Déclaration liminaire
La Convention Nationale pour une Afrique Solidaire-Faso Hèrè (CNAS-Faso Hèrè) et la Convention Nationale des Associations de Soutien à Soumana Sako (CNAS) expriment à nouveau leur vive préoccupation face à la crise créée dans le Nord de notre pays par les attaques de rebelles regroupés sous la bannière du MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad) contre des cibles gouvernementales (camps et casernes des Forces Armées et de Sécurité, antennes de communication, etc.) et de paisibles populations civiles.
Elles condamnent sans réserve les hordes apatrides qui, loin d’être des représentants légitimes du groupe ethnique pour la «libération» duquel elles prétendent lutter, ont pris la lourde responsabilité de retourner leurs armes contre leur patrie, notre patrie à nous tous, le Mali et créer un grave problème humanitaire affligeant des milliers de nos compatriotes refugiés ou déplacés internes et affectantla Nation malienne tout entière.
La CNASetla CNAS-Faso Hèrèrenouvellent leurs condoléances les plus émues aux familles des militaires et civils ayant perdu la vie ainsi que leurs vœux de prompt rétablissement aux blessés.
Elles expriment leur solidarité agissante avec nos compatriotes refugiés ou déplacés internes et condamnent fermement tous actes de représailles ou de brimades perpétrés sur une base ethnique ou en fonction de la couleur de l’épiderme.
La CNASetla CNAS-Faso Hèrèréaffirment leur soutien sans faille aux Forces Armées et de Sécurité dans l’exécution de leur noble mission de défense de l’intégrité territoriale du Mali et de protection des personnes et des biens.
Elles estiment que toute recherche de solution durable à la crise actuelle doit être axée sur trois principes sacro-saints :
a) la préservation de l’intégrité territoriale et de l’unité nationale ;
b) la préservation et l’approfondissement du processus démocratique ; et
c) la consolidation de l’ordre politique et institutionnel issu dela Révolutiondu 26 mars 1991.
La CNAS et la CNAS-Faso Hèrè déclarent :
La CNASetla CNAS-Faso Hèrèdéclarent que toute recherche de solution à la crise sévissant dans le Septentrion doit reposer sur une analyse objective de la nature et de l’origine de ladite crise. A cet égard, elles estiment que la douloureuse situation à la quelle le Nord de notre pays se trouve confrontée résulte de la sédimentation et de l’enchevêtrement de plusieurs facteurs, savoir :
1. des éléments de survivance de l’irrédentisme touareg, sur fond de mythes de «supériorité raciale» tirée de la couleur de la peau ou des yeux, fomenté en marge du processus de décolonisation, notamment à la faveur du projet de création par l’ex-puissance coloniale de l’Organisation Commune des Régions Sahariennes (OCRS) devant servir ses intérêts géostratégiques (zone d’essais nucléaires, pétrole, gaz, etc.) ;èrè
2. la politique laxiste et de compromission du Gouvernement (en écho à la libération opportuniste et sans principe après le coup d’Etat de novembre 1968 des meneurs de la rébellion des années 1960) ayant conduit à l’utilisation du Septentrion malien comme sanctuaire et base d’opérations par la nébuleuse AQMI (constituée principalement mais non exclusivement d’éléments issus des ex-GIA et GSPC algériens) d’une part, et d’autre part, par divers réseaux locaux et internationaux de trafiquants en tous genres (drogues, armes, êtres humains, marchandises diverses ,etc.), toutes choses ayant contribué à donner du Mali l’image peu flatteuse de «ventre mou» ou de «maillon faible» de la lutte antiterroriste dans la bande sahélo-saharienne. A cet égard, il est à noter que ces différents réseaux de trafiquants servent de terreau de recrutement et de sources de financement pour divers groupes irrédentistes et/ ou terroristes bénéficiant manifestement de compromissions actives ou passives à l’intérieur comme à l’extérieur ;
3. la grave erreur d’appréciation commise par le Gouvernement vis-à-vis des combattants Touareg «d’origine malienne» revenant de Lybie et qui, contre toute logique militaire et en violation des lois de la République, ont été autorisés à franchir nos frontières sans que les autorités aient pris le soin de les désarmer au préalable, de les cantonner et de les «filtrer» ;
4. la politique d’accompagnement aveugle et sans principe adoptée par la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale, laquelle, soucieuse de préserver ses privilèges et de conserver ses chances de voir «le dauphin adoubé» sortir de ses rangs, a laissé le Président dela République conduire une gestion solitaire et à courte vue des divers épisodes de la crise dans le Septentrion malien ;
