Cher grand-père, la Démocratie a été très mal expliquée chez nous. Elle a été limitée aux élections des maires, des députés et du Président de la République. Du coup, elle est devenue l’ennemie de celui qui est au pouvoir et l’arme de ceux qui veulent venir au pouvoir. Elire un Président, c’est-à-dire mettre fin à un règne, un confort, un ordre, est devenu la seule partie visible et utile de la Démocratie. La seule pour laquelle se battent ceux qui veulent venir et la seule contre quoi se battent ceux qui ne veulent pas partir. La Démocratie a été mal expliquée dans notre pays.
On n’a jamais expliqué assez que la Démocratie c’est aussi le principe de séparation du pouvoir et l’Etat de Droit. Que le Magistrat, le Député, le Président et la Constitution, ce sont eux la Démocratie. Mais que les élections ne sont que le mode de désignation des décideurs dans une Démocratie et non la Démocratie elle-même. Tout compte fait, il faut un pouvoir et des décideurs. Dans l’anarchie, ils viendront par des boulevards en force spéciale pour une durée indéterminée, à vie où plus fort devant eux. Mais en Démocratie, ils sont élus et pour un mandat bien défini.
Oui cher grand-père, en Démocratie, le député émane du peuple et vote les lois. Le Président élu, élabore les projets et les exécute conformément aux lois du député. Le Magistrat au parquet (procureur) veille à l’ordre prédéfini par la loi du député et poursuit celui qui trouble l’ordre. Et le juge tranche et applique la Loi. Et le député, le Président et le Magistrat, tous sujets du Droit et le pouvoir arrête le pouvoir. L’Etat de Droit nait et la Démocratie triomphe.
Le tout dans une Loi fondamentale (Constitution) sans mythe ni mysticisme. Le pays est porté par l’Etat sur trois pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire), reparti entre des institutions. Les modalités de désignation des pouvoirs, des institutions et leur fonctionnement toutes prescrites. Et en toute sécurité le graal portant le pouvoir est constitutionnellement reparti, géré et préservé contre tout destin désagréable. Et les hommes se succèdent, passent et repassent au concert des mandats et des élections. Sans que le graal ne tombe et que le pouvoir ne se perde ou ne se disperse sans arme et sans feu. Quel génie ? Je m’incline !
Hélas ! Hélas ! La Démocratie a été réduite aux élections. Et le débat est porté par les plus moins-sachants. A mardi, cher grand-père ! A mardi ! Inch’Allah !
Lettre de Koureichy