Macron en savane ou l’éléphant dans un champ de mil

29 Nov 2017 - 14:42
29 Nov 2017 - 16:15
 5
Macron en savane ou l’éléphant dans un champ de mil
Adam Thiam
Macron est une synthèse de l’esthète Chateaubriand et du slameur Goudreault. Il n’a pas son pareil pour plaquer le raisonnement oxfordien sur le parler banlieusard, quand il en pressent le dividende.  Il a sa belle nature qui le met à l’aise dans un public de jeunes dont il n’est pas loin de l’âge médiane lui-même,  qui le rend généreux dans l’effort car parler plus d’une heure relève d’une épreuve olympique, et qui l’aide à  s’accommoder  de la modestie des lieux. Il a pourtant ses tares : un brin d’obstination, un parler un peu trop vrai, des erreurs de prémisses. Le tout fait que le pensionnaire iconoclaste de l’Elysée est un hôte désobligeant en savane, où la fonction présidentielle s’incarne surtout par la forme, donc grandement par l’apparat et le vocable.   Mais sur le discours, rien à redire : Macron a une sosie sahélienne, en la personne de Ami Dramane Traoré. Celle-ci peut même lui intenter un procès pour plagiat, afin que le peuple de Yambo Ouologuem savoure enfin le plat froid de la vengeance qu’il attend depuis des lustres. Macron disputerait à n’importe qui  le césar altermondialiste. Lui n’aurait jamais tué Sankara, jamais fait la guerre à Khadafi.  En filigrane, une doctrine neutraliste ? Et qui l’aurait tenu à équidistance de Gbagbo aujourd’hui devant la Cour pénale internationale et Ouattara l’hôte ivoirien du Sommet Afrique-Europe où Macron est attendu en animateurs-vedette ? En tout cas, lui président n’est ni  donneur de leçons ni donneur d’ordres ! Que les Africains fassent leurs élections, basta ! Qu’ils réparent leurs clims, basta !  Qu’ils quittent le franc  cfa si celui-ci ne fait pas leur affaire ! Lui président, ses marqueurs historiques sont plus le legs glorieux de Mandela et de Sankara que les ciseaux de Bismarck découpant l’Afrique ! Ce qui nous amène au fond du discours, voire au fonds de commerce du fringant président dont on doit le verbe haut en tranchant autant que l’habile raisonnement de rhéteur. Sur la lutte contre le terrorisme religieux, Macron a eu la fermeté souhaitable, en particulier sur l’origine des financements du fléau. Il aura évoqué également et heureusement certains des terreaux africains de l’extrémisme violent, en particulier les déficits de gouvernance. Mais, en termes de profondeur à la fois stratégique et idéologique, nous sommes très loin du discours d’Obama au Caire en été 2009. Pire, en termes de diagnostic des causes du retard africain ainsi que des recettes pour sauver l’essentiel, nous sommes loin du discours de ce même président à Accra, encore en été 2009. Obama avait l’avantage d’être bien plus métissé (noir, issu d’un parent musulman,) que Macron et cela compte. Car on l’a vu, même la petite blague pourtant très sympathique du président français sur l’affaire de la clim est très mal passée. L’Afrique n’est pas seulement  le continent premier. Il est celui du premier degré. Mais le fait de marcher sur des œufs n’excuse pas les erreurs de prémisses. Comme en démographie par exemple, où l’école soviétique soutenait déjà en 1970 que le « développement était le meilleur contraceptif » ! Il est vrai que Macron n’est pas de cette école. Mais là, on touche déjà au fonds de commerce. Adam Thiam/Maliweb.net      

Quelle est votre réaction ?

Like Like 0
Je kiff pas Je kiff pas 0
Je kiff Je kiff 0
Drôle Drôle 0
Hmmm Hmmm 0
Triste Triste 0
Ouah Ouah 0