Rétrospection : ATT II, AN IV Neuf ans, et après ?

0

Amadou Toumani Touré a bouclé, mercredi 8 juin 2011, la neuvième année de son mandat à la tête de l’Etat. Candidat du PDS (Parti de la Demande Sociale ) en 2002, défenseur du PDES (Programme pour le Développement Economique et Social) en 2007, le Chef de l’Etat pas encore sortant, a bénéficié tout au long de ces années, des meilleurs atouts pour gouverner et régner tranquillement, tirer le pays vers le haut, atteindre le maximum des objectifs qu’il s’est fixé.

 

En effet, de 2002 à 2007, Amadou Toumani Touré a pu réunir autour de sa personne l’essentiel des acteurs majeurs. Il était venu pour réconcilier cette classe politique avec elle-même, une classe politique qui venait de sortir d’une longue et douloureuse déchirure marquée par l’antagonisme entre le COPPO (Collectif des Partis Politiques de l’Opposition) tiré principalement par le RPM, le MPR et le CNID, et la majorité présidentielle sortante incarnée essentiellement par l’Adema-PASJ et quelques micros partis, sous le faux arbitrage d’une frange «indépendante». La solution trouvée par le nouveau président de la République a consisté essentiellement à réunir les différents acteurs majeurs autour de la table de la gestion consensuelle du pouvoir, en se tenant, apparemment, à équidistance des différents partis politiques invités.

 

Durant cinq années donc, ATT a bénéficié d’un Gouvernement stable, même s’il lui a fallu deux chefs de Gouvernement, Ag Hamani et Ousmane I. Maïga. Il a bénéficié de cette même complicité (complaisance, disent certains) du côté de l’Hémicycle, sans opposition notable que beaucoup ont qualifié de caisse de résonance ou de chambre d’enregistrement.

 

De 2007 à 2011, la situation a connu un léger changement. En effet, la fin du premier mandat d’ATT a coïncidé avec la volonté de certains de ses camarades de consensus, RPM et Parena, entre autres, croyant à tort que leur heure était venue de se présenter contre lui à la présidentielle. C’était sans compter sur la popularité, teintée de populisme et de démagogie, et la confiance, due en grande partie à la défiance à l’égard d’une classe politique invisible et atone, qu’ATT a acquises au cours de sa première mandature. Il est donc réélu. Et après, près de quatre ans de présidence sans opposition véritablement audible et perceptible (à une exception près, le SADI), il vient de réitérer son exploit d’institution d’un Gouvernement de consensus.

En définitive, en neuf ans, ATT nous aura épargné les confrontations souvent explosives et compromettantes pour la démocratie que nous ont livrées l’Adema-PASJ et ses adversaires. Mais sur le plan politique et de la bonne gouvernance, il n y a que cela de gagné : les différentes élections, la gouvernance locale, la gestion des fonds publics ont démontré qu’on est loin de voir le bout du tunnel. ATT l’a d’ailleurs compris, lui qui a commandé des réformes institutionnelles profondes pour améliorer un processus en panne sèche.

 

A contrario, ces années de calme ont permis au candidat du PDS et du PDES, grâce à des partenaires techniques et financiers de plus en plus confiants, de s’attaquer avec succès à certains aspects. Notamment, les infrastructures avec la réalisation de nombreuses routes, de ponts, d’ouvrages d’art, d’aménagements hydro-agricoles, etc ; l’emploi avec l’opérationnalisation de l’APEJ et le recrutement régulier et transparent dans la fonction publique. Sur le plan social, il a poursuivi l’œuvre de son prédécesseur, le président Konaré, concernant la politique de proximité en matière de santé, d’école et d’eau potable pour le maximum des populations. Il est vrai que ce bilan est quelque peu terni avec l’affaire du Fonds mondial et les crises récurrentes à l’éducation, mais la victoire sur le Ver de Guinée et quelques autres maladies d’origine hydrique est presque certaine.

 

Autres ombres au tableau : la lutte contre la corruption et la délinquance financière et la promotion des droits de la femme. En 1991-1992 déjà, lors de la transition, ATT avait annoncé le Kokaje comme étant son principal cheval de bataille. Mais ce combat, à l’issue de ses deux passages à Koulouba est demeuré vain. La corruption et la délinquance financière, qui se sont pratiquement développées et institutionnalisées sous les deux quinquennats Adema, n’ont jamais perdu de terrain. Au contraire, elles se sont appropriées certains rouages de la justice et des institutions chargées principalement de les combattre, à cause d’un certain laxisme à l’égard du législateur et de son instrument. Concernant les droits des femmes, ATT, même s’il s’est repris de manière très folklorique, il est vrai, en nommant des femmes à la tête du Gouvernement et de certaines administrations jusque-là réservées aux hommes, a manqué le coche en renvoyant pour seconde lecture le projet de Code de la famille et des personnes, dont la promulgation aurait pu impulser le processus de réformes institutionnelles.

 

Créé récemment, le Ministère chargé de ces dossiers n’a que quelques mois pour réussir ce qu’ATT n’a pas pu faire en neuf ans : essentiellement la relecture de la Constitution , du Code électoral, de la Charte des partis et du statut de l’opposition.

Quant au retour de la paix et de la sécurité au Nord du Mali, du départ des cellules terroristes de la bande sahélo-saharienne, malgré toute la bonne volonté du Chef de l’Etat, ces questions ne relèvent pas véritablement de sa seule personne, ni de la politique de son seul pays.

Cheick TANDINA

 

 

 

Commentaires via Facebook :