Il y a quelque semaines, l’ex-président Moussa Traoré gracié mais non amnistié (sauf erreur de notre part ) était consulté par une délégation de médiateurs ouest-africains dirigée Albert Tévodjiré, puis par le président nigérian Goodluck Jonathan.
Bien avant cela, de nombreux Maliens ont fait amende honorable de l’injustice avec laquelle ils avaient traité le sage des bords du Djoliba. Le coup d’Etat du 22 mars avait suscité un engouement populaire indéniable et il a fallu les menaces conjuguées de la CEDEAO, de la France, de l’Union européenne, de l’Union africaine pour obtenir le rétablissement de la constitution de 1991. Le refus héroïque du peuple se couchant sur l’aérodrome pour empêcher les avions des présidents de la CEDEAO d’atterrir à Bamako est une opposition sans équivoque au retour du régime déchu.
Les deux rétablissements
Dès lors, le rétablissement de la constitution du 20 avril s’imposait, du moins à travers le respect des militaires qui l’avaient amenée et du peuple immense qui l’avaient soutenus. Ce qui fut fait, il faut en rendre Hommage à la CEDEAO . Ainsi, un comité de Redressement de l’armée dirigée par le Capitaine AMADOU Haya Sanogo a été créé, auquel le président du haut conseil des collectivités a rendu hommage dans son discours du 7 novembre.
Le président Amadou Toumani Touré a été forcé de démissionner le 8 avril, alors qu’on eût pu simplement prendre acte de la fin de son mandat. C’était la faillite de la Troisième République dite démocratique. Depuis, les maliens cherchent une solution à leurs pays.
La 1ère République
Ils sont nombreux, ceux qui évoquent avec nostalgie ou pour en avoir entendu parler, le régime de Modibo Keïta, lui attribuant les seules vraies réalisation économiques du pays ainsi que la défense sans équivoque de l’intégrité territoriale, la préservation de la dignité du Malien sur la scène africaine et internationale .
Une figure de cette tendance est le Docteur Daba Diawara, chef d’un parti modibiste, mais aussi rédacteur du projet de constitution que le président Amadou Toumani Touré préparait. On peur aussi citer l’infatigable, l’icône Amadou Traoré di Amadou Djicoroni, fidèle parmi les fidèles de l’option socialiste. Enfin, on n’oubliera pas le Docteur Seydou Badian un témoin précieux des 50 ans d’indépendance du Mali. Certains ont disparu, comme les Docteurs Demba Diallo, et Mamadou El Bachir GOLOGO, tandis que les Professeurs Mahamadou Doucouré et Victor Sy sont à la retraite. Le point commun à tous ces patriotes, à tous ces héros, est d’avoir milité sans répit pour leur idéal socialiste et surtout, d’avoir constitué un véritable Front du Refus d’intégrer l’ADEMA.
La 2ème République
Elle a été précédée de 10 ans de régime d’exception interdisant toute activité politique ou politicienne. C’est, il faut le reconnaitre, une époque dont nombre de nos compatriotes se souviennent avec un regret à peine dissimulé, c’était en tout cas l’âge d’or de l’affairisme. Puis le comité militaire de libération nationale se sabordait, mettant fin à dix ans de dissensions interne qui se sont tragiquement terminées et dont le jeune lecteur aura écho dans transfert définitifs de feu Colonel Souleymane Dembélé récemment disparu. La deuxième République, fondée sur la constitution de 1979 instituant le parti unique De l’union Démocratique du peuple Malien, a été pourtant la digne héritière de la 1ère République, dont elle a conservé le Système de parti unique et le caractère socialiste, notamment par l’emprise de l’Etat sur l’économie. En outre, elle a été déclarée démocratique par la cour Suprême du Mali (lors des derniers vœux de nouvel an au chef de l’Etat), par George Bush ( le père ) qui avait invité le président Moussa Traoré à New York en 1990, par la CEDEAO ,qui lui avait décerné une médaille . Quant aux mesures d’austérité budgétaire (avec pour conséquence le Chômage massif des jeunes) qui avaient rendu le régime si impopulaire qu’on lui attribue tous les divorces de l’époque, elles étaient édictées par le FMI et la Banque mondiale. Ces mesures sont de la même nature que celles imposées à la Grèce et à l’Espagne par l’UE. Un mot sur Mitterrand, le tombeur de Moussa Traoré, le démocrate de la baule. Il a été ce Mitterrand, le ministre de l’intérieur (de la guerre en fait) pendant la guerre d’Algérie.
C’est encore lui qui était aux affaires quand on écartait le Front Islamique du salut en Algérie, lors qu’il avait gagné les élections. L’attentat contre le navire civil Greenpeace, c’est lui. La répression sanglante du mouvement indépendantiste, le soutient de la 3ème République malienne, qui dit aux Alpha et aux ATT de tout faire pour empêcher Moussa Traoré d’organiser le multipartisme qui venait d’être accepté dans toutes les cellules de l’UDPM. Celui –ci devait être renversé par un coup d’Etat militaire, à deux jours du congrès de l’UDPM, après que Bamako et certaines capitales régionales eussent été mises à feu t à sang par une foule excitée et des mercenaires dont l’histoire en cette période de rébellion reste à éclaircir. L’auteur du coup d’Etat, le chef de la grande présidentielle, un certain ATT, qui vient d’être renversé à quelque jours de la fin de son mandat par la garnison de Kati en colère. Ne faudrait-il pas y avoir la main de Dieu ?
La 3e République
Bien avant sa chute, elle a été l’objet de nombreuses critiques de la part de ses propres fondateurs. Certains diront que c’est cela la démocratie. D’autres s’interrogeront plutôt sur le sens de la centaine de partis politiques, des changements quotidiens de partis pour raison d’ambition strictement personnelle, alors qu’aux Etats-Unis ou en Grande Bretagne, il n’y a guère plus de trois partis ! ATT (et avant lui Alpha) avait fini par être considéré comme un homme mis en place par l’extérieur. Une preuve : IBK, qui devait succéder à Alpha, conforment à la démocratie intérieure de l’ADEMA a été écarté et jeté en pâture à une presse considérée comme vénale, au lieu d’être démocratique. Une autre preuve : la constitution institue « un multipartisme intégral », mais une loi organique, la charte des partis, interdit les « partis religieux », qui pourtant ne sont pas interdits dans les grandes démocraties prises comme modèles (Etats-Unis, France, Grande Bretagne…). Tel est aussi le cas du Code de la famille, loi constitutionnelle visant à abolir la famille traditionnelle, qui n’est heureusement pas passée. Le fait que l’AMUPI disgraciée ait été remplacée par un Haut conseil Islamique grassement payé n’a pas empêché ce dernier de remplir son rôle de défenseur des valeurs de l’Islam dans le domaine de la famille. Que l’Imam Dicko, appuyé par le chérif de Nioro et Ousmane Chérif Madani Haïdara, ait rempli par trois fois le stade du 26 mars pour rejeter un Code qui lui était si cher, depuis les deux mandats d’Alpha, est un désaveu retentissant, une motion de défiance du peuple à l’endroit de ce régime qui se voulait pourtant démocratique. Ousmane Sy, un élément central du régime de la Troisième République, reconnaîtra le 10 novembre 2012 au Club de la presse de Radio Kledu , que « la crise a révélé la faible légitimité de nos institutions », tandis que le Pr Abdou Traoré alias Diop, président du collectif Janvier Noir, dira, en parlant de l’occupation du Nord, que « les crises du Nord ne sont que l’aboutissement de la mauvaise gouvernance, de la gabegie, du clientélisme et de la corruption érigée en système de gestion, qui ont fini par gangrener toutes les institutions de l’Etat, y compris l’institution militaire qui, par contrecoup, ne dispose ni de ressources humaines ni de moyens matériels nécessaires à l’accomplissement de ses missions républicaines » (« Le Progrès », hebdomadaire malien, du 30 avril au 5 mars 2012). C’est dire que c’est elle la cause de tous nos malheurs actuels. Pour son honneur, ses partisans ne devraient en aucune manière boycotter les concertations nationales envisagées pour fédérer toutes les forces des trois Républiques. Sinon, nous tomberions tous ensemble, a averti le Premier ministre Dr Cheick Modibo Diarra, dans son adresse à la nation du 10 novembre 2012.
Ibrahima KOÏTA