On n’a nul besoin de développer le sigle Cedeao au peuple malien car depuis 2012, suite à la chute tragique d’ATT et la Transition politique dirigée par Dioncounda Traoré, cette organisation est présente dans la vie politique du Mali. Cependant, il n’est pas inintéressant de rappeler que la Cedeao est la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest créée à Bamako en juillet 1977 sous l’égide de Moussa Traoré. De ce point de vue, le volet politique ne fut guère évoqué, la plupart des chefs d’Etat de l’époque étant issus d’un putsch militaire et considérés comme des étant au pouvoir avec comme Premier ministre Jacques Chirac.
Les questions de développement économique, plus que celles de démocratie et des droits de l’homme, étaient au centre des préoccupations de l’Elysée de même de la Chancellerie de la RFA (République Fédérale d’Allemagne) conduite à l’époque par Helmut Schmidt. L’organisation sous-régionale vit donc le jour dans l’indifférence générale de l’Europe occidentale quand on sait que l’Italie était dirigée par le démocrate-chrétien Aldo Moro, l’Espagne par le dictateur F. Franco (Caudillo) et le Portugal par Salazar de la même veine politique que le dirigeant espagnol. Quant à la Grande Bretagne retranchée dans son insularité et dirigée par le gouvernement travailliste de Wilson, ses propres affaires dans ses anciennes colonies l’occupaient au point de l’empêcher d’aller fouiller ailleurs et de se donner d’autres ennuis.
Les questions de politique et de démocratie ne vinrent à la table de l’Europe que dans les années 1989-1990 à la faveur de la conférence de La Baule organisée par le Président François Mitterrand élu en 1981 et dont on pense bien qu’il est à l’origine du terme gouvernance politique, administrative et économique.
Mais la fréquence des coups d’Etat dans la sous-région, en dépit des régimes démocratiques y installés, amena progressivement cette organisation à s’occuper des questions politiques non pour défendre les peuples grugés de la zone concernée, mais plutôt pour le faire pour les chefs d’Etat déchus ou en exil. Le développement économique fut donc vite abandonné au profit des urgences politiques liées à la dénonciation des complots militaires et à la protection des seigneurs de la néocoloniale tombés en disgrâce. Pourtant, curieusement, à la chute de Moussa Traoré en mars 1991, suivie de la mise en place du CTSP, la Cedeao ne réagit point à cet événement historique et se fit muette comme une carpe. Tant que l’effet du printemps arabe (déchéance de Ben Ali en Tunisie et d’Hosni Moubarack en Egypte) se répandit sur les pays du Sahel, la Cedeao se montra satisfaite de l’évolution politique constatée.
Les évènements politiques au Mali depuis 2012 donnèrent à l’organisation sous régionale de reprendre pied au Mali et d’y dicter ses conditions. Sous son égide, la transition politique dirigée par Dioncounda Traoré conduisit à l’élection d’IBK en 2013. Par la suite, de complots militaires en coups d’Etat, la Cedeao sous divers Présidents et autant de prétextes, se crut maîtresse du destin de ce peuple plusieurs fois millénaire contrairement à d’autres dont l’histoire remonte seulement au début de la colonisation européenne de la 2è moitié du XIXè siècle.
D’une Transition à une autre, de celle de Bah N’Daw à Assimi Goïta, la Cedeao est en plein déphasage avec le peuple malien qui souhaite non un retour rapide à une vie constitutionnelle normale, mais plutôt la paix sur toute l’étendue du territoire national. Pour les ¾ des Maliens que la Cedeao ne veut pas écouter, l’urgence n’est pas d’aller aux élections dont ils sont d’ailleurs dégoûtés, mais plutôt de faire revenir la sécurité sur tout le pays et surtout la libération de Kidal que la France ne veut pas céder gratuitement.
Napoléon Bonaparte, dans « le Mémorial de Sainte Hellène », disait, nous paraphrasons, toute l’Europe m’écoutait et m’entendait, je n’en avais cure, mais j’avais tort.
Facoh Donki Diarra
(Ecrivain)