L’œil de Le Matin : Cultivons la charité sans tambour ni trompette

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Comme dans la plupart des pays musulmans du monde, le jeûne du ramadan a débuté au Mali samedi dernier (2 avril 2022). En dehors des privations liées au caractère spirituel de ce mois béni, c’est une période d’épreuves pour le musulman lambda parce qu’elle entraîne des charges supplémentaires.

Et cette année, le ramadan arrive dans un contexte très particulier pour les Maliens. En dehors de la conséquence de la guerre en Ukraine et des sanctions financières de l’UEMOA et de la Cédéao, nos ménages sont sérieusement éprouvés par les conséquences drastiques de la crise sécuritaire et de la pandémie au Coronavirus. Le pouvoir d’achat est quasi inexistant. Malheureusement, la pauvreté ne dispense pas le fidèle de ses devoirs religieux comme jeûner et faire face aux charges de la famille. On se débrouille tant bien que mal.

«Je suis vendeur de céréales dans ce marché depuis plus de 20 ans. Et c’est ma première fois de voir certains clients payer les céréales au détail. Rares étaient ceux qui payaient des sacs de 50 à 100 kg qui peuvent pays de nos jours plus de 5 à 10 kg de riz. Nous sommes, les commerçants, les mieux placés pour dire à quel degré les Maliens souffrent de nos jours pour nourrir leurs familles».

Autrement, c’est le moment idéal pour revenir à une valeur essentielle dans notre société qu’est la solidarité. Et comme le disait une exégèse, «la perception du mois sacré du ramadan est bien sûr importante, car le fait de vivre selon les exigences divines apporte en soi une conscience et des émotions qui facilitent le comportement de solidarité».

Le jeûne est supposé nous permettre de voir quels sont les calvaires quotidiens de ceux qui n’ont pas les moyens. Mois du pardon pour les musulmans, cette période est donc sensée accentuer également les comportements de solidarité et d’entraide. Et cela au-delà de cette opportunité de purification et de salut.

Il ne s’agit plus de se priver de manger, de boire… pendant la journée. Mais, aussi de savoir se priver pour les nécessiteux. Chacun d’entre nous a sans doute dans le voisinage un ménage qui a du mal à faire bouillir la marmite… Nous ne devons donc pas être à l’aise de manger à satiété alors que certains meurent de faim sous nos yeux. Dans les familles nanties, la propension est au gaspillage. On prépare un peu de tout parce que l’envie du jeûneur est insatiable. Au finish, on goûte à peine à certains mets qui sont jetés par la suite. Ce que certaines familles jettent dans les poubelles peuvent nourrir des familles démunies pendant plusieurs jours.

Et dire que partager est l’un des moyens pour purifier son âme et aspirer au salut. Développons en nous cet réflexe de partage. Partager sans que la solidarité se résume à un folklore politico-médiatique sous la lumière des caméras et des appareils des vidéomen. Que reste-t-il de la dignité de ceux qui reçoivent notre supposée main tendue en pareilles circonstances ? Cette solidarité ultra médiatisée nous éloigne de l’assistance spirituelle, du soutien social qu’elle est supposée être.

Donner de la main droite sans que la main gauche ne le sache. C’est ce qui est recommandé par les préceptes coraniques. N’hésitons surtout pas à donner à ceux qui sont réellement dans le besoin et sans tambour ni trompette. Imposons-nous cette solidarité une obligation en disant que, quelle que soit notre situation, nous vivons mieux que d’autres.

Comme le dit Asım Yapıcı de Université des sciences sociales d’Ankara (auteur des livres «Santé mentale et religion», «Religion, identité et préjugé», «Genre, religion et féminité»), «essayons de vivre dans une période considérée comme sacré, d’établir un contact spirituel avec le divin, de contrôler notre monde intérieur par le culte se reflétera naturellement sur le monde extérieur et les relations sociales…» !

La religion c’est avant tout le cœur et après le comportement. Qu’Allah l’Omnipotent pourvoie pour tous !

Moussa Bolly

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