Roue libre : Kafougouna autorise les maires à voler

0

Le sociologue français Emile Durkheim disait que les peuples n’ont que les dirigeants qu’ils méritent. Et il enchaînait dans la foulée en affirmant que pour gouverner, il faut soit être aimé soit être craint. Concernant la première thèse, il n’y a rien à dire, si ce sont là les dirigeants que nous méritons, c’est que les Maliens sont tombés du ciel. Quant à la deuxième thèse, on peut dire qu’on en a vu de toutes les couleurs allant même boire le calice jusqu’à la lie. Moussa a gouverné par la peur, faisant régner la terreur. Alpha et ATT ont voulu plaire au peuple. Mais pour cela, ils se sont accommodés du laxisme, de la corruption, du vol et du manque d’autorité de l’Etat en s’entourant de prédateurs et en embastillant les menus fretins. Ils enlèvent aux pauvres pour mieux servir les riches. Les questions domaniales constituent aujourd’hui parmi tant d’autres un triste exemple de la déchéance spirituelle et morale de ceux qui nous gouvernent. Or, on dit que la terre ne ment pas et la terre doit être donnée à ceux qui la cultivent.

Sur ce dossier, en tout cas au Mali, on est loin du compte. Partout la spéculation foncière bat son plein avec son cortège de titres fonciers bidons, d’usurpation de titres, de spoliation de la veuve et des vrais héritiers, de l’orphelin et des plus démunis. Ceux qui ont les poches lourdes font la fête et savourent les fruits du brigandage.Un peu partout aussi des conflits intercommunautaires nés des litiges fonciers éclatent, qui aboutissent souvent à des bains de sang. Combien de fois le ministre de l’administration territoriale, le général Kafougouna Koné est monté au charbon pour éteindre le brasier en réconciliant les frères ennemis ? Mais rien n’y fait, les problèmes de terre restent entiers. En tout cas à Bamako, il ne reste plus une seule once de terre. Les maires de la capitale et ceux de l’intérieur ont tout vendu. Il ne leur reste plus qu’à déloger ATT pour morceler la colline du pouvoir. Leur vampirisme n’a d’égal que le cannibalisme. Ils sont même prêts à vendre leurs culottes pour se faire des sous. Aujourd’hui à Bamako, des milliers de déguerpis n’ont plus que leurs yeux pour pleurer. On les a délogés pour faire place aux riches. Or avoir un toit décent fait aussi partie des droits humains. C’est compte tenu de cette impérieuse nécessité que le président Amadou Toumani Touré a construit un peu partout sur l’ensemble du territoire des poulaillers pour familles africaines dont IBK dit que les acquéreurs vont mourir en laissant des dettes à leur progéniture. Au demeurant, les critères d’attribution de ces logements dits sociaux n’ont jamais été respectés. On a d’abord servi les copains et les coquins.

Ensuite, ce fut le tour de certains artistes de la place bien connus de tous et possédant des villas aux allures de palace de bénéficier de cette manne providentielle. Le prince lui-même et madame en ont distribué la tonne et le quintal. Pendant que certains ont mis leur maison en location, d’autres sont tout simplement devenus de mauvais payeurs. Aujourd’hui, le problème du règlement des arriérés de loyer est devenu un casse-tête pour le ministère des domaines de l’Etat.

Ce triste tableau n’a pas empêché le ministre de l’Administration territoriale, le général Kafougouna Koné de prendre une lettre circulaire levant la mesure d’interdiction de vente des terres du domaine immobilier de l’Etat par les maires en vigueur depuis 2008. Ce bon général à l’allure pourtant respectable, conseiller spécial et mentor d’ATT, a pris comme prétexte le fait que les états généraux sur le foncier se sont déroulés dans de bonnes conditions. Ce faisant, il autorise de nouveau les maires à voler. Avec leur cupidité légendaire, leur voracité et avec l’appétit du gain facile, ceux-ci n’hésiteront pas, une fois de plus, à s’en donner à cœur joie. Quel scandale par exemple que celui provoqué par Youssouf Coulibaly, le maire de la commune II du district quand il a voulu vendre au plus offrant une partie du domaine immobilier de l’école de Missira. Pris à la gorge par les jeunes du quartier et en pleines échauffourées, il tourne tout bonnement les talons pour aller à la Mecque. Par les neiges éternelles du Fuji Yama, pour y faire quoi ? Lapider Satan ou se faire lapider ? Le cas de l’ancien maire de la comme IV, Issa Guindo se passe de tout commentaire. Il est tout simplement voué aux gémonies (dans la Rome antique escaliers situés au flanc du Capitole où étaient exposés les corps des suppliciés) par les populations.

Pour tout dire, la mesure prise par le ministre de l’administration territoriale est incongrue car elle ne vient pas à son heure. Au temps fort de la rébellion touareg, ce généralissime ne disait-il pas qu’à son âge, il ne bradera jamais la souveraineté nationale du Mali? Pourtant, ce qu’il fait actuellement est tout aussi pire en autorisant le bradage du patrimoine national.

Le socialiste utopique français Joseph Proudhon disait que "la propriété, c’est le vol". En matière foncière au Mali, ce n’est que pure lapalissade.

Mamadou Lamine DOUMBIA

 

Commentaires via Facebook :