire en sorte que le peuple malien soit un et indivisible. Aujourd’hui, le Mali a besoin de « pardon » comme on l’a vu avec le Président Dioncounda TRAORE. Les maliens doivent laisser de coté leurs différends tout en acceptant de se pardonner et de devenir uni pour le Mali.
Le projet de société des partis politiques doit prévoir un gouvernement d’union nationale. Car le Mali a besoin de toutes les énergies pour se maintenir débout. Une union nationale consiste à former un gouvernement composé de plusieurs couleurs politiques qui s’accordent sur des priorités, des grandes lignes d’actions sortant des attitudes partisanes. L’union nationale sert à mobiliser toutes les forces du pays.
C – La stabilisation et la reconstruction :
La stabilisation est d’ordre socio-économique. Après la guerre, la phase de stabilisation est importante et prioritaire. Le peuple doit coopérer avec le gouvernement pour baisser la violence dans certaines localités et empêcher les complots visant à déstabiliser le pays. Les changements positifs dans le secteur privé et les mesures pour renforcer son développement permettent une stabilisation économique. Les cas de l’Irak, de l’Afghanistan et de la Libye nous démontrent l’importance de la stabilisation au Mali.
La reconstruction consiste à refaire les édifices et les endroits gâtés sous l’effet du conflit armé. Il s’agit pour les partis politiques d’avoir un meilleur programme de reconstruction nationale.
Le projet de société des partis politiques doit prendre en compte la stabilisation et la reconstruction.
D – La réconciliation nationale :
La réconciliation nationale est un processus d’acceptation et de déculpabilisation dans l’opinion publique d’une nation, après un épisode honteux de l’histoire récente du pays. Elle permet aux victimes de s’exprimer publiquement et invite les auteurs d’exactions à reconnaître leurs actes. Démarche collective forcément douloureuse et politiquement périlleuse, la réconciliation nationale a connu un de ses exemples les plus aboutis dans l’Afrique du sud de la transition démocratique soutenue par le Président Nelson Mandela.
Le Mali a besoin de la réconciliation nationale qui doit être prise en compte dans le projet de société des partis politiques.
II – La sensibilisation partisane des enjeux démocratiques :
Les partis politiques doivent sensibiliser leurs partisans sur les différents enjeux de la démocratie. Au Mali la démocratie est mal comprise. La population majoritairement analphabète ne comprend pas la notion de la démocratie. Cette sensibilisation revient aux partis politiques et aux différents groupes d’opinion ou la société civile. Parmi les enjeux de la démocratie on peut citer : la citoyenneté, la liberté d’opinion, le vote comme seul moyen d’accéder au pouvoir, le respect des autorités et des institutions.
A – La citoyenneté :
Etymologiquement citoyen vient du latin civis, celui qui a droit à la cité. La citoyenneté est l’état ou la qualité de citoyen. Elle permet à un individu d’être reconnu comme membre d’une société, d’une cité, ou d’un Etat et de participer à la vie politique.
La citoyenneté est le statut juridique qui permet à un individu de devenir citoyen. Elle donne accès à l’ensemble des droits politiques, tout en créant des devoirs, permettant de participer à la vie civique d’une société ou d’une communauté politique, par opposition au fait d’être simple résident. En général la citoyenneté est liée au droit de vote.
B – La liberté d’opinion :
La liberté d’opinion est la liberté de se faire une opinion sur n’importe quel objet, de la diffuser et de recevoir celle d’autrui. Elle a deux justifications à la fois morale et politique. Elle est nécessaire à la personne et aussi à la société.
La liberté d’opinion a été affirmée solennellement dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 aout 1789 et fait l’objet de l’article10. Elle signifie que toute personne est libre de penser comme elle l’entend ou d’avoir des opinions contraires à celle de la majorité. La déclaration de 1789 précise d’ailleurs que cette liberté d’opinion s’étend à la liberté religieuse, chacun étant libre d’adopter le culte de son choix, ou de n’en adopter aucun.
C – Le vote comme seul moyen d’accéder au pouvoir :
Le droit de suffrage ou droit de vote est le droit accordé à un citoyen d’un Etat pour lui permettre d’exprimer sa volonté lors d’un scrutin.
En démocratie le droit de vote est l’un des droits fondamentaux. Le vote fait partie d’un processus qui prend le nom de scrutin ou d’élection.
Le vote est le seul moyen d’accéder au pouvoir dans la démocratie.
D – Le respect des autorités et des institutions :
L’une des exigences de la démocratie est le respect des autorités et des institutions. Le non respect de ces dernières met en péril le processus démocratique. Les présidents issus des élections démocratiques doivent être accompagnés durant leurs mandats. Quel qu’en soit le degré de mécontentement, cela ne doit pas affecter leurs mandats.
III – Le respect des urnes :
Respecter les urnes fait partie des exigences de la démocratie. Le non respect peut conduire le pays dans la crise ou conflit. On a vu avec plusieurs pays tels que : le Kenya, le Zimbabwe, la Cote d’Ivoire etc. Dans ces pays le résultat des urnes a été contesté causant un conflit armé. Plusieurs personnes ont laissé leurs vies lors de ces conflits.
Au Mali pour éviter une situation chaotique les partis politiques doivent respecter le résultat des urnes.
IV – La réconciliation nationale du Président élu démocratiquement :
La situation actuelle du pays exige à ce que le nouveau Président du Mali travaille beaucoup plus sur la réconciliation nationale. Cette réconciliation est le seul moyen de maintenir la paix, l’union et la stabilité du pays.
En conclusion les maliens doivent se donner la main pour le « pardon ». le pays a beaucoup souffert et seul le « pardon » peut nous sortir de la souffrance.
Bamako le 21 mai 2013
SISSOKO Ibrahima K.
Politologue
Auteur du livre « Le Mali en direct, Président Dioncounda TRAORE : un ange de Dieu»