5. la gestion chaotique des recrutements, promotions, grades et autres phases successives d’intégration /désertion /réintégration de divers éléments rebelles /bandits armés au sein des Forces Armées et de Sécurité où le népotisme, l’affairisme et le charlatanisme l’emportent souvent sur l’impérieuse nécessité d’en améliorer les capacités opérationnelles d’alerte précoce préventive et d’intervention rapide (troupes aguerries et motivées, équipements et matériels adaptés, logistique, moyens aériens, encadrement officier, renseignement etc.) ;
6. les contradictions internes à certaines tribus sahélo-sahariennes encore sous la coupe réglée de certaines féodalités traditionnelles qui, même en cette ère démocratique et à l’heure de la mondialisation, ont réussi à perpétuer leur mainmise aux dépens de toutes velléités de changement et de transformations socio-économiques pouvant bénéficier à la majorité desdites populations, notamment les franges jeunes ;
7. le jeu complexe et souvent trouble et troublant de certaines puissances sous régionales et extra-africaines dont les priorités changeantes les inclinent souvent à supporter toute force organisée susceptible de «suppléer» à la carence du Gouvernement malien dans la lute contre les terroristes d’AQMI, avec ou sans remise en cause de l’intégrité territoriale de la République du Mali. A ce sujet, il convient de noter la récente déclaration de l’envoyé d’une puissance extra-africaine appelant à l’ouverture de négociations qui n’écarteraient aucun «sujet tabou» (sous-entendu, la sécession et l’indépendance).
En conséquence de ce qui précède, le Septentrion malien est devenu à la fois un panier à crabes, une zone de non-droit et une poudrière dont les premières déflagrations menacent sérieusement d’ébranler les assises de l’intégrité territoriale et de l’indivisibilité dela Républiquedu Mali dans ses frontières internationalement reconnues et font planer une grave hypothèque sur la poursuite normale du processus démocratique dans notre pays.
Dès lors,la Convention Nationaledes Association de Soutien à Soumana Sako (CNAS) etla Convention Nationalepour une Afrique Solidaire- Faso Hèrè (CNAS-Faso Hèrè) affirment ce qui suit :
A) Recherche de solution durable
La recherche de toute solution durable à la crise du Septentrion malien doit reposer sur une stratégie multidimensionnelle dynamique intégrant harmonieusement et de façon mutuellement complémentaire :
1. le renforcement des capacités de dissuasion et d’intervention militaire et sécuritaire des Forces Armées et de Sécurité sur base d’une double stratégie de i) position, consistant à tenir et à sécuriser les axes routiers et pistes ainsi que les localités et autres centres de peuplement humain et d’activités économiques licites (tourisme, etc.) ou de regroupement du cheptel et ii) de mouvement, pour contrer les tactiques rebelles et/ou terroristes de coups de main et de harcèlement.
Dans ce contexte, il convient de s’assurer que l’action des forces Armées et de Sécurité s’inscrive et se déroule dans le strict respect des Conventions de Genève et du droit humanitaire international. En dehors de programmes bien ciblés d’assistance matérielle, de formation ou de soutien en moyens aériens et en renseignements, l’action militaire et sécuritaire doit exclure toute présence ou participation de troupes terrestres étrangères ;
2. la poursuite du dialogue politique mais dans la fermeté et avec esprit de suite avec tous les groupes locaux organisés ou non en vue de rechercher les formes les plus poussées de décentralisation/libre administration des collectivités/ déconcentration territoriale compatibles avec le maintien de l’autorité de l’Etat national central sur toute l’étendue dela République (y compris à travers la présence de l’ensemble des composantes des forces armées et des Sécurité). A cet égard, il convient d’éviter toute forme de gouvernance locale à base ethnique ou qui renforcerait les féodalités tribales ;
3. l’adoption et la mise en œuvre d’une offensive diplomatique en direction des pays voisins et autres puissances africaines ou non-africaines visant à démasquer et isoler les groupes rebelles ou terroristes et leurs alliés ou soutiens intérieurs et extérieurs et à couper leurs sources d’approvisionnement (armes, argent, renseignement, etc.) ainsi que leur relais politiques et médiatiques.
Tout accord, y compris un éventuel cessez-le-feu, doit être signé au Mali, que des puissances ou personnes-ressources étrangères y aient contribuée ou non. A cet égard, tout en reconnaissant les dimensions et ramifications sous-régionales et internationales de la crise dans le Septentrion,la CNASetla CNAS-Faso Hèrèmettent en garde les autorités contre les dangers inhérents à toute tentative d’internationalisation de la gestion de ladite crise. Les auteurs des crimes de guerre commis à Aguel Hoc doivent être poursuivis et traduits devant la justice malienne ;
4. la poursuite de la mise en œuvre des Projets et programmes de développement et d’assistance dans un environnement sécurisé et dans les conditions idoines de transparence tout en brisant le cercle vicieux qui voit des éléments irrédentistes /terroristes semer l’insécurité pour bloquer la mise en œuvre des actions de développement et s’en servir pour décrier l’absence de tout progrès dans les zones concernées ;
5. l’audit de l’emploi fait de tous les fonds d’origine interne ou externe déployés en appui aux projets et programmes de développement et d’assistance ou en accompagnement /facilitation des initiatives de paix ;
6. des enquêtes sérieuses sur toutes les complicités nationales ou locales impliquées dans la protection et l’approvisionnement des terroristes et autres rebelles ainsi que dans le blanchiment (transactions immobilières et autres) de l’argent sale issu des trafics en tous genres écumant la zone sahélo-saharienne ;
7. la conception et la mise en œuvre de programmes de communication nationale et sociale visant à calmer les passions, à condamner toute stigmatisation et à circonscrire l’espace de la rumeur publique, à magnifier la richesse et la force que représentent la diversité et le brassage ethniques et culturels et à renforcer les bases sociales et socio-affectives de la cohésion et de la concorde nationales. A cet égard, il convient de souligner que non seulement tous les Touaregs ne sont pas des rebelles/terroristes réels ou virtuels, mais aussi tous ces rebelles/terroristes ne sont pas que des Touaregs. Les auteurs des brimades et des campagnes de stigmatisation doivent être poursuivis et punis conformément aux lois en vigueur ou à adopter ;
8. mener une communication de clarification tendant à rassurer les cadres issus de groupes ethniques de la zone tout en fustigeant les «fuites» et autres «retraits» précipités de certains hauts responsables de l’Etat, toutes choses ayant contribué à accréditer la thèse non fondée d’une chasse ethnique à l’homme et à alimenter la propagande des milieux rebelles ;
9. dans le même temps, l’Etat doit veiller à une application stricte des règles de la discipline et de la justice militaires à tous déserteurs, y compris ceux marqués par la circonstance aggravante d’avoir rejoint les rangs des rebelles et/ou des terroristes.
10. il revient à l’Etat de prononcer la déchéance de leurs droits civiques et politiques ainsi que de leurs mandats électifs à l’encontre de tous élus ayant rejoint ou favorisé les groupes rebelles et/ou terroristes ;
11. l’assistance humanitaire et divers programmes de compensation et de compassion en direction des familles des victimes civiles (y compris celles ayant fait l’objet de brimades, d’exactions ou de destruction des biens sur une base ethnique) et militaires, des refugiés et des déplacés internes, à financer en partie par le reversement à l’Etat de l’aide publique aux partis politiques au titre de l’exercice 2011 (liquidée en 2012).
B) Initiative de partis politiques
Toute initiative de partis politiques doit être inclusive de toutes les forces politiques et sociales et ne pas se limiter aux seuls partis de l’actuelle majorité parlementaire. Au demeurant, cette dernière est totalement disqualifiée car i) elle est restée muette, inactive, passive et consentante pendant le double quinquennat écoulé et, nonobstant ses prérogatives constitutionnelles, n’a jamais brillé par sa capacité autonome de réflexion, d’initiatives ou de contrôle de l’action gouvernementale à fortiori de vote responsable par rapport à des questions d’intérêt national aussi vitales que la réforme constitutionnelle ou le code des personnes ; ii) le «Plan» qu’elle a concocté ressemble plus à une litanie d’actes d’incantation et de palabres qu’à une stratégie cohérente, crédible, opérationnelle et efficace de sortie de crise et iii) le mandat de l’actuelle Assemblée Nationale expire dans six mois environ (soit à peine trois mois après la fin du second et dernier mandat de l’actuel Président dela République) et il y a fort à parier que la configuration politique du futur Parlement sera tout sauf une copie certifiée conforme de l’actuel Parlement.
C) Compatible avec le calendrier électoral
Toute recherche de solution politique durable à la crise dans le Septentrion doit être compatible avec le respect d’un calendrier électoral (scrutins présidentiel et législatif), conforme à la lettre et à l’esprit dela Constitutiondu 12 janvier 1992 et écarter toute demande de démission du Président dela Républiqueet du Gouvernement.
A cet égard,la CNASetla CNAS-Faso Hèrèsont d’avis que, à l’heure actuelle, les conditions politiques et matérielles d’un scrutin présidentiel et législatif transparent et crédible ne sont pas réunies, comme en témoignent, à titre d’illustration, la conduite chaotique et illégale de la dernière révision annuelle des listes électorales (octobre-décembre 2011), l’absence d’un système fiable d’identification des électeurs et de distribution des cartes d’électeurs et la non disponibilité d’un fichier électoral exhaustif et transparent.
Tout en étant consciente de ce que des élections non transparentes et mal organisées pourraient dégénérer en une crise postélectorale aux dimensions et aux conséquences imprévisibles,la CNASetla CNAS-Faso Hèrèestiment que le renvoi des élections présidentielle et législatives au delà des délais constitutionnels ou une éventuelle vacance de l’institution Président dela Républiqueprésentent des risques plus gros encore pour la poursuite et la sauvegarde du processus démocratique et ajouteraient de nouveaux éléments d’incertitude à une situation politico-militaire déjà suffisamment confuse et préoccupante sans que l’on ne voie se dessiner, à l’appui, une alternative institutionnelle fiable, crédible et légitime dans le cadre dela Constitution.
La CNASetla CNAS-Faso Hèrèestiment que la solution durable à la crise dans le septentrion malien ne peut être le fait que d’un Gouvernement fort qui tire toute sa force certes de la qualité intrinsèque des hommes et des femmes au gouvernail, mais aussi et surtout de la légitimité populaire que confère un scrutin crédible et transparent. A cet égard, il convient de noter qu’un Gouvernement dit d’Union Nationale, autrement dit un Gouvernement des partis (lesquels, qui inclure, qui ne pas inclure et sur quels critères, etc. ?) n’est pas fondamentalement de nature à faire face de façon cohérente, solide et durable aux défis majeurs que posent la crise dans le Septentrion et la recherche de solutions aux autres menaces à la paix et à la cohésion nationales (famine, cherté de la vie, école, chômage, corruption, etc.).
D) Assurer la crédibilité des scrutins présidentiel et législatif
Afin d’assurer une plus grande crédibilité aux scrutins présidentiel et législatif,la CNASetla CNAS-Faso Hèrèrecommandent vivement qu’il soit procédé à une révision exceptionnelle des listes électorales et à l’instauration d’une semaine citoyenne pour la distribution gratuite des cartes d’identité et la remise transparente des cartes d’électeurs à leurs titulaires réels (soit à domicile ou sur l’emplacement même du bureau où l’électeur doit voter).
Au-delà des prescriptions constitutionnelles en la matière,la CNASetla CNAS-Faso Hèrèestiment que le Président dela Républiqueet son Gouvernement doivent renoncer définitivement à leur projet de reforme constitutionnelle car, en ces moments d’épreuves et d’incertitudes pesant sur l’avenir unitaire de l’Etat, il convient d’écarter tout facteur de division dela Nation. Or, le référendum envisagé en est un par excellence.
Au surplus, l’économie budgétaire qui résulterait de son annulation conforterait les finances publiques à un moment où l’effort de guerre et la recherche de solutions à la menace de famine et aux autres composantes de la demande sociale largement insatisfaite mettent à rude épreuve le Trésor public.
E) Approche prospective
Dans le cadre d’une approche prospective, les réalités et les exigences d’une action militaire et sécuritaire prolongée sur le terrain devraient inciter le Gouvernement à adopter une politique proactive quant à l’impact de la crise et de l’effort de guerre sur les finances de l’Etat et l’économie nationale en général, y compris sous le rapport de l’approvisionnement en vivres, en hydrocarbures et autres produits et services de première nécessité.
F) Propositions
La CNASetla CNAS-Faso Hèrèengagent le Gouvernement à observer la plus grande transparence dans sa politique de communication avec l’opinion publique nationale et internationale dans toute la mesure compatible avec la sécurité de l’Etat et celle des troupes engagées dans les opérations d’ordre militaire ou sécuritaire sur le terrain.
La promotion de l’unité nationale en ces temps de graves périls sur l’intégrité du territoire ne doit pas servir de prétexte au Gouvernement pour instaurer la censure ou inciter à l’autocensure dans les média publics ou privés, quitte à faire observer par ceux-ci le respect strict de la déontologie et des textes pertinents en vigueur.
Bamako, le 23 février 2012
Le Bureau Politique National de la CNAS-Faso Hèrè
Le Bureau National Provisoire de la CNAS