Le Coin du juriste : C’est quoi un mercenaire ?

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Un groupe d’hommes soupçonnés d’être mercenaires ivoiriens a été arrêté par la police de frontières du Mali à l’Aéroport international-Président Modibo Kéïta. C’est quoi le profil d’un mercenaire ? Actualité oblige.

Bien que les conventions internationales utilisent la même définition des mercenaires, le statut juridique de ces derniers diffère entre droit international public et droit international humanitaire.

Nous allons nous intéresser au droit international humanitaire. Selon l’article 47 du Protocole additionnel I aux Conventions de Genève, le terme “mercenaire” s’entend de toute personne :

  1. qui est spécialement recrutée dans le pays ou à l’étranger pour combattre dans un conflit armé ;
  2. qui en fait prend une part directe aux hostilités ;
  3. qui prend part aux hostilités essentiellement en vue d’obtenir un avantage personnel et à laquelle est effectivement promise, par une partie au conflit ou en son nom, une rémunération matérielle nettement supérieure à celle promise ou payée à des combattants ayant un rang et une fonction analogues dans les Forces armées de cette partie ;
  4. qui n’est ni ressortissant d’une partie au conflit, ni résident du territoire contrôlé par une partie au conflit ;
  5. qui n’est pas membre des Forces armées d’une partie au conflit ; et
  6. qui n’a pas été envoyée par un Etat autre qu’une partie au conflit en mission officielle en tant que membre des forces armées dudit État.

Il convient de souligner que cette définition reste des plus restrictives dans la mesure où elle s’applique seulement aux conflits armés internationaux et requiert que six critères cumulatifs soient remplis. Selon l’article 47 du même protocole, la détermination du statut de mercenaire est l’objet d’un “tribunal compétent” de la puissance détentrice.

En droit international humanitaire, le fait d’être un mercenaire ne constitue pas une infraction. Il en va de même dans les statuts des tribunaux pénaux internationaux. Arrêtés, les mercenaires n’ont pas droit au statut de prisonnier de guerre, la puissance détentrice peut toutefois décider de les traiter conformément à ce statut. Les mercenaires doivent toujours être traités avec humanité, conformément aux garanties fondamentales telles que définies par l’article 75 du Protocole additionnel I aux Conventions de Genève.

Enfin, ils peuvent être poursuivis pour leur activité de mercenaire seulement dans le cadre du droit national de la puissance détentrice si celui-ci contient des provisions désignant le mercenariat comme une infraction distincte.

Il est entendu que la catégorie de mercenaire ne saurait être étendue pour couvrir les zones grises impliquant les combattants volontaires de nationalité autre que celle des belligérants et qui décident de prendre part au conflit, ni le personnel des compagnies militaires privées présentes en situation de conflit.

Cette catégorie est principalement motivée par l’imposition d’un stigmate d’avidité financière par opposition aux valeurs de patriotisme et d’honneur qui caractériseraient les combattants réguliers. En dehors de cela, la catégorie de mercenaire n’est guère utile à la réglementation nécessaire des comportements des sociétés militaires privées en situation de conflit.

S’appuyer sur une détermination individuelle du statut après arrestation et exiger que les six critères susmentionnés soient remplis ne fera que rendre la situation encore plus incohérente parmi les employés de ces sociétés sans pour autant toucher au statut des compagnies privées elles-mêmes. Une régulation efficace du personnel militaire privé devrait plutôt les ramener aux catégories de base du DIH que sont celles de civils ou combattants. Il en est de même pour ceux qu’on appelle combattants irréguliers et les combattants étrangers appartenant à un Etat qui n’est partie ni à un conflit international ni à un conflit non international.

Par Moussa GUINDO

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