Me Tall réussira-t-il le redressement de la démocratie ?

0

Me Mountaga Tall, président du Congrès national d’Initiative démocratique Faso Yiriwa Ton (CNID FYT), un des initiateurs de la démocratie multipartite au Mali pourra-t-il la redresser ?

Me Mountaga Tall dont la devise du parti CNID FYT est « Rassembler pour construire » a trouvé en la révision de la Charte des partis politique une opportunité inouïe pour avancer ses pions sur le damier politique. Il a eu la pertinente idée de mettre ensemble 74 partis politiques, sûrement ceux qui ont compris que gouverner c’est prévoir. Tout est parti d’une lettre du gouvernement en date du 19 décembre aux partis politiques, leur demandant de lui transmettre leurs propositions et suggestions concernant la révision de la charte des partis politiques, au plus tard le vendredi 14 mars. En ligne de mire, la réduction du nombre des partis politiques, les conditions de création et de financement, le nomadisme politique, conformément aux recommandations des Assises nationales de la Refondation (ANR).

Ainsi, au lieu d’aller en rang dispersé, et peut être présenter des projets contradictoires, la classe politique gagnerait à présenter au gouvernement un projet commun de Charte des partis politiques, d’autant que tout le monde convient de la caducité de l’actuelle charte, veille de 20 ans. La rencontre a eu lieu le samedi 1er février au Centre international de Conférence de Bamako (CICB). Outre le CNID FYT de Me Mountaga Tall, la rencontre s’est tenue en présence de l’URD de Gouagnon Coulibaly, du Rassemblement pour le Développement et la Solidarité (RDS) de Pr Younouss Hameye Dicko et d’autres partis politiques. Noble cause, mais ce rassemblement doit aller au-delà de la révision de la Charte des partis politiques pour s’attaquer aussi aux questions fondamentales de la démocratie dans notre pays.

La démocratie pluraliste introduite au forceps en 1991 a été certainement pratiquée à l’envers, galvaudée souvent par ceux qui prétendent en être les défenseurs, les acteurs : les hommes politiques. Il est temps de la redresser pour qu’elle serve l’intérêt général et non les intérêts personnels ou partisans.

Le vote qui est l’expression de la volonté des citoyens, du peuple, n’a pas l’égard dû, le tripatouillage des résultats de vote est la pratique la mieux partagée, et la haute juridiction (cour constitutionnelle) a souvent assuré le troisième tour des élections.

En 2007, lors de la proclamation des résultats des législatives, l’alerte a été donnée par le président de la cour constitutionnelle de l’époque, feu Salif Kanouté, qui soulignait : « tous les acteurs politiques et candidats de quelque bord politique qu’ils soient se sont installés à demeure dans la fraude généralisée ». A cette occasion, le président Kanouté est allé plus loin avouant tacitement une impuissance de la haute juridiction : « J’ai la profonde conviction que tous les candidats se sont confortablement installés dans la fraude […] Les délégués de la CENI sont muets, les délégués de la Cour sont muets, les présidents des bureaux de vote sont muets ». Qui dit mieux !

Cette habitude qui ne date pas de 2007 venait de loin, elle remontait à dix ans plus tôt en 1997 : les élections législatives du 13 avril 1997. Alors qu’elles étaient organisées par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) présidée par l’avocat Me Kassoum Tapo, ces élections furent un fiasco, et annulées pour mauvaise organisation. Ce n’était pas que les opérations de vote qui étaient en cause. Ces élections que nous avons couvertes à Ségou où notre équipe s’est rendue la veille 12 avril ont été marquées aussi par des violences, avec mort d’homme la veille dans la nuit du 12 au 13 avril par des explosions de grenades jetées dans un domicile. Le jour de scrutin a été marquée par des scènes de guérilla, des courses-poursuites entre les militants de partis opposés, l’ADEMA PASJ au pouvoir étant déterminée à chasser de l’Assemblée nationale, l’opposant CNID FYT, y compris par la violence. Le cadre ADEMA PASJ, Seydou Traoré, futur chef de projet de forêts classées et futur ministre de l’Agriculture, dont le véhicule a été saccagé ce 13 avril peut-il démentir?

Après trente-quatre ans de démocratie multipartite, on est loin des comptes. Le développement économique et social, le bien-être individuel et collectif des Maliens n’est toujours pas au rendez-vous, les services sociaux promis et figurant en bonne place dans les différents projets de société des trois centaines de partis politiques, ont manqué à l’appel des réalisations : sécurité, santé, éducation, électricité, sécurité alimentaire, assainissement, infrastructures routières. Des problèmes que le pouvoir de transition tente de résoudre.

On a une classe politique divisée, émiettée en dehors de toute raison objective. Est-il possible d’avoir 100 projets de société valables pour un Mali indivisible ? Certaines divisions tiennent à la boursouflure démesurée de l’égo des dirigeants politiques, aux questions de personnes, à la tendance manipulatrice des uns et au manque de carrure politique des autres. Bref, de 1991 à ce jour le Mali est à la recherche de l’homme d’Etat qui rassemble et qui fera le Mali.

Les contreperformances de la démocratie malienne, ses tares se mesurent aux échecs de la gouvernance dans notre pays, y compris à la faillite de l’Etat. Les facteurs permissifs résident dans la mal gouvernance corollaire d’une démocratie de façade, favorable au népotisme, à la corruption et l’enrichissement illicite, au trafic de toutes sortes.

A cause d’une gouvernance sans redevabilité, qui a abandonné la souveraineté nationale et laissé la direction du pays, sa défense, sa sécurité et les libertés subséquentes entièrement soumises à la domination des maîtres étrangers, une transition inéluctable et nécessaire s’est imposée et pourrait se proroger si on ne joue pas sur les facteurs causaux. Le rassemblement initié par Me Mountaga Tall pourra-t-il apporter le salut ?

B. Daou

Commentaires via Facebook :

REPONDRE

Please enter your comment!
Please enter your name here

Leave the field below empty!