Niger : Nouveaux chantiers, vieux démons

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Adam Thiam
Adam Thiam

(Pour des problèmes techniques, l’article d’hier n’était pas complet. Nous vous le re-proposons en intégralité avec toutes nos excuses)

Issoufou élu en 2011 boucle ses cinq ans en 2015. Une élection présidentielle est  attendue en février prochain. Et le rappel des troupes a commencé.  Issoufou est-il candidat à sa succession ? Il préfère attendre d’être investi par son parti. Mais sauf séisme, il est dans les starting-blocks. Il y irait fort d’un bilan communiqué sur 171 pages et qui présente les résultats du mandat dans les huit axes de ses promesses électorales en tant que candidat il y a quatre ans.  Le président le dit tout de suite : le Niger connaît des sécheresses mais a vaincu la famine grâce à l’initiative 3N. Celle-ci propose une réponse structurelle à l’insécurité alimentaire en lieu et place de la traditionnelle action d’urgence.

Le Niger entendra siffler le train

Il s’est agi, dans cette optique, de mieux sécuriser et diversifier les conditions de production, optimiser  la chaîne des valeurs dans tous les systèmes de production, y compris pastoral était l’objectif.  Des stocks alimentaires sont disponibles en quantité suffisante et les céréales sont vendues à prix modérés en période de soudure.  Il a fallu en même temps penser aux routes pour  la commercialisation et la production. Issoufou revendique  3000 km de routes bitumées et 2500 pistes rurales aménagées. Et le chemin de fer Niamey-Cotonou est en construction. Les rails sont visibles vers Dosso, une capitale régionale qui se modernise à grande allure Autre point de satisfaction du président : la gouvernance. «  Nous avons gagné une dizaine de points dans le classement global pour la liberté de presse. Et nous ferons davantage », promet-il.  Mais l’Etat également a été consolidé. « L’Etat existe ici » lance le président qui congratule « une armée aguerrie et apte à répondre aux défis sécuritaires » d’un pays assailli à ses frontières malienne, libyenne et nigériane.  L’armée équipée de 800 voitures fait des patrouilles département régulières. Et le pari du pouvoir est qu’elle se rende dans chacun des 14000 villages du Niger. Pour les infrastructures scolaires,  le pouvoir actuel est fier d’avoir réalisé en quatre ans 15000 classes contre 3000 pendant les dix précédentes années. Il forme maintenant 3000 enseignants par an. Issoufou  est un  intégriste de l’enseignement professionnel et technique. 25% des élèves nigériens y sont maintenant orientés contre 22% quand il venait au pouvoir. Le président  table sur 45% à l’horizon 2021. Pour l’enseignement supérieur, il mise sur le taux de 45% alors qu’il de 1% actuellement.  Il vient de recruter d’un seul coup 500 médecins et personnels de santé.  L’obsession du résultat continue : logements sociaux, centrales thermiques, barrage hydro-électrique, forages profonds et un hôpital de 500 lits en construction.

Le sceptre et le spectre

Aura-t-il le temps de faire tout cela ? Il faut d’abord qu’il soit investi par son parti et réélu par son peuple. Et il faut que le Niger continue sur la voie de la légalité  constitutionnelle et divorce d’avec  la tradition des blocages institutionnels qui conduisent au putsch. Depuis  l’avènement de la démocratie dans les années 1990, le pays a connu trois coups d’Etat. Issoufou n’est pas en cohabitation et ne bloque rien, il n’est pas dans un projet de tazartché et il laisse le jeu institutionnel se faire, refusant même de désigner le président de la Ceni comme la constitution lui en donne le droit – il a préféré laisser les magistrats élire l’un des leurs- . Mais il ne se frotte pas les mains pour autant.  L’ombre de Hama Amadou plane. L’ancien président du parlement ne peut sans doute pas se présenter en février mais ceux qui le connaissent sont sûrs qu’il fera tout pour peser sur l’avenir proche. D’ailleurs, d’aucuns voient dans les manœuvres de l’opposition, le modus operandi de ce redoutable entrepreneur politique : créer la crise. Le reste viendra et le reste, l’histoire le révèle, c’est un coup d’Etat dont il est le grand gagnant. Est-ce pourquoi l’opposition crie à la nécessité de revoir le fichier électoral alors que le président de ce fichier n’est autre qu’un de ses caciques, en la personne de l’ancien ministre Mnsd Ibrahim Tamponi ?  D’autant plus curieux que le Niger est l’un des pays africains réputés pour la qualité de son processus électoral. Le fichier électoral n’est pas le seul argument : depuis peu, l’opposition demande la tenue des municipales avant la présidentielle. Seul problème, le président n’a pas le pouvoir de le faire. C’est l’affaire du juge électoral pour lequel des  conseillers n’expirera qu’après la date fixée pour la présidentielle » explique le ministre d’Etat  Bazoum, chef du parti présidentiel. Troisième front : l’opposition demande la dissolution de la cour constitutionnelle. Là aussi, le président n’a aucun pouvoir, les juges constitutionnels étant nommés pour une durée connue, selon le ministre d’Etat. Autant de bulles faciles à crever donc mais le 7 septembre prochain, une décision de justice décantera la crise du Mnsd. Elle déboutera Oumarou Seyni le challenger 2011 de Issoufou ou Alabadé son ex sociétaire qui a rallié le Pnds de Issoufou. Si c’est Seyni qui gagne, Issoufou pourra espérer livrer une rude bataille. Sinon, l’enjeu de la présidentielle sera juste le score qu’il aura fait. En filigrane donc, c’est l’image internationale du scrutin qui est l’enjeu.

Adam Thiam, de retour du Niger

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Ni  Côte d’Azur ni présidence à vie :  la doxa Issoufou

Chaque année depuis son investiture en 2011, le président Mahamadou Issoufou passe ses vacances à Dan Daji, un petit bled sahélien à 600 km de Niamey. Comme beaucoup de ses pairs, il peut s’offrir  la Côte d’Azur mais il a choisi de voir grandir ses plants de millet chez lui.  Le choix modeste du président nigérien interpelle t-il nos dirigeants croisières et brunchs ? Sans aucun doute oui, parce qu’il ne saurait y avoir de petites économies pour des pays dont  80% de la population ne gagnent pas deux dollars par jour.  Mais Issoufou reste au terroir pour écouter, ausculter, tâter du doigt les réalités du milieu. En authentique porteur de projet qui peut réciter par cœur ses réalisations, énumérer ses problèmes et égrener ses plans et ambitions. La situation sécuritaire de la région est cauchemardesque. Mais le président du Niger affirme fièrement que son pays a une armée solide à laquelle la nation consent beaucoup. Huit cent véhicules tout terrain par exemple et seulement en quatre ans ! Une armée projetée sur trois fronts: aux frontières du Mali, de la Libye et du Nigéria-Tchad.  Shekau nargue la région ? « Il peut fanfaronner mais Boko Haram sera irrémédiablement vaincu » prédit le président nigérien. Et sur quoi fonde t-il un tel optimisme au moment où l’organisation terroriste multiplie les attaques-suicides ?  Sur ce qu’il appelle l’analyse trinitaire de la guerre comme Clausewitz qu’il évoque. Boko Haram n’a pas l’armée de ses adversaires avec lui, il n’a pas les peuples, il n’a pas les gouvernements. « Sa défaite n’est donc qu’une question de temps ». Et la crise malienne ? C’est avec tristesse qu’Issoufou évoque cette question et il rappelle que le Niger a été aux avant-postes du plaidoyer pour l’intégrité, l’unicité et la souveraineté du Mali. « Pour nous le Mali c’est aussi une communauté d’Histoire et de projet de société à travers la démocratie ». Il pense sincèrement que le Niger parce qu’il a relativement géré ses rébellions peut aider le Mali à surmonter la crise du Nord. Il regrette que les derniers incidents d’Anefif aient fait capoter la réunion de réconciliation inter-Touareg qui était prévue à Niamey mi août. Mais ce n’est que partie remise. « Le Niger fera tout pour la paix au Mali ». Parce qu’il est lui-même dans l’œil du cyclone, anticipe Issoufou qui aime produire les pépites. Echantillon lumineux ? « Je suis contre les tripatouillages de constitution pour s’accrocher au pouvoir. Je m’insurge contre les présidences à vie » ! En attendant, il va peut-être solliciter un mandat de cinq ans bientôt. Le dernier mandat. Promis, juré !

Adam Thiam

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4 COMMENTAIRES

  1. A regarder Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire et Issoufou au Niger faire, on ne désespère pas des de l’Afrique. On se dit que tout est possible que la vraie question est aussi un problème d’homme, de leadership. C’est dans une adversité sans pareille que ces deux hommes sont entrain de nous donner une gouvernance exemplaire. Je fais remarquer que le parti que dirige Issoufou le PNDS/ Taraya est une rare formation africaine depuis sa création à n’avoir jamais de connu de scission. Idem pour le RDR en côte d’ivoire qui au contraire a été capable de s’agreger son adversaire le plus redoutable. Une question de qualité d’homme et de vision de leur pays.

  2. Comme je le disais hier, l’édito est clean et concis. Ce qui me touche chez Issoufou, c’est son humanisme , sa simplicité, sa modestie- le souci de son pays contrairement aux roitelets que nous avons ici et qui brillent par leurs pantalonnades et pitreries. Le dernier acte de trahison du peuple malien est passé au dernier conseil de ministre où l’on fait passer un marché de près de 8 milliards pour l’achat d’un simple logiciel de gestion à AMO.
    En Afrique et dans le monde avez vous entendu qu’on acheté un logiciel à 8 milliards?
    C’est dommage pour ce peuple:
    -volé
    – violenté
    – violé
    – martyrisé par ses propres gouvernants.
    PS: aucun logiciel au mali ne vaut 200 millions cfa: BCEAO,BOAD, BDM,Ecobank, BNDA,BIM…..UMOA, CDEAO Minusma ….

  3. J’ai confiance à Issoufou, mais les négros sont toujours versatiles et on ne peut les faire confiance tous azimut. J’espère qu’il ne sera pas comme les autres potentats locaux qui croient que sans eux le monde s’écroulera. Du courage Issufou, surtout ne soit pas comme les autres négroïdes de notre chère Afrique.

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