Rétrospection : Amadou Tout Terrain, l’autre ATT

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Les jours passés, ATT a été particulièrement actif. Avec certains de ses collègues chefs d’Etat, il a eu l’idée très ingénieuse et opportune de vouloir sauver la famille Kadhafi -du moins, ce qui en reste-du naufrage collectif vers lequel elle se dirige. Même si le peuple libyen, dans une grande majorité adoubé par le CNT, ne veut plus de son dictateur, rêvant à un Etat enfin libre et démocratique, personne au monde ne peut reprocher à Amadou Toumani Touré and Co de ne pas avoir la reconnaissance du ventre. D’un côté, ces chefs d’Etat doivent beaucoup trop au colonel libyen pour ne pas tenter de mettre un terme aux frappes de l’OTAN.

Kadhafi a très souvent été là pour les aider à payer les salaires de leurs fonctionnaires, régler leurs dettes, assurer leurs dépenses de prestige, leur offrir des monuments à sa gloire.  D’un autre, ils savent que leurs démarches sont très peu porteuses de réussite, ne serait-ce que le minimum qui permettra au colonel de s’assurer une retraite paisible dans un endroit inaccessible à la Cour pénale internationale. D’où ces conciliabules vains. Mais, il faut bien faire semblant pour que le bienfait ne soit pas perdu. Mais, ces chefs d’Etat, en particulier ATT, gagneraient beaucoup à balayer devant leur porte. C’est ce que ses conseillers les plus avisés et ses plus proches amis, dont Le Prétoire, s’évertuent à lui faire comprendre. Et il semble qu’il ait entendu tout ce beau monde.

En effet, concernant l’épineuse question de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO), dont le caractère Obligatoire avait divisé le monde du travail et fourni une opportunité de politisation à la classe politique, par déficit communicationnel, elle est devenue Volontaire (AMOV ?). Mais, elle nécessite toujours une large communication explicative. Certains élus municipaux, sous l’impulsion du Gouvernement d’ATT, se sont saisis de la question et ont décidé de mener de larges sessions de sensibilisation de proximité. Selon certaines indiscrétions, ces conseillers municipaux qui ont subitement décidé d’éclairer la lanterne de leurs administrés ont perçu du Gouvernement beaucoup d’argent pour ce faire. Difficile de ne pas le croire quand on sait que nos élus, en général, les Maires, en particulier, font rarement restitution des décisions gouvernementales. Ils préfèrent maintenir leurs électeurs dans l’ignorance la plus totale de ce qu’ils doivent faire pour le bien-être des populations. Mais, pour être juste, il faut reconnaître que beaucoup de ces élus ne savent pas exactement leurs rôles et responsabilités, ils ne savent pas pourquoi ils ont été élus. Mais le gouvernement d’ATT compte aussi corriger ce lamentable état de fait. Comment ? Il ne le dit pas.

Par contre, l’autre dossier sur lequel il est attendu concerne l’organisation des futures élections. Comme pour l’AMO, les principaux acteurs étaient (le sont toujours) divisés sur le fichier électoral à retenir. La très grande majorité de la classe politique était d’avis d’organiser les prochains scrutins sur la base du RAVEC, une innovation hautement technologique d’ATT qui a le mérite de limiter, sinon de juguler la fraude électorale. Après avoir frôlé l’impasse dans les discussions en plénière, il a été convenu de mettre en place une Commission restreinte d’experts ( ?) qui aura à choisir entre le RACE d’Alpha Oumar Konaré et le RAVEC d’ATT. Et comme on s’en doutait, les «experts» ont opté pour le RACE. En fait, ces gens n’ont fait qu’accomplir une formalité. Aucun observateur ou acteur de la scène politique, même en plein fantasme onirique, n’aurait cru un instant qu’ATT et ses camarades de l’Adema-PASJ se plieront à la volonté de la majorité et se priveront de l’exquis et machiavélique plaisir de resservir le fichier électoral tiré du RACE. Ils en connaissent trop les capacités de nuisance pour s’en séparer aisément.

Une autre raison pour ATT de balayer devant sa porte, c’est la recrudescence de la violence et de l’insécurité dans le Nord et dans le Sahel occidental du pays. Elle fait suite à la nouvelle forme de coopération militaire qu’ont adoptée les autorités algériennes, maliennes, mauritaniennes et nigériennes. Il s’agit d’opérations militaires conjointes : patrouilles de ratissages le long de la frontière algérienne, liberté d’action accordée aux Nigériens sur le territoire malien, bombardements de bases AQMI par les Mauritaniens dans le Ouagadou malien. Quant aux militaires maliens, ils ont le choix entre jouer les pompiers, les ambulanciers ou les croque-morts. Ils font les trois. Avec bonheur : récemment, ils auraient fait prisonniers des civils mauritaniens qui n’avaient jamais entendu parler d’AQMI.

Amadou Toumani Touré aura encore, au cours des quelques mois qui lui restent à vivre en tant que président de la République, d’autres terrains à conquérir, les tâches ne manquant pas. Pour notre part, on ne peut que lui souhaiter courage et bonne fin de règne.
Cheick TANDINA
 

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