Rien ne sert de courir, il faut partir à point". C’est la belle leçon que donne la tortue au lièvre dans cette fable de La Fontaine. De même que qui veut aller loin ménage sa monture. A confondre vitesse et précipitation, on risque de se casser les reins et sa… monture. Comme s’ils voulaient rattraper le temps perdu, les amis d’ATT sont en train actuellement de mettre le monde sens dessus dessous.
Après avoir longtemps guerroyé entre eux dans l’arrière-cour contre la formation d’un parti politique, à présent ils laissent tomber le masque. Ils ne regardent plus dans les yeux du président comme autrefois on regardait dans les yeux de Moussa Traoré avant de savoir où mettre les pieds. Au demeurant ATT ne vient-il pas de leur donner son aval pour la formation d’un parti présidentiel ? Car l’hôte de Koulouba est enfin sûr de son départ pour ne pas prendre le risque d’être balayé par un 26 mars bis. Il y a une longue liste d’attente pour occuper le château de Koulouba. RPM, URD, Adema, Soumi champion et les abeilles sont les plus pressés de goûter aux délices du pouvoir, s’installer dans le luxe et même le lucre, recevoir les princes étrangers. De toutes façons, se disent-ils, ils ne doivent plus rien à ATT à qui ils ont offert gratuitement son second mandat.
Désormais, c’est quitte quitte ou kif kif car même entre amis la générosité a des limites. Et, pour se rendre compte de la détermination des uns et des autres, on peut faire foi à la déclaration de la dame de fer, Mme Sy Kadiatou Sow, présidente de l’Adema association qui a dit un jour qu’ils n’accepteront jamais qu’on touche à l’article 30 de la Constitution. L’ambitieux Soumaïla Cissé est même tellement pressé qu’il ne respecte plus le devoir de réserve que lui impose sa charge de président de la Commission de l’UEMOA. Tel un toréador il bondit dans l’arène pour mettre la bête à mort comme il vient de le faire à Mopti, lors de la célébration du septième anniversaire de son parti, oubliant du coup que c’est ATT qui l’a fait roi à Ouagadougou.
La course étant désormais engagée entre les différents protagonistes, les citoyens en mouvement ne veulent plus lâcher la proie pour l’ombre. Ce faisant ils donnent raison à Ousmane Ben Fana Traoré qui a pris son courage à deux mains pour créer le PCR malgré les protestations de big Djibril Tangara. Ben Fana n’en a pas encouru pour autant l’ire du chef. Au contraire, aujourd’hui encore, il occupe un bureau cossu à la présidence de la République à l’ombre du maître de céans. Autant dire que pour ne pas être broyés dans l’après-ATT par le rouleau compresseur des partis politiques auxquels ils livraient une concurrence déloyale, les gens du mouvement citoyen se sont lancés dans une agitation frénétique sachant bien que le temps perdu ne se rattrape jamais. La politique ne s’accommodant guère de l’hypocrisie, ils paieront cash le fait d’avoir longtemps joué au chat et à la souris.
L’instinct de vie (eros) étant plus fort que l’instinct de mort (thanatos), pour survivre dans la jungle des partis politiques, ils viennent de se lancer dans une course contre la montre. L’alibi est tout trouvé : défendre le PDES, l’héritage présidentiel. Or, on sait combien de parricides il y a dans ce pays. A défaut de le honnir, les tigres ne parlent même plus de Moussa Traoré.
Les faux héritiers de Modibo Kéïta viennent de l’assassiner une fois de plus. Changement de sigle mais aussi de logo, de l’US on passe à l’UM-RDA, de la charrue attelée au tracteur. Ces réactionnaires, qui n’ont jamais rien su de la révolution active, ont gommé tout souvenir du Soudan français, une partie incontournable de notre histoire. Même Houphouët Boigny se retourne dans sa tombe.
Quant au mouvement citoyen, pour parvenir à ses fins, il utilise les mêmes méthodes sournoises que les partis politiques en profitant des grands moyens mis à sa disposition par l’achat massif des consciences. Mais le réveil, demain, risque d’être brutal pour ceux qui ratent le train de l’histoire car rien ne sert de courir…
Mamadou Lamine DOUMBIA