« Amadou et Mariama » continuent de patauger et de faire du surplace. Pendant que le déjà vieux (elle a tout de même dépassé ces cinquante jours au poste) Premier ministre, Mariama Kaïdama Cissé, continue sa quête de bénédictions et de l’aide de tous pour le bon accomplissement d’une mission qui ne démarre toujours pas, son chef, Amadou Toumani Touré, innove dans ses discours et langage. Il ne rate plus aucune occasion de donner à ses interlocuteurs des leçons de management, de commandement et de leadership. Il faut dire qu’il n’y a pas très longtemps, son propre leadership a été mis à mal par quelques membres de son dernier gouvernement, qui avaient voulu lui faire un enfant dans le dos. Sur des sujets aussi explosifs que l’industrie extractive, il revient au seul chef de décider. Lui n’a même pas été informé. D’où ce nouveau penchant de formateur pédagogique.
Sa dernière sortie s’est effectuée face à la jeunesse dorée des JCI, réunis en conclave à Bamako pour prospecter le terrain et préparer les conditions d’une main mise encore plus totale de la franc-maçonnerie et du Capital international sur l’économie nationale.
Pendant ce temps, le tout nouveau ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale était à pied d’œuvre et prenait son rôle très au sérieux. Il a si bien fait qu’il a fini par engranger ses deux premiers grands succès : réunir chez lui ses homologues de la Bande sahélo saharienne pour discuter insécurité et, surtout, amener les pays « amis et frères » à mettre la main à la poche pour faire un don au Mali. Sur le premier point, les résolutions habituelles, dans ce genre de rencontre, ont été prises et seront peu ou prou respectées. L’activisme de Soumeylou Boubèye Maïga semble avoir payé plus concrètement sur le deuxième point, notamment à Alger. En effet, aux termes d’un accord de don, l’Algérie enrichit le Mali de la coquette somme de cinq milliards FCFA. Ce pactole, selon les termes de cette coopération sud-sud, permettra aux Maliens de soigner les trois principaux maux dont ils souffrent : la santé, l’école et l’eau potable. Le geste est d’autant plus notable et appréciable qu’il concerne essentiellement les trois régions du nord : Tombouctou, Gao et Kidal. En effet, ces trois régions, depuis des décennies, font les frais d’une désertification progressive entrecoupée de sécheresse cyclique qui handicapent lourdement leur développement socio-économique. La situation s’est aggravée au début des années 1990, à la faveur d’une rébellion armée qui a eu pour conséquences de réfréner ou de stopper les efforts d’aide au développement déployés par de nombreuses ONG. Mais surtout, depuis le début de la décennie 2000, le nord du Mali est devenu le théâtre de banditisme armé résiduel, un no man’s land pour les trafiquants et contrebandiers, et un sanctuaire pour les terroristes. Le sous-développement de la zone et le désœuvrement des populations aidant, la jeunesse est devenue une cible privilégiée et une proie facile pour les recruteurs d’Al Qaeda. Pour cause d’insécurité, même les développeurs les plus téméraires ont fini par décamper. A plusieurs reprises, lors de forums et de conférences sur la question, les PTF européens et américains ont promis d’aider les autorités maliennes à créer de l’emploi pour les jeunes du nord et à améliorer les conditions de vie et de travail des populations locales. De plus, le président Touré du Mali s’égosille en vain à demander une rencontre au sommet pour conjuguer les efforts en vue d’un retour de la sécurité et de la paix. Malheureusement, cette aide et ce sommet se font toujours attendre et le nord est toujours en ébullition. Pire, les différentes cellules d’AQMI, qui ont élu domicile dans cette vaste zone hors contrôle, s’organisent encore plus et constituent une menace pour l’Algérie. Notamment depuis l’assassinat par les Américains d’Oussama Ben Laden, guide d’Al Qaeda, et l’affaiblissement certain de ce réseau de terrorisme international. AQMI, constituée essentiellement d’Algériens, va sûrement se retourner contre sa cible originelle dont l’avait détournée son internationalisation, conséquence de son allégeance à Al Qaeda.
C’est sans doute conscient de cette menace que l’Algérie se décide enfin à agir et à répondre à l’appel à l’unité de concertation et d’action de tous les pays riverains de la Bande. Dans tous les cas, cela ne peut être que le début d’une bonne coopération.
Cheick TANDINA