Rétrospection Ménaka : Esbroufe ou menace

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Ça y est ! Contre toute attente, le Mouvement national de libération de l’Azawad serait-il passé aux actes ? L’acte posé lundi soir, l’attaque de Ménaka, serait-il un coup de sommation ou le début d’une longue série d’agressions programmées ? Pour l’heure, alors que le sort même de Ménaka est incertain, chaque assurant en assurer le contrôle, il est prématuré et difficile de répondre à ces questions. Néanmoins, quelques considérations doivent être prises en compte.

Le MNLA est constitué d’un petit groupe de combattants revenus des rangs de l’armée libyenne défaite par une rébellion armée. Mais, depuis, il s’est enrichi d’une jeunesse désœuvrée et sans espoir de survie dans un vaste Sahara dénué de perspectives de développement durable. Ils sont revenus et ont affiché, pour beaucoup d’entre eux, un certain pacifisme, ont rencontré les plus hautes autorités de l’Etat auxquelles ils ont dit n’être revenus que dans un esprit de paix pour contribuer aux efforts de développement de leur pays, ont été écoutés par le président de la République et des membres du gouvernement qui les ont bien accueillis et leur ont dit être sensibles à leurs préoccupations et promis de satisfaire leurs revendications, très bénignes alors. Tout était bien donc.

Sauf qu’en début de semaine, de retour chez eux et rassurés de la faiblesse et de la complaisance de l’Etat à leur endroit, ils ont décidé de rentrer dans l’histoire en défiant l’autorité centrale à Ménaka, une ville qui a aussi servi de point de départ à la rébellion de juin 1990. Le MNLA n’est sans doute pas le MNA, et nous ne sommes plus dans années 90. Si, il y a vingt deux ans, les rebelles ont bénéficié de l’effet de surprise et d’un soutien massif de toutes les communautés ayant le nord en partage, s’ils avaient en face d’eux une armée démoralisée et démotivée, il en va tout autrement, cette fois-ci. Les communautés sédentaires et plusieurs fractions nomades ne sont plus d’avis à laisser faire des aventuriers ayant échoué dans le mercenariat.

Les populations du nord, pour cela, ont de solides raisons. Le pouvoir central est décidé à ramener la paix et la sécurité dans le nord, gages de l’impulsion et de la mise en œuvre de véritables actions de développement. A cet effet, l’armée est en train de se déployer dans toute la zone, avec le matériel adéquat et le soutien nécessaire de certains pays occidentaux. Ménaka a été érigé en région administrative, conformément aux revendications de certains de ses ressortissants, afin de renforcer le processus de décentralisation aboutissant à une autogestion, une auto-administration, un auto-développement. Les insurgés n’ont donc aucune raison valablement partagée par toutes les populations de réclamer une sécession et l’indépendance d’un pseudo Azawad. D’autant plus que la très grande majorité des populations, constituées essentiellement de noirs sédentaires, ne reconnait pas cette appellation, ne veut pas d’un exemple à la Sud Soudan.
E
t puis, en guise de bonne foi, les autorités ont, à tort, avec la complicité active de l’Algérie, soi-disant médiateur, laisser rentrer de Libye ces combattants avec de l’armement et du matériel de guerre.

Certains observateurs et spécialistes du nord croient tout de même que l’attaque de Ménaka, même si elle a été poursuivie de celles d’Aguel Hoc et de Tessalit, n’est qu’un coup de semonce. La ville a été prise d’assaut au moment où le camp militaire avait été déserté par les militaires qui, en état d’alerte, s’étaient déployés en ville pour sécuriser des édifices publics et des lieux symboliques de l’Etat, pendant que le dispositif militaire et sécuritaire s’était assigné à assurer la relève de la base stratégique de Tinzawatin. En outre, même si la ville de Ménaka est prise par les rebelles, elle ne peut être occupée durablement, sera fatalement libérée avec l’impossibilité pour les assaillants de s’esquiver et de se perdre dans la nature.


Effectivement, et elles sont en train de le démontrer, les forces armées et de sécurité ont les moyens humains, matériels et techniques, et toute l’aide extérieure nécessaires pour venir de n’importe quelle situation dans le nord, même si cette zone est devenu le sanctuaire des terroristes d’AQMI, des narcotrafiquants, des contrebandiers, des bandits armés et, maintenant, des rebelles.
Alors, coup d’essai ou début d’actions durables, un échec à mater ce semblant de rébellion, déclenché pour forcer la main aux autorités et accélérer la satisfaction des revendications de quelques individus, sera perçu, dans bien de milieux, notamment les états-majors politiques et les candidats à la présidentielle, comme un moyen et un prétexte tout trouvé par ATT pour repousser la date des prochaines élections et perdurer à Koulouba.

Cheick Tandina

 

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