Lettre à grand-père

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Cher grand-père…

Prends ton chapelet et égraine. Prie le créateur du ciel et de la terre. Prie-le de toutes tes forces pour que la dernière corde de la résistance ne se brise pas.  ‘’Que notre armée ne se désolidarise jamais’’. Prie grand-père. Prie pour que notre Armée reste unie et indivisible. Prie de toutes tes forces. Cela, la seule corde qui nous reste. La seule qui ne s’est encore brisée jusqu’à présent.

Oui grand-père, après Azawad-Mali, Démocratie/Charia, Centre/Sud, Nord/Ouest, Majorité/Opposition, Des Pour et Contre multiples, dans tous les domaines et à tous les niveaux, nous voilà au sein de la grande muette, vers la hiérarchie/Soldat. Qu’Allah nous en préserve. Amine ! Que devient le Soldat sans sa hiérarchie ? Que sera une hiérarchie sans ses soldats ? Que serait le Mali, avec une armée déchirée ? Autre que vaincu ?

Oui cher grand-père, le dessein d’une séparation a posé sa première graine au sein de l’Armée. Celle qui aurait trébuché dans l’amalgame bérets verts, bérets rouges en 2012 et gardes et forces spéciales le 25 mai passé. Oui grand-père, elle aurait été menacée à Boni/Mopti ce  week-end entre hiérarchie et soldats, dit-on. Donc grand-père ! Egraine ton chapelet pour que jamais la grande muette ne connaisse cette scission qui a déjà touché tout le Mali à long et à large au fond et à travers.

Nous l’avons toujours dit ici, grand-père. Il y a eu cette crise, car le Mali était dirigé par un Etat affaibli par la mauvaise gouvernance, le népotisme, la corruption et l’impunité. Cela a duré et a su ronger le Mali jusqu’au fort intérieur. Ensuite, sont venus la rébellion et le terrorisme. L’Etat était faible, les institutions n’ont pas pu résister. Le tout s’est ébranlé. Malheureusement, on a fait l’erreur. Au lieu des instituions fortes, nous avons pensé à un homme fort. 2013, les élections ont porté un espoir qui a fini par un désespoir.

Ha oui ! Cher grand-père. Nous avons fait face à plusieurs fronts, rébellion, insécurité mais dans une mauvaise gouvernance et une impunité inédites. Le tout sous le chapeau de l’injustice et d’une fuite générale des responsabilités. L’Etat a perdu le terrain dans une grande partie du Mali. Aujourd’hui encore, petit à petit, cet Etat ne cesse de mourir à petit feu et ne lui reste à ce jour, qu’un petit pouvoir. Et pire, ce petit pouvoir qui ne subsiste qu’avec une corde de l’union au sein de notre petite  armée affaiblie par la guerre, est menacé. Oui, il est menacé car l’armée est menacée.

Cher grand-père ! Aujourd’hui, il urge. Il urge de sauver et l’Etat et le Mali. Il urge car nous sommes au dernier tournant. Nous sommes au dernier tournant entre un Mali sauvé et un Mali péri. Entre un Mali bâti et un Mali détruit. Nous sommes au dernier tournant avant que la chaine de commandement militaire ne se brise. Avant qu’on ne rentre en une guerre sans fin et sans objet. Une guerre d’égo.

Oui grand-père, il urge de légaliser nos légitimités et de légitimer nos légalités. Oui il urge de nous donner des élus démocratiques légitimes. Un Président de la République et une Assemblée nationale. Il urge d’institutionnaliser notre système étatique et de renforcer nos institutions par un Etat de Droit et de Démocratie. Il urge d’avoir une Armée républicaine, soumise à des institutions politiques civiles et démocratiques. Il urge. Cher grand-père !

Il urge et cessons d’errer avant de se perdre dans la nature de l’anarchie étatique. Il urge. Il urge. Il urge avant que l’armée ne s’ébranle et que l’on ne le regrette à jamais. Il urge cher grand-père ! Et à mardi prochain pour ma 112ème lettre. Inch’Allah !

Lettre de Koureichy

 

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