Sans Tabou: massacre de Bandiagara, ayons le courage des mots

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‘’Bandits armés’’, ‘’attaque terroriste’’, la communication officielle barguigne et finasse quand il faut appeler un chat un chat. En effet, dans son communiqué, le Gouvernement de la Transition informe l’opinion nationale et internationale que des « bandits armés non identifiés ont attaqué et incendié le camion transportant des forains à mi-chemin entre le village de Songho et la route bitumée ». Il parle de « bandits armés », en se gardant soigneusement de parler de terroristes. Mais quand des psychopathes allument un camion (un bus ?) civil bondé de forains, dont le seul tort est de braver les routes à la quête de leur pitance, il y a-t-il un autre qualificatif pour eux sinon celui de « terroriste » ? Le terrorisme étant en français facile, selon Wikipédia, l’emploi de la terreur à des fins idéologiques, politiques ou religieuses. L’on est bien dans l’une de ces trois catégories, si ce ne sont les trois en même temps.

D’ailleurs, il ne manque pas de s’en mêler les pinceaux et de battre la coulpe par la même occasion puisque dans le même communiqué, « le Gouvernement du Mali salue les efforts déployés par les forces armées de défense et de sécurité du Mali (FAMa) dans la lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes ». Même s’il procède par analogie et insinuation, il lui est impossible de tronquer les faits, en niant qu’il s’agit bien d’une « attaque terroriste ».

Le décret N°2021-0885/PT-RM du 4 décembre 2021 déclarant un deuil national du président de la Transition, lui, est des plus explicites : « un seuil national de trois (03) jours, à compter du dimanche 05 décembre 2021 à zéro heure, est déclaré sur toute l’étendue du territoire national en hommage aux victimes de l’attaque terroriste perpétrée entre Songho et Bandiagara ».

Notre communication officielle n’en est pas à sa première aberration quand elle s’approprie les expressions prêt-à-porter et galvaudées des autres de « présumés jihadistes » quand bien même ces sinistres individus sont abattus en plein combat les armes à la main ou même l’orthographe « Dozo » importée depuis la Côte-d’Ivoire voisine où ils ont brillé par la division mentale du pays en Nord musulman et Sud on ne sait quoi. Un schéma du reste dupliqué chez nous, avec un Nord abandonné par l’Etat et un Sud où tous les citoyens nagent dans la béatitude.

Dans une guerre, laisser l’initiative du choix des mots à d’autres est mortel, parce que la guerre est aussi communicationnelle. Cela n’est pas une révélation, mais juste une piqûre de rappel. La preuve, quand il s’agit d’accabler et d’affubler les FAMa « d’exactions, d’exécutions sommaires, d’arrestations extrajudiciaires », et de toutes les barbaries ignobles, l’on ne s’encombre pas de fioritures précautionneuses d’innocence présumée. Les accusations sont généralement portées sur la foi de témoignages aussi fantaisistes que partisans, en lieu et place d’une enquête sérieuse impliquant la partie malienne.

Dans ce maelstrom où le pays doit traverser des « cercles de feu », il urge de reprendre la main pour gagner la bataille communicationnelle comme d’autres ont si bien balisé la voie aux moments les plus forts de la rébellion armée, en arpentant les mêmes estrades de diffamation du Mali pour donner de la repartie. En attendant de gagner la guerre militairement. Pour cela, il faut avoir le courage des mots.

 

PAR BERTIN DAKOUO

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