Roue libre : Tiémoko passe avec brio «l’examen de Bougouni»

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Bougouni ne sera jamais bougouba". Le général Moussa Traoré, très en colère, avait proféré cette terrible malédiction à l’endroit de la capitale du Banimonotié suite à l’assassinat d’un jeune responsable de l’UDPM par les populations.

Un oracle digne de la Pythie de Delphes à moins que ce ne soit la malédiction du pharaon. Ainsi dit parce qu’en 1922 l’anthropologue britannique Howard Carter et une équipe de chercheurs procédèrent à des fouilles dans la Vallée des Rois en Egypte qui aboutirent à la découverte de la tombe du jeune roi de 19 ans Toutankhamon. Mais peu de temps après la plupart des membres de l’expédition périrent de façon mystérieuse.

Aujourd’hui, certes, Bougouni est devenu bougouba grâce à la magie d’ATT qui a bitumé et électrifié les principales artères de la ville mais avec le retour des démons de la division et de la haine, les dieux semblent encore une fois favorables aux prédictions de la prophétesse du temple d’Apollon. Bougouni (petit village de paillote) chanté naguère par l’historien Bakary Kamian dans son ouvrage intitulé "connaissance du Mali" ressemble aujourd’hui, de nuit, à Paris by night. D’après cet historien émérite Bougouni, deuxième ville du Mali après Bafoulabé, compte le plus d’anciens combattants de l’armée coloniale française que n’importe quelle autre ville du Mali. A quelque 25 km de là dans le petit village de Ntétou (la palmeraie) on observe encore les traces du passage de l’Almamy Samory Touré en route pour le siège de Sikasso.

Mais à peine le brasier s’est-il éteint entre agriculteurs et éleveurs au Wassoulou que la capitale du Banimonotié, à son tour, s’enflamme. Par la faute d’un ministre de la République, en l’occurrence le taciturne professeur Tiémoko Sangaré, passé maître dans l’art de l’intox et de la manipulation.

Parti sous prétexte de planter des arbres (une trentaine au total), il en a profité pour soulever les jeunes contre le maire CDS de Bougouni. Le crime de Yaya Togola, parait-il, est d’avoir superbement ignoré le nom du ministre dans son allocution lors d’une cérémonie officielle. Crime de lèse-majesté parce que Tiémoko, semble-t-il, à la rancune tenace. Et il tient à faire payer cher au maire sa "désinvolture".

Le chanteur rasta a dit, cependant, qu’au lieu d’en vouloir à l’endroit où tu es tombé, il faut en vouloir à l’endroit où tu as trébuché. En effet, le professeur Tiémoko Sangaré tout comme Mamadou Bakary Sangaré dit Blaise sont tous deux du terroir, c’est-à-dire que ce sont des Bougounidachès venant d’un bled d’où on n’entend même pas le vrombissement du moteur des bus empruntant l’axe Bamako-Sikasso. Mais contrairement au leader de la CDS, qui a trimé pour les populations, Tiémoko est inconnu au bataillon. Il n’a aucune base électorale à Bougouni. D’ailleurs, c’est à la suite d’un marchandage sordide avec le parti du cheval que son parti l’Adema a gagné les législatives partielles au détriment du candidat de l’URD, l’ancien directeur des douanes, Seydou Diawara.

Aussi ce que Tiémoko Sangaré n’a pas eu par les urnes, il veut l’avoir par les armes, en déstabilisant le maire Yaya Togola et, si possible, en le faisant descendre de son piédestal. Pour cela, il a bien appris ses leçons à savoir l’examen de Bougouni qui consiste à dire "je ne passe pas, tu ne passes pas". Mais il a lamentablement échoué dans sa tentative de mettre les jeunes et leur maire dos à dos car lors du listing du fameux colis envoyé par les partenaires fait devant un huissier et des policiers, il n’y avait ni maillots ni ballons de foot. L’étrange cargaison n’était pas la caverne d’Ali Baba. On peut alors dire, sans risque de se tromper, que le troisième vice-président de l’Adema vient de réussir avec brio à "l’examen de Bougouni". Il a déjà reçu le diplôme du "nyingoya" à la place de celui du "sinankouya". Même si l’on sait que Bougouni n’est pas "Nyingoyabougou", les légendes ont la vie dure. Elles traversent les siècles. C’est vrai que, comme dit l’adage, qu’un peul en cache un autre. Mais quand la guerre des peuls se double de la guerre des chefs, surtout entre Sangaré, les paisibles populations du Banimonotié doivent se terrer dans leur tanière. Car c’est un combat de titans dont les secousses peuvent faire trembler le mont Sinaï. Cependant, le nouveau récipiendaire doit savoir que Socrate, dans l’antiquité, a été condamné à boire la ciguë pour cause de corruption de la jeunesse. Qu’en sera t-il de celui qui, comme Claude Neron, met le feu à sa propre case ?

Heureusement, pour nous autres que la guerre des peuls n’est pas la guerre des gangs et encore moins celle des crapules.

Mamadou  Lamine  DOUMBIA

 

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