Rétrospection : Recalés par principe

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La Cour constitutionnelle, le 02 juillet 2013, a tranché sur la recevabilité des trente-six dossiers de candidature à l’élection présidentielle du 28 juillet déposés à son niveau. Huit candidats ont été éliminés, soit pour n’avoir pas payé la caution soit pour ne pas avoir obtenu le parrainage d’élus.

 

 

Cours_constitutionnelleIls seront donc, selon la liste provisoire publiée par la Cour constitutionnelle, vingt-huit candidats à disputer la prochaine élection pour avoir satisfait aux exigences de la loi.

 

 

Cette loi N° 06-044 du 04 septembre 2006 portant loi électorale modifiée par les lois N°2011-085 du 30 décembre 2011 et N°2013-017 du 21 mai 2013 n’ayant jamais été modifiée ou abrogée, puisque elle dispose toujours que le déclaration de candidature doit mentionner les nom, prénoms, profession, domicile, date et lieu de naissance du candidat, et que chaque déclaration doit recueillir la signature légalisée d’au moins dix députés ou cinq élus communaux dans chacune des régions et du district de Bamako. On peut se demander alors pourquoi huit prétendants à la Maison du Mali de Koulouba ont refusé de satisfaire aux exigences de la loi.

 

 

La réponse à une telle question peut se trouver dans l’accueil réservé par les acteurs politiques à la loi. Depuis quelques années, en effet, nombreuses voix de la classe politique se sont élevées pour critiquer ces nouvelles dispositions. Selon les responsables politiques, de telles dispositions pourraient fausser les règles du jeu et permettre la corruption de certains élus qui n’accepteraient pas d’accorder gratuitement leur parrainage. De fait, selon plusieurs témoignages, des députés et des conseillers communaux auraient vendu leur parrainage aux candidats à la présidentielle. A raison de cinq à dix millions de F Cfa par député, de trois à cinq millions de F Cfa par conseiller communal. En outre, le montant même de la caution, dix millions de F Cfa, n’est pas à la portée de tout le monde et a certainement découragé plus d’un prétendant.

 

 

De telles conditions ne sont pas pour honorer une compétition qui doit se faire librement et qui, en fin de compte, ne favorise que les plus fortunés et les mieux lotis. C’est pour cette raison que la plupart des acteurs politiques ont dénoncé le fait, très souvent en public. Et pourtant, le moment venu, ils ont tous mis la main à la poche, cédant à la loi. Sauf ces huit candidats qui viennent d’être recalés, faute d’avoir payé un cautionnement dont ils abhorrent le paiement ou d’avoir soudoyé des élus. Personne ne peut croire que certains de ces candidats, comme Madani Tall ou Mme Sidibé Aminata Diallo, n’ont pas les moyens financiers de payer une caution de dix millions et de s’acheter quelques parrains.

 

 

Beaucoup de candidats ont tenté de faire croire cela, en s’exhibant devant les cameras de la télévision auprès de jeunes et de femmes censés avoir appelé leur candidature et payé leur cautionnement, cela n’a trompé personne à part ces candidats eux-mêmes, et tout le monde sait que non seulement ils ont les moyens de payer leur cautionnement mais aussi qu’ils peuvent acheter quelques parrains.

 

 

Et si huit candidats ont été disqualifiés, on peut penser qu’ils ont seulement décidé de se conformer à leurs principes qui sont de ne pas se prêter à une loi qui fausse les règles du jeu.

 

 

Tous les autres candidats partagent les mêmes principes qu’eux. Ces vingt-huit qui viennent d’avoir leur ticket pour la compétition auraient pu, eux aussi, s’abstenir de satisfaire aux conditions de la loi. Ils l’auraient dû parce qu’eux-mêmes n’ont jamais cautionné le paiement d’un cautionnement et l’achat d’élus parrains. Et si tous ces vingt-huit candidats, sans exception, avaient fait comme les huit recalés, les autorités allaient très certainement modifier ou abroger une loi qui dérange toute la classe politique. Mais également le citoyen lambda qui pense déjà que, le 28 juillet prochain, il ira voter peut-être pour quelqu’un qui doit la validation de sa candidature au fait d’être fortuné mais surtout au fait d’avoir mis en veilleuse ses propres principes.

 

 

Et puisque les règles du jeu sont faussées dès le départ, les électeurs, sûrs que les candidats sont fortunés et bien lotis, n’iront voter que contre espèces sonnantes et trébuchantes. Mais beaucoup de candidats s’attendent à cela. Et sont prêts à entretenir la corruption politique et l’achat des voix.

Par Cheick TANDINA

